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Duel de dames

Duel de dames

Titel: Duel de dames Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
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union, de se soutenir mutuellement
et d’intervenir en cas de besoin, pour le fait du seigneur le roi, de ses
enfants, et du royaume ». Elle écrivit, suivant la formule consacrée :
« Nous reine, en parole de reine », et parapha le pacte de son
élégante signature.
    Puis elle fit de même avec Jean sans Peur, qui lui
jura respect, protection, amitié et fidélité.
    Elle convoqua ses artisans et leur commanda un
coffre de belle taille, en fer épais, recouvert de cuir fauve et gravé à la
feuille d’or de ses armes et de sa devise : « À jamais ». Les
ferrures ouvragées étaient solides, les serrures au nombre de six, énormes et
inviolables. Quand il lui fut livré, elle ne fut pas satisfaite et fit ajouter
quatre autres serrures. L’intérieur, molletonné de velours écarlate, était
divisé en compartiments, eux-mêmes ferrés et scellés de son sceau. Elle y
déposa le fruit de ses enfouissements, ses joyaux les plus précieux, des
parchemins secrets, des livres de belle facture et autres trésors. Elle choisit
alors une cache dans son hôtel de la Pissotte, puis se ravisa et fit emmurer le
coffre dans une muraille dérobée de la forteresse de Vincennes.
    Un peu rassurée sur l’avenir, la reine se
préoccupa de ses problèmes domestiques : Isabelette, veuve du roi d’Angleterre,
refusait d’épouser Charles d’Orléans. Elle avait seize ans, Charles onze, et
elle ne voulait pas se démettre de son titre royal pour un enfant et un si
petit trône ducal. Elle menaçait de se donner la mort si on l’y contraignait. En
dépit de cette menace, fin décembre, la date fut fixée au 29 juin 1406,
à Compiègne.
    La reine d’Angleterre cessa de manger.

25
Les nourrissons de Barbette
    Mort, qui jamais ne sera lasse
    De renverser les rangs, les places,
    Les hauts grades par toi déchoient ;
    Tu réduis en cendres les rois.
    Mort, tu abats en un seul jour
    Le seigneur à l’abri de sa tour
    Et le pauvre dans son village.
    Les Vers de la mort , Hélinand de Froimont
    Valentine Visconti se tenait en sa cour du château
de Blois, loin des agitations parisiennes, depuis qu’elle avait mis au monde sa
petite fille Catherine qui avait plus d’un an. La duchesse d’Orléans faisait
certes de fréquents séjours dans la capitale lors des cérémonies officielles, comme
celle de la Nativité à l’Hôtel solennel des Grands Ébattements.
    C’était le jour de l’Épiphanie 1406. Valentine
tirait les rois avec ses enfants. La galette, de gruau et de poudre d’amandes
miellées, était spécialement faite pour ce jour. Celle-ci était impressionnante,
large et longue, car il en fallait pour tout le monde.
    Entourés de musiciens, de leurs nourrices et
servantes, de damoiseaux et de damoiselles, les petits princes chantaient, tandis
qu’un écuyer tranchait les parts.
     
    Avisez donc ce beau gâteau
    Combien délectable,
    Et aussi ce beau couteau,
    Qui bientôt le sabre,
    Ah ! si vous pouviez
    Ne pas le couper,
    Car veux me bailler
    Le gâteau entier.
     
    Ils fêtaient, comme chez le bourgeois et le laboureur,
l’arrivée des Rois mages : Melchior, Gaspard et Balthazar.
    Trop petite pour être de la fête, Marguerite était
avec ses berceuses et nourrices. Le bâtard d’Orléans était donc le plus jeune
des enfants et il lui revenait de droit de se glisser sous la table et de jouer
à « pour qui ? ». Il avait quatre ans et était fort vigoureux
pour son âge. C’était le plus facétieux des garçons, et il ne s’en laissait pas
conter par les fils légitimes. La seule concession que Valentine avait accordée
à Mariette d’Enghien était de choisir le prénom de son fils. Elle avait choisi
Jean. Son demi-frère, qui avait sept ans, portait le même prénom. Son père, ayant
fait son fils bâtard comte de Dunois, pour les différencier, on l’appelait
Dunois tout court. L’aîné, Charles, douze ans, était à l’opposé de ses
turbulents frères, c’était un rêveur, et il chantait bien. Il n’en était pas
moins batailleur quand il le fallait et savait rendre les coups.
    Alors que l’écuyer-tranchant mettait dans un linge
les parts de gâteau et qu’il en nouait les coins, Dunois était déjà sous la
table et riait comme un petit fou.
    Valentine prit une part et demanda :
    — Pour qui ?
    — Pour moi, répondit la voix aigrelette de
Dunois.
    — Non, pas pour toi, c’est pas comme cela qu’on
commence ! hurla Jean.
    — Pour Dieu ! finit par dire Dunois

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