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Elora

Elora

Titel: Elora Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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perversité, mais, à la différence de moi et bien qu’elle prétende le contraire, je sais qu’elle aime ça. Le sang des Borgia est perverti jusqu’à la moelle, pourtant je persiste à croire qu’on peut y remédier. Voilà pourquoi je veux éloigner ma fille. L’approche des Français m’en offre un bon prétexte. Les cardinaux qui leur sont favorables m’aideront, et mon frère, à qui je me suis confiée en captivité, est prêt à m’accueillir.
    — Pourquoi être revenue quand vous pouviez demeurer sous sa protection, là-bas, à Bracciano ?
    — Parce que la forteresse appartient aux Orsini et que je n’y étais pas en sécurité. Ils veulent ma mort et celle de ma fille. À la première occasion, nous aurions toutes deux succombé au poison. Non. Mon seul salut est dans la fuite. C’est pour cela que j’ai besoin de vous. Rodrigo m’a confié le secret de vos pouvoirs. À moi et moi seule.
    Elle revint dans la lumière du candélabre piqué au sol qu’elle avait enflammé à son arrivée et ricana, amère :
    — Il ne me cache rien après ses moments de débauche, croyant en ma dévotion scrupuleuse. Une raison de plus pour me faire rechercher et m’éliminer.
    Elora s’avança jusqu’à elle, lui prit les mains et l’embrassa affectueusement sur la joue.
    — Ne vous inquiétez plus, Julie. Dans quelques jours, vous serez en sécurité avec Laura, je vous le promets.
    — Et Rodrigo ?
    — J’en fais mon affaire.
    Elles se séparèrent sur cet accord.
    Elora quitta la crypte la première, remonta les escaliers et, sans plus attendre, gagna la chapelle Sixtine où tantôt en venant elle avait aperçu le pape.
    Il était temps pour elle de prendre sa revanche.
    *
    — N’as-tu pas entendu les ambassadeurs de Venise et d’Espagne ? Tu seras déposé si tu laisses le Saint-Siège vacant.
    Le pape écarquilla des yeux ronds. Ses malles étaient prêtes et chargées, les chevaux harnachés dans la cour et là, agenouillé dans la chapelle Sixtine, devant l’autel et sous la voûte décorée d’étoiles, il s’était autorisé à prier, non en proie à un quelconque repentir, mais pour donner aux autres l’illusion qu’il y était prêt.
    — Je ne pars plus alors ?
    — Non.
    — Je ne comprends pas, dit-il à Elora, qui venait de s’installer à ses côtés.
    Depuis l’incident dans la crypte du château Saint-Ange, aucune porte ne résistait plus à la damoiselle, les gardes ayant reçu l’ordre de n’intervenir sous aucun prétexte. Elle n’en avait pas abusé. S’était contentée de fondre sur César Borgia et d’ordonner la libération des siens. Khalil, lui, avait été placé sous la protection de Djem. Il se serait bien accommodé d’une vengeance, mais ce n’était pas ce qu’Elora voulait. En fait, personne ne savait véritablement ce qu’Elora voulait.
    Elle joignit ses mains en prière, indifférente aux regards envieux des autres prélats sur eux. Rien n’avait filtré du miracle dont elle était la source. Depuis quelques jours, le seul bruit qui circulait au Vatican était celui, infondé, de sa liaison avec le pape, au point que Lucrèce jubilait. Était-ce une manœuvre de César pour protéger sa sœur de foudres éventuelles ? Elora n’aurait su le dire. Elle n’avait pas revu ce dernier qui, prétextant mille occupations militaires, la fuyait. Qu’importe ! Elle tourna vers le profil lunaire du pape un visage de madone.
    — Si le Christ lui-même prenait ta place, je ne te retiendrais pas, mais ni Julien della Rovere ni aucun des autres cardinaux ne rendrait sa vertu au Vatican. Le pouvoir changerait de mains, certes, mais en quelques mois elles seraient aussi sales que les tiennes.
    La porte d’un confessionnal grinça sur ses gonds. Alexandre VI tourna la tête, suivit du regard le cardinal qui s’éloignait déjà, le front courbé, l’autre qui disparaissait derrière un pilier. Ils se donnaient l’absolution les uns les autres. Tous les crimes de la chrétienté formaient chemise sous leur soutane. Elle avait raison. Il n’en était pas un pour racheter l’autre. La seule personne digne de confiance au regard de Dieu était Savonarole, mais c’était un dangereux fanatique qui, pour ramener la chrétienté aux valeurs de moralité des temps premiers, n’aurait pas hésité à brûler chacun de ses membres jusqu’au dernier. On ne peut davantage espérer des fous que des pervers. Alexandre VI se détendit tout à

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