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Elora

Elora

Titel: Elora Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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moins suffisamment monstrueuse. Elle les héla, d’une voix affermie par son réel bonheur de les revoir, saufs et libres :
    — Ferme la bouche, Briseur, et toi La Malice, écarte tes doigts, je ne voudrais pas recevoir ce poignard que tu caches dans ta manche.
    Ils obtempérèrent sur-le-champ. Un reste d’autorité songea Fanette. Ou d’habitude. Déjà La Malice se reprenait :
    — T’es pas noyée ?
    — Comme tu vois.
    Il se rassit, indifférent à l’arme qu’elle continuait de pointer. D’un os rongé, Briseur désigna le lapin démembré piqué encore au-dessus des braises.
    — T’en veux ?
    Quelque chose sonnait faux dans leur attitude, leurs réactions. Dans leur indifférence à son égard. Elle se campa plus solidement sur ses pieds écartés.
    — Je ne suis pas seule.
    Briseur haussa les épaules. Elle ajouta :
    — Celma est en embuscade au bout du tunnel.
    La Malice sursauta, tourna cette fois vers elle un visage chargé d’espoir.
    — Mathieu ?
    — Nous deux seulement.
    Les deux hommes échangèrent un regard déçu. Ils le seraient plus encore, songea-t-elle, lorsqu’elle leur apprendrait qu’Algonde l’avait vu, toujours inconscient, sous la garde d’Enguerrand de Sassenage. Mais ce n’était pas le moment. Non, vraiment pas.
    Abandonnant son morceau, La Malice se leva et gagna le fond de la salle. Fanette consentit enfin à ranger son arme. Elle s’installa en face de Briseur qui continuait de déchiqueter la viande avec sa voracité habituelle. Un malaise grandissait en elle. Elle ne comprenait pas pourquoi, maintenant qu’elle était désarmée, le colosse ne se jetait pas sur elle pour l’étrangler. Il ne pouvait pas ne pas lui en vouloir. Elle-même se haïssait. Elle avait besoin d’un reproche, d’un coup, d’une injure. Elle les provoqua :
    — C’est moi qui vous ai trahis.
    — Je sais. Celma nous avait prévenus.
    Il secoua la tête.
    — On n’a pas voulu l’écouter.
    Fanette regarda par-dessus son épaule. La devineresse avait rejoint La Malice. De grands gestes de part et d’autre ponctuaient une discussion dans laquelle Fanette imaginait aisément tenir le mauvais rôle. Elle ramena son attention sur Briseur.
    — Comment peux-tu m’avoir pardonné ?
    Le regard s’enflamma.
    — Je peux pas. Mais on est pareils maintenant.
    Le sang afflua aux tempes de Fanette.
    — Comment ça, pareils ?
    — Le prévôt nous a relâchés.
    Il sourit. Elle blêmit. Il la rassura :
    — Calme-toi, c’est pas toi qu’il veut. Il te croit morte.
    Fanette serra les poings.
    — Je ne vous laisserai pas lui livrer Celma. J’ai fait assez de mal comme ça.
    Il émit un petit rire désabusé.
    — Pour sûr que t’en as fait, Fanette. Pour sûr. Mais c’est Mathieu qu’on espérait trouver.
    Elle tressauta, comme piquée par un frelon.
    — Toi ? Toi, son meilleur ami, tu le trahirais ? Je ne peux pas le croire.
    Il darda sur elle ses grands yeux délavés de Normand.
    — C’est pas ce que tu crois. Le prévôt veut pas le pendre. Il a besoin de lui et de nous aussi, rapport à un projet de vengeance contre Hélène de Sassenage. Tu le sais comme moi que Mathieu lui en voulait à cette garce. Pour Algonde.
    L’explication ne convainquit pas Fanette. Elle s’empourpra.
    — Mensonge. On ne peut pas lui faire confiance, Briseur. Regarde, regarde ce qu’il m’a fait en récompense de mes bons services.
    Il ne tiqua pas davantage que tout à l’heure devant sa joue abîmée qu’elle tendait vers lui. Derrière eux, leurs deux compagnons arrivaient, la mine grave. Briseur comprit qu’en quelques mots La Malice avait tout raconté à Celma. Il ramena sur l’ancienne meneuse de bande un visage empreint de tristesse.
    — On n’a pas le choix, Fanette. Et Mathieu non plus s’il veut revoir Petit Pierre.
    *
    À Rome, les rancœurs s’étaient atténuées.
    Aucun des deux adversaires ne pouvait demeurer sur sa position. Il fallait trouver un accord. Le roi dépêcha des émissaires pour combattre les arguments du pape. Pour bien montrer que le temps de l’offensive était terminé, Charles VIII entreprit de visiter les monuments antiques, accompagné de Jacques de Sassenage et de ses fils Louis et François, retrouvés, d’Aymar de Grolée et de bien d’autres familiers. Il ne dressait plus sa superbe, mais une sobre humilité.
     
    Alexandre VI y fut sensible, non qu’il eût décidé de céder, mais lui aussi savait qu’il

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