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Duel de dames

Duel de dames

Titel: Duel de dames Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
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Mes propres chevaucheurs
sont un peu indolents, je vais les entraîner, tenta-t-il d’ironiser.
    — Songez à leur apprendre aussi l’art de la
navigation en rivière. Pourquoi s’arrêter en chemin pour dormir lorsque l’on
peut dormir en cheminant.
    — Vous êtes déjà bien renseigné, à ce que je
vois.
    — Que vous ayez pris une barge en Seine, de
Troyes jusqu’à Melun, n’est plus un mystère, monseigneur. Pourtant le prix de
la course n’était-elle pas à force et exploit de chevaux ?
    — Et à bateaux ! Je n’ai pas résisté à
la rime, vous connaissez mon goût pour la poésie, messire de Bois-Bourdon,
plaisanta le duc avec raideur, tout en songeant avec irritation à son assesseur
qui avait la langue trop bien pendue.
    — Voilà qui était astucieux, mais que dira le
monde de ce pari de dupes ? répliqua le sire de Graville, glacial.
    — Je n’ai pas de comptes à rendre, messire !
s’emporta le prince en perdant son sang-froid. Vous vous oubliez, je suis le
duc d’Orléans ! Et je veux voir mon frère le roi de France, lança-t-il
rouge de colère en tentant de forcer le passage.
    — Notre sire est empêché ! riposta
fermement le sire de Graville.
    À ce moment, Pierre de Foissy sortit de l’Hôtel
tout agité de tics.
    — C’est une hon… honte. On tient notre
souverain hors de vue, même la reine m’a chassé.
    Sa petite silhouette étriquée et noiraude s’éloigna
en lançant des imprécations. Louis en profita pour rompre l’affrontement.
    — Ainsi Isabelle est auprès de lui. Laissons-les
donc ensemble, capitula-t-il en tournant les talons.
    En réalité, il connaissait un préau par lequel on
pouvait monter dans la galerie des Chasses, la même qu’avaient empruntée
Catherine et la reine. Élevé à l’Hôtel royal, il connaissait depuis l’enfance
ses secrets labyrinthiques. Il s’éloigna d’un pas alerte, se demandant si son
frère avait déjà eu connaissance de sa duperie.
    *
    Le roi n’avait connaissance de rien. Il gisait en
chemise et hauts-de-chausses dans un faudesteuil, hâve et amaigri, les boucles
blondes et soyeuses de ses cheveux étaient comme vieille paille d’écurie. L’imposante
Arégonde s’acharnait à l’aide d’un coutelas à lui ôter sa deuxième botte, l’autre
gisait sur le sol, éventrée.
    Dès son entrée, Isabelle sut d’un seul regard
pourquoi la dame de Louvain avait interdit la porte du Retrait des Études.
Nul ne devait voir le souverain dans cet état.
    — Au diable cette mode qui veut que tout
colle au corps, comme lierre au chêne, râlait Arégonde en s’escrimant. Et toute
cette mouille et cette boue n’arrangent rien.
    Charles se laissait faire, renversé sur le dossier,
bouche béante. Ozanne tentait de lui faire boire un bouillon qui dégoulinait
sur son menton. Elle leva sur la reine des yeux brouillés de larmes.
    — On le fit descendre par force de sa monture,
tant il s’y cramponnait, couplé avec elle autant que centaure, lui dit-elle d’une
voix altérée. Mais il ne tenait plus sur ses jambes, alors il fallut le porter
à bras jusqu’ici.
    La maîtresse cuisinière triompha enfin de la botte
récalcitrante qu’elle rejeta sur le sol. Elle s’effaça devant la jeune
souveraine en essuyant ses mains boueuses dans son surcot.
    — Y a qu’à le voir, le malheureux, s’apitoya-t-elle.
À le mettre à bouillir, il ne graisserait même pas le pot.
    Isabelle s’approcha, s’agenouilla devant son époux,
et lui prit les mains.
    — Mon doux seigneur, murmura-t-elle, comme
vous voilà fait.
    Les yeux de Charles tournèrent dans les orbites et
se fixèrent sur elle. Soudain, il la repoussa avec force.
    — Qui est donc cette femme qui m’importune ?
    Les yeux d’aigue-marine d’Ozanne s’emplirent d’effroi
en regardant la princesse de Bavière rouler sur les carreaux : le roi
ne reconnaissait plus la reine.
    *
    Après un long détour, Louis avançait en chantonnant
une ballade, tout en admirant les fresques à la détrempe représentant des
scènes de chasses et de sous-bois qui ornaient la galerie conduisant à l’Hôtel
du roi. Comme il en approchait, il se tut et s’arrêta net à la vue de trois
hommes d’armes qui en gardaient à présent le seuil. Ce diable de Bois-Bourdon
avait pensé à tout.
    À ce moment, il eut la satisfaction de constater
qu’un des soldats écartait un battant du portail. Il était prince de sang, aucune
porte ne pouvait lui être

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