Druides et Chamanes
à l’endroit où sa protectrice, une jument nommée Tereza, qui est en réalité une femme-fée, sinon une femme-chamane, lui a donné rendez-vous s’il avait besoin de son aide. Il l’appelle, et celle-ci accourt immédiatement et rétablit la situation : elle emmène Koadalan au château du sorcier et lui fait récupérer ses fameux livres de magie ainsi que sa femme et son fils, qui étaient retenus prisonniers. C’est alors la séparation d’avec Tereza, au milieu des bois. « Je te fais mes adieux pour toujours, car nous ne nous reverrons jamais », dit Tereza. Alors, « elle s’éleva en l’air et il la perdit bientôt de vue ». C’est en quelque sorte la preuve que cette femme jument, en laquelle on pourrait reconnaître la déesse gauloise Épona (devenue Rhiannon dans la tradition galloise), est réellement l’initiatrice et la protectrice de cet apprenti chamane qu’est en fait Koadalan. Maintenant, si l’on peut dire, il est capable de voler de ses propres ailes : « Koadalan, sa femme et son fils remontèrent alors dans leur carrosse, car celui-ci était revenu aussitôt qu’il l’avait demandé. Ils arrivèrent sans tarder au pays de Koadalan, à Plouaret {74} . »
Mais tout ne se passe pas toujours aussi bien pour ceux qui s’introduisent dans le monde souterrain. Dans un autre conte breton, recueilli dans deux versions presque identiques dans les Côtes-d’Armor et dans le Finistère, autrement dit en Haute Cornouaille, il s’agit d’un jeune homme qui veut rejoindre sa sœur, laquelle a épousé un personnage mystérieux qui l’a emmenée ensuite dans son domaine du Château Vert. Mais le héros, qui se nomme Izanig, ne sait pas où se trouve le Château Vert. Il se lance alors à l’aventure et rencontre des personnages quelque peu fantastiques qui, les uns après les autres, lui indiquent le chemin à suivre. Et ce chemin est fort pénible, hérissé de dangers qui sont autant de fantasmes susceptibles d’empêcher Izanig d’aller jusqu’au bout de sa quête.
Quittant une plaine dont la moitié est stérile et l’autre moitié fertile – indice du passage entre les deux mondes : « Il arriva ainsi à la route dont la terre était noire. Il voulut la prendre, mais il vit qu’elle était remplie, à l’entrée, de serpents entrelacés, de sorte qu’il eut peur et qu’il hésita un moment à aller plus loin. Son cheval lui-même reculait d’horreur quand il voulait le pousser dans ce chemin. » Izanig, confiant en son destin, persiste et se lance courageusement dans ce milieu hostile. Il en est quitte pour la peur, car il arrive indemne, ainsi que son cheval, au bord d’un grand étang « et il ne voyait aucune barque pour passer de l’autre côté. Il ne savait pas nager, de telle sorte qu’il était fort embarrassé ». Il se trouve donc dans une situation de « blocage » psychologique dû aux fantasmes terrifiants qui l’assaillent. Il lance pourtant son cheval dans les eaux et, au prix de grandes difficultés, il atteint l’autre rive. Mais là tout recommence : il est devant « l’entrée d’un chemin profond, étroit et sombre, tout rempli d’épines et de ronces ». Il se désespère un moment, puis rampe à travers les ronces et parvient à sortir de ce piège, mais « ses vêtements étaient tout déchirés et son corps était tout meurtri et sanglant ». Il n’est cependant pas au bout de ses peines.
Il voit arriver un cheval maigre et décharné en lequel il reconnaît cependant sa propre monture. Il saute sur le dos du cheval et « parvint à un endroit où il y avait un grand rocher placé sur deux autres rochers. Le cheval frappa du pied sur le rocher de dessus qui bascula aussitôt et laissa libre l’entrée d’un souterrain ». Alors, une voix l’invite à pénétrer dans le souterrain. « Une odeur épouvantable le fit suffoquer. Le souterrain était fort obscur et il ne pouvait avancer qu’à tâtons. Au bout d’un moment, il entendit derrière lui un vacarme comme il doit y en avoir en enfer lorsque tous les diables se mettent à hurler. » Apercevant une petite lumière au lointain, il se dirige dans cette direction. « Et bientôt, il se trouva en dehors du souterrain. Mais devant lui, il y avait plusieurs chemins et il se demandait bien lequel il allait prendre. Il se décida à suivre celui qui faisait face au souterrain et continua sa route droit devant lui. » Après avoir triomphé de tous les obstacles
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