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Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Titel: Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Abtey
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manquent… Un mari jaloux… Une maîtresse désespérée… Les hypothèses sont légion. Qu’importe, me voilà prévenu. D’ailleurs, je suppose que notre homme cherchera à se faire oublier.
    — Un temps du moins. Mais il pourrait revenir quand vous ne l’attendrez plus.

Chapitre cinq
    L’Amour et l’Intrigue, l’Art et la Critique
    De grande montée, grande chute
    « — Mais au fait, dis-je, où m’emmenez-vous ?
    — Chercher l’inspiration, me répond mon compagnon. Eh oui, faute d’approcher cette Alouette (la protégée de Lanteaume) au beau milieu de son nid, faisons-lui passer un message par les airs. Les mots sont des armes. Livrons notre guerre en dentelles et prenons nos flèches de couleurs au carquois de Cupidon. Il faut la séduire. Paris a du génie… mettons-le à l’ouvrage.
    — Et cette inspiration, où allons-nous la trouver ?
    — À cette heure-ci, la question ne se pose pas. Il y a plus de paroles dans un pot de vin que dans un muid de cervoise… dans le calice, au fond d’une bouteille. Cherchez le buveur, vous trouverez le poète.
     
    Nous passons ainsi la porte de plusieurs cabarets. Don Juan de Tolède a une idée précise. Il veut faire pic et capot . Il cherche Molière. On finit par nous indiquer une adresse où nous sommes à peu près certains de le trouver. Au chat qui parle , rue de la Harpe.
    Nous approchons.
    En vérité, nous arrivons au bon moment. C’est-à-dire avant qu’il ne soit trop tard. La moitié de la salle est dehors, devant l’entrée du cabaret.
    La scène est inattendue. Hercule, le page de monsieur de Villefranche, cet Hercule que nous connaissons ou croyonsconnaître, n’est plus, ce soir, l’acteur ovationné, le champion de la Tolérance, mais un jeune homme abattu, ivre de vin et de colère.
    Nous l’apercevons de loin, les cheveux en bataille, le pourpoint déchiré. En face de lui, un groupe de gentilshommes, du moins d’hommes bien nés, le tournent en ridicule. Ils ont l’épée à la main. Leur adversaire pathétique est sans défense, encerclé. On se rit, on se moque. On le fait tomber quand il se relève. Personne n’ose s’opposer à eux. Si… un jeune homme. Nous reconnaissons Molière, justement, mais une gifle gantée l’envoie à terre, à son tour, au côté de son ami. Les deux font la paire, dit-on. Hercule se redresse encore une fois. Il est parvenu à saisir une arme sur l’un de ses agresseurs. Une dague. Mais cette courte lame ne fera pas le poids face à ce faisceau de rapières qui se tendent vers le même point. Allons, gandin, du raisonnable , dit-on , vous allez vous faire mal. Rentrez chez vous . Mais Hercule s’avance, il va porter un coup au hasard dans cette assemblée. Puisque c’est ainsi, dit-on, en repoussant l’assaut désespéré.
    Don Juan de Tolède et moi-même avons accéléré le pas, en sortant l’épée du fourreau.
    — Messieurs, venez voir de ce côté-ci, dit mon compagnon, en prenant sur le champ un duelliste à partie.
    Une escarmouche s’engage sans plus de paroles. Cette fois, l’affaire est tout autre. L’un de nos adversaires est blessé par ma main, un autre se fait désarmer… Les gens commencent à sortir de chez eux. Il vaut mieux en rester là. Les autres ont cessé de rire. Ils soutiennent le blessé et se retirent, la tête haute, le regard rempli de haine, sans un mot, sans un salut, de cette rue où ils n’ont brillé qu’un instant.
    L’or ne donne rien, il prend tout
    Nous voyons alors une jeune femme qui s’apprête à les rejoindre. Elle hésite. Mais on la dédaigne. Elle aussi nous la reconnaissons. C’est Chimène, le premier amour d’Hercule, le plus douloureux.
    Notre jeune page fait peine à voir. Ses yeux sont souillés de larmes. Son visage est couvert de boue et de poussière. Don Juan de Tolède lui tend la main et l’aide à se relever.
    — Que s’est-il passé ? demande-t-il simplement.
    — J’ai donné mon cœur à une putain ! dit violemment le jeune homme, blessé dans son âme.
    Sur ces mots, il s’enfuit.
    Nous n’essayons pas de le retenir.
    Le don Juan s’approche de la comédienne. Il la fixe des yeux.
    — Parle ! dit-il avec autorité, en lui prenant le bras.
    La comédienne prend un air hautain.
    — Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise ? Votre ami s’est fait des idées. Hier soir, c’est lui que je voulais. Mais hier, c’était hier. Je suis changeante. C’est ma nature. L’un de ces gentilshommes que

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