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En Nos Vertes Années

En Nos Vertes Années

Titel: En Nos Vertes Années Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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l’Aiguillerie ?
    — Pour ne te rien celer.
    — Découvrez le gueux dans la
ruelle. Elle est déserte. Je serai derrière lui, la dague à la main. Ainsi,
quand vous lui ferez face, il ne pourra s’en sauver et mort ou vif, nous le
prendrons.
    — Vif, Miroul, vif ! Je
veux savoir qui l’emploie !
    Miroul parti, je sortis à mon tour,
serrant sous mon bras gauche l’épée enveloppée et me donnant l’air de muser, le
nez en l’air et comme étourdi et badaud. Mais je ne laissais pas, en même
temps, de jeter les yeux de-ci, de-là dans la presse, et crus bien y voir mon
suiveur et, chose étrange, le reconnaître, encore que je ne susse dire où et
quand je l’avais vu.
    Je tirai vers l’Aiguillerie, que je
comptais aborder, non point par la rue du Bayle et le côté de l’église
Saint-Firmin, mais, comme l’avait recommandé Miroul, par la ruelle où donnait
la deuxième issue de la boutique, ruelle tournoyante et fort étroite qu’on
nommait rue du Bombe-Cul, pour la raison, disait la Thomassine, qu’une chaise à
porteurs n’y pouvait faire demi-tour sans que l’un des valets ne toquât de la
fesse contre un des murs.
    Plus je me rapprochais de mon but,
plus les passants se faisaient rares, jusqu’à ce que enfin je me trouvasse
seul, mon mantelet sous le bras et ma dextre sur la poignée de mon épée,
dressant l’oreille et pointant l’ouïe vers mes arrières, mais sans entendre
plus qu’un frôlement, mon gueux devant être chaussé d’alpargates.
    J’étais si fort tendu que, le soleil
aidant, je suais d’abondance quand j’atteignis la rue du Bombe-Cul, et là,
suivant la courbe de la ruelle, je tournai la tête du même côté et juste assez
pour apercevoir du coin de l’œil mon homme, lequel n’était plus qu’à quelques
toises de moi. Je ne sais alors si mon imaginative, ici, m’égara, mais je
sentis, ou crus sentir, qu’il allait me bondir sus, et tout soudain lui faisant
face, je m’écriai d’une voix éclatante et l’air fort sourcilleux :
    — Halte, coquin ! Qu’as-tu
donc à me suivre de mon logis jusqu’ici ?
    Le gueux se brida court et,
s’arrêtant à dix pas de moi, m’envisagea de ses petits yeux noirs, plus niais
que méchants. Quoi fait, il ôta fort civilement la coiffe sale qui couvrait ses
cheveux poussiéreux, et dit :
    — Moussu, avec votre
permission, j’ai reçu commandement de vous occire.
    — Sanguienne ! dis-je,
fort étonné d’être confronté à un assassin si poli, et avec quoi ?
    — Avec ceci, Moussu, dit le
gueux en sortant tout soudain un fort coutelas de ses haillons.
    — Et que penses-tu de
ceci ? dis-je en tirant mon épée du fourreau. N’ai-je pas plus d’allonge
que toi ?
    — Nenni, dit l’homme, sauf
votre excuse, votre épée ne vous servira point. Je n’use point de mon couteau
au corps à corps. Je le lance. Avant que de faire un pas, vous l’aurez reçu
dans les tripes.
    Ce disant, il prit son couteau par
la pointe, comme pour le balancer. Et je ne cèle point qu’ici la sueur me coula
de la tête aux pieds, mais sans cependant que mon trouble paralysât ma langue.
    — Maraud, dis-je, si tu lances
ton couteau, tu ne l’auras plus dans la main. Et mon valet Miroul, qui est
derrière toi, te plantera sa dague dans le dos.
    En quoi, je mentais, car de Miroul,
si désespérément que je le cherchasse de l’œil, je ne voyais pas trace.
Cependant, au nom de mon valet, mon assassin dressa l’oreille, leva le sourcil,
et sans même tourner le col pour s’assurer que je disais vrai, dit :
    — Miroul, n’est-ce pas ce
galapian dont un œil est bleu, l’autre marron ?
    — C’est bien lui.
    — Ha, Moussu ! s’écria
l’homme. Je me disais bien aussi ! Je le connais ! Et vous
aussi ! Vous êtes ce gentilhomme qui, dans les Corbières, me navra, me
captura et pour finir, me sauva de la hart.
    — Espoumel ! m’écriai-je,
infiniment soulagé. Est-ce toi ? Et que fais-tu céans ?
    — Moussu, dit Espoumel,
remettant son couteau dans ses haillons et parlant, me sembla-t-il, avec une
certaine piaffe, je ne vous tue plus : l’honneur me le défend.
    Là-dessus, galopant dans son dos,
arriva Miroul, tout suant et soufflant, la dague à la main.
    — Ha, Moussu ! cria-t-il,
Dieu merci ! Vous êtes sauf ! J’ai dû mettre à la raison un grand
coquin de laquais, lequel me cherchait noise pour l’avoir heurté dans ma hâte.
    — Rengaine, Miroul,
rengaine ! dis-je avec

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