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Don Juan

Don Juan

Titel: Don Juan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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mieux. En toute conscience, croyez-vous que le comte de Loraydan, Français de l’Ile-de-France, pourra donner un avis rigoureusement impartial sur une question qui, vous l’avouerez, touche les intérêts de la couronne d’Espagne, autant que ceux de la couronne de France ?
    – Sire, dit François I er avec le bon sens de sa juste cause, il ne s’agit pas de connaître l’avis de Loraydan, mais seulement, par ce truchement, l’avis du Commandeur Ulloa…
    – Très juste ! s’écria l’empereur. Il n’en est pas moins vrai que ce bon gentilhomme ne pourra s’empêcher de faire tant soit peu pencher la balance du côté où va son cœur, c’est-à-dire vers vous, mon cher sire. Et qui pourrait lui en faire un crime ? Que diriez-vous si je vous proposais de vous en rapporter aux dires d’un tel bon Espagnol après que je vous aurai juré qu’il connaît parfaitement la pensée du Commandeur Ulloa ?
    François I er demeura sans réplique, mais entre ses dents il grommela :
    – Il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre.
    Et tout à coup, comme Charles-Quint le considérait avec ce même sourire d’indéfinissable ruse, le roi de France fut saisi d’un accès de colère d’autant plus terrible qu’il n’en pouvait rien laisser paraître. Il se mit à se promener avec agitation à travers son cabinet et il songeait amèrement :
    « Je suis joué !… Que faire ? Que dire ?… Jour de Dieu ! il me semble que l’heure n’est pas aux paroles, mais aux actes !… Ah ! si j’osais ! Si je ne craignais pas quelque reproche de félonie !… Et où serait après tout la félonie ?… Ruse de guerre, tout au plus !… »
    – Sire, fit-il soudain, je vous dois des excuses…
    Charles-Quint tressaillit. Au son de la voix de son adversaire, il comprit que les choses se gâtaient. Il cessa de sourire. Son visage se figea. Son regard devint vitreux, et, du bout des lèvres :
    – Des excuses ?… De vous à moi ?… Et à quel sujet, sire ?
    – Oui. On m’a conté l’algarade. Mon fils Henri est un peu écervelé. Et puis, si jeune encore !… On m’a assuré qu’hier, après le tournoi, ce maître fou sauta en croupe du cheval que montait Votre Majesté, qu’il eut l’audace de vous saisir dans ses bras, et de vous crier : « Sire, vous êtes prisonnier ! »
    Ce petit incident était parfaitement exact. Il n’avait en soi que peu d’importance. Mais il y eut une étrange vibration dans la voix de François lorsqu’il relata les paroles de son fils.
    Charles-Quint se raidit. Des pensées sinistres l’assaillirent. Il jeta un prompt regard vers la porte derrière laquelle on entendait le bourdonnement des centaines de courtisans, tous bien armés, et vers les fenêtres qui donnaient sur la cour dans laquelle les mille Suisses du roi étaient rangés en ordre de parade… et de bataille. L’empereur frémit.
    – Des excuses pour si peu ! murmura-t-il, et il mit toute sa puissance d’indifférence en ces mots.
    – Pardon, sire ! des excuses : je vous les fais de bon cœur, non pas à cause du geste inconsidéré de mon fils, mais parce que je n’ai pas encore eu le courage de lui en faire le moindre reproche.
    – Tout reproche est inutile, dit Charles-Quint. Le prince Henri est un charmant gentilhomme. Sa plaisanterie m’a paru digne de cette cour de France où je me sens en si parfaite sûreté…
    – Hum ! fit François I er avec un éclat de rire. En parfaite sûreté ?… Savez-vous, sire, le conseil que m’a donné cette bonne duchesse d’Étampes à qui, si galamment, vous baisiez la main tout à l’heure ?
    – Voyons, dit Charles-Quint, plus raide, plus impénétrable que jamais.
    – Eh bien, elle me conseille, puisque je tiens Votre Majesté, de simplement vous garder prisonnier à Paris comme vous m’avez gardé à Madrid !… Qu’en pensez-vous, sire ?
    – Si le conseil est bon, dit Charles-Quint glacial, il faut le suivre.
    Cette parole que l’Histoire a recueillie eut le don d’exaspérer François I er . Il eut un geste violent ; à son tour, il se raidit en une de ces attitudes de majesté que les Valois savaient prendre quand il leur fallait jouer leur rôle de roi ; puis, brusquement, il marcha vers la porte.
    Charles-Quint comprit que si le roi atteignait cette porte, s’il l’ouvrait, l’irréparable allait s’accomplir : l’ordre d’arrestation allait jaillir !…
    Et, tranquillement,

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