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Elora

Elora

Titel: Elora Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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malheureux. Peu importait en réalité. La fillette savait à présent à qui elle avait affaire. C’était là l’essentiel. Toujours connaître ses ennemis pour protéger ceux que l’on aimait…
    *
    Petit Pierre n’était pas rassuré. Certes, son père lui avait promis de s’interposer entre sa mère et lui, certes, il gardait la tête haute, mais en réalité, à l’instant de pénétrer dans le campement après avoir passé la sentinelle, l’enfant avait le cœur qui tambourinait et les jambes qui flageolaient.
    Aussi fut-il heureux de voir Jean courir vers eux, à peine eurent-ils approché le pied de l’imposante falaise blanche. Son demi-frère ne lui laissa pas le temps de s’expliquer. Il débita d’un trait la grande nouvelle :
    — Elle est partie !
    N’obtenant qu’un regard d’incompréhension, Jean se hâta d’ajouter en bombant le torse, fier de sa supériorité du moment :
    — Maman est partie. Y a eu un conseil. Ils ont tous levé la main et elle est partie.
    — Qu’est-ce que… gronda Mathieu que cette nouvelle avait pourtant toute raison de réjouir.
    Plantant là les deux enfants, il se précipita à la rencontre de Villon qui s’en venait vers lui.
    — Partie… partie ? demanda Petit Pierre qui n’osait y croire.
    Jean hocha la tête.
    — Elle voulait m’emmener, mais j’ai dit non. Je préfère rester avec papa… et avec toi.
    Petit Pierre eut l’impression qu’un énorme bloc quittait sa poitrine. Un immense sourire envahit son visage, chassant les affres de son tourment. Il porta son regard vers les deux hommes qui se rejoignaient.
    — Paraît que t’as coursé un chevreuil ? Tout seul ? repartit Jean.
    — ?…
    — C’est papa qui l’a dit…Tu racontes ?
    — Ben…
    Petit Pierre prit une profonde inspiration. Sa mère envolée, il n’avait plus rien à craindre. Il enroula son bras autour des épaules de son demi-frère et l’entraîna vers la falaise.
    — Faut que je t’explique quelque chose, Jean. Quelque chose de terrible…
    Tandis qu’il lui faisait le récit de l’embuscade et de la conversation qu’il avait eue avec Mathieu, ce dernier découvrait avec plaisir combien Villon, cette fois, avait assuré leurs arrières. Sitôt revenue au campement avec la charrette et sa cargaison, Fanette, avait claironné haut et fort que la marque sur son visage était l’œuvre de Mathieu, que son ancien amant avait perdu son sang-froid et qu’il devenait une menace pour eux. Sans parler de son rejeton ! Villon avait vu rouge. Séance tenante, il avait exigé une assemblée extraordinaire, avait exposé ses griefs contre Fanette et réclamé sa destitution. Fanette avait ri, sûre de son ascendant sur la communauté. Elle s’était trompée. Beaucoup la craignaient, mais peu la respectaient. Les femmes pour avoir dû partager leurs époux, les hommes parce que, malgré sa cruauté, Fanette restait une femme. Ses partisans ne furent pas assez nombreux. La majorité réclama Villon pour chef. L’orgueil de Fanette lui interdisait de rester.
    Une heure plus tard, entourée d’une quinzaine de compagnons dévoués, elle jetait sur leur communauté un dernier regard vengeur avant de partir sans se retourner.
    — La charrette était emplie de tonnelets de bière, et je ne connais rien de meilleur pour les grandes occasions ! conclut Villon en prenant Mathieu aux épaules.
    Ce dernier ne se le fit pas dire deux fois. Ce jourd’hui était un grand jour. Le premier depuis longtemps où il se sentait guilleret.

5
     
    Réfugiée à moins d’une lieue de ses anciens compagnons, Fanette était rongée par l’amertume. La petite grotte dans laquelle elle avait établi son repaire se trouvait de l’autre côté des gorges de la Bourne. Bien moins vaste et agréable que celle de Choranche, ce n’était qu’un renfoncement de calcaire au pied d’une somptueuse cascade. Elle était aussi davantage exposée, même si la forêt de Chalimont, tout près, était plus giboyeuse que celle des Coulmes. Fanette avait bien conscience que ce campement était un pis-aller. D’autant qu’en cette fin novembre la neige avait commencé de tomber. Les sommets du Vercors se nimbaient de blanc et, avant longtemps, elle souffrirait du manque de confort que les autres avaient su recréer. Certes elle avait emporté sa part de butin. Des ustensiles de cuisine, des peaux et des fourrures pour l’hiver à venir, des bijoux et des toilettes. Mais il lui

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