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Elora

Elora

Titel: Elora Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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Pierre avaient échangé leur baiser, lorsque, se distinguant du fracas habituel, le bruit d’une cavalcade l’arrêta.
    — Qui va là ? demanda-t-il en promenant vers l’arrière les flammes de sa torche, accrochant dans une fissure le corps translucide d’un protée.
    Petit Pierre se dirigea vers sa lumière pour le rejoindre, le souffle trop raccourci par sa course pour répondre.
    — Petit Pierre ? Mais qu’est-ce que tu fais ici ? s’étonna son père.
    L’enfant s’immobilisa enfin à quelques pas de lui, les mains sur les genoux. L’angoisse au ventre, Mathieu s’empressa vers lui et le secoua.
    — Parle, voyons !
    Les joues rouges, Petit Pierre hoqueta.
    — Je viens avec toi.
    Mathieu soupira de soulagement. Il avait craint que la prédiction de Celma ne les ait rattrapés déjà. Il froissa la chevelure brune et bouclée de son fils.
    — Voyez-vous ça ! Et qui te l’a permis ?
    — S’il te plaît, papa, implora le garçonnet, la figure si grave que Mathieu fléchit.
    — Très bien. Mais à une condition. Tu marches dans mes pas et uniquement dans mes pas. Compris ?
    Petit Pierre hocha la tête. Mathieu reprit sa route. Dès les premiers jours de leur installation, accompagné de Villon, il s’était enfoncé dans les concrétions tumultueuses des grottes de Choranche. Aucune des salles n’avait échappé à leur inspection. Ils n’avaient pas trouvé d’autre issue que celle découverte fortuitement douze ans plus tôt. La seule pièce qu’ils n’avaient pas explorée était recouverte intégralement d’une eau profonde. Ils avaient bien eu l’idée de fabriquer une embarcation légère pour s’y promener, mais de jours en semaines et de mois en années, ils en avaient perdu la nécessité. C’était là que Mathieu avait décidé de se rendre. Somme toute, ils n’avaient pas envisagé la possibilité de contourner le lac. Peut-être existait-il un passage invisible qui permettrait d’atteindre l’autre rive. Bien que raréfié, de l’air circulait. Partout. Laissant supposer l’existence d’une autre sortie.
    Ils marchèrent longtemps en silence, attentifs à l’endroit où ils posaient les pieds, aux fistuleuses de calcaire qui, par endroits, leur piquaient le crâne, s’émerveillant du spectacle qui s’ouvrait dans la fenêtre de lumière que Mathieu brandissait. Si Petit Pierre s’inquiétait de se perdre, Mathieu, lui, avançait sans crainte.
    Lorsqu’ils parvinrent enfin au bord du lac, un silence majestueux les enveloppa, et Petit Pierre sentit son cœur se serrer. Aucune mélodie n’était venue guider leur marche, mais il glissa sa petite main dans celle de son père et leva vers lui un visage inquiet.
    Mathieu lui sourit.
    — Nous y sommes, fiston.
    Petit Pierre déglutit. Il allait enfin savoir. Fixant les eaux émeraude dans la lueur du falot, il chuchota :
    — Elle est là, tu crois ?
    Mathieu fronça les sourcils.
    — Qui ça ?
    — Ben… Mélusine…
    Un frisson glacé s’abattit sur les épaules de Mathieu. Dix années que ce nom-là n’avait pas été prononcé devant lui. Il s’agenouilla devant son fils, furieux qu’on lui en ait parlé.
    — D’où tu tiens ça, toi ?
    Petit Pierre ne se laissa pas impressionner par la souffrance dans ses yeux. Il était bien trop heureux de se libérer enfin du fardeau qu’il portait. Il lui raconta tout. Son cauchemar. Le baiser. Le chant.
    Lorsqu’il eut terminé, Mathieu était si défait que son fils le crut fâché.
    — J’y serais pas allé tout seul, tu sais.
    Mathieu le serra contre lui. Il y avait plusieurs lieues d’ici au Furon. Ce n’était pas la même rivière. Mélusine ne pouvait pas avoir traversé, hurlait sa raison. Mais il connaissait aussi le pouvoir destructeur de la démone. Elle ne lui prendrait pas son fils comme elle lui avait pris Algonde.
    — On s’en va, décida-t-il.
    — Mais…
    — Ne discute pas. On s’en va.
    Il entraîna Petit Pierre par la main. Ils n’avaient pas atteint le tunnel qu’un gigantesque éclat fit vibrer l’air au-dessus d’eux. Ils sursautèrent et se retournèrent de concert. L’eau tremblait d’une vague qui venait presque lécher leurs pieds. Mathieu poussa son fils dans le passage.
    — Cours, hurla-t-il. Cours !
    Mais Petit Pierre était statufié. Un buste serti de longs cheveux couleur châtaigne venait d’émerger de l’onde et, tels qu’en son rêve, de grands yeux tristes les fixaient.
    Un

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