Enterre Mon Coeur à Wounded Knee: Une Histoire Américaine, 1860-1890
Tree, poursuivit-il, resteront dans la prison du fort tant que le commandant estime que ces conditions ne sont pas remplies. »
Lone Wolf répondit le premier : « Tu as déjà rendu nos cœurs bons en ramenant ces prisonniers. Rends-les meilleurs encore en les relâchant aujourd’hui. »
Mais le gouverneur ne voulut rien savoir. « Je ne reviendrai pas sur mes exigences », dit-il. C’est ainsi que le conseil prit fin.
Lone Wolf fut amèrement déçu. Non seulement les exigences des Blancs étaient trop dures, mais les chefs demeuraient prisonniers. « Je veux la paix, dit-il à Thomas Battey, l’instituteur. J’ai beaucoup travaillé pour cela. Washington m’a trompé – n’a pas tenu ses promesses ; et à présent, il ne nous reste plus rien d’autre que la guerre. Je sais que la guerre contre Washington signifie la disparition de mon peuple, mais nous y sommes poussés ; nous préférons mourir que vivre. »
Même Kicking Bird trouva les conditions imposées par le gouverneur injustes. « Mon cœur est comme une pierre ; il ne comporte aucun endroit mou. J’ai pris la main de l’homme blanc, pensant qu’il était mon ami, mais il n’est pas mon ami ; le gouvernement nous a trompés ; Washington est pourri. »
Battey et le nouvel agent, Haworth, comprirent tous deux que le risque d’un bain de sang, voire d’une guerre, était grand si le gouverneur ne faisait pas un geste en libérant Satanta et Big Tree. Ils allèrent donc le voir pour lui expliquer la situation et n’eurent de cesse de le persuader qu’il lui fallait assouplir sa position. Tard dans la nuit, le gouverneur envoya un message à Lone Wolf et aux autres chefs, leur demandant de venir le voir le lendemain matin. Les Kiowas acceptèrent, tout en décidant avant l’aube qu’ils ne voulaient plus de promesses en l’air. Les chefs se présentèrent armés de pied en cap, avec des guerriers placés près de la prison et des mustangs pour les aider à fuir si nécessaire.
Le gouverneur prit bonne note de ces préparatifs. Son discours fut des plus brefs. Il était certain que les Kiowas honoreraient leur part du contrat, dit-il, avant d’annoncer qu’il mettait Satanta et Big Tree en liberté conditionnelle sous contrôle de leur agent. Ainsi, les deux chefs étaient libres. Lone Wolf venait de gagner une autre bataille sans effusion de sang.
À la Lune-où-les-feuilles-tombent, Satanta vint s’installer dans son tipi peint en rouge au sommet duquel s’agitaient des fanions rouges. Il donna sa lance-médecine rouge à son vieil ami White Cowbird en déclarant qu’il ne désirait plus être chef. Tout ce qu’il voulait, c’était être libre et heureux et parcourir les prairies. Mais il tint parole et ne s’éloigna jamais de l’agence, pas plus qu’il ne quitta la réserve à l’automne pour aller chasser le bison dans les Staked Plains, comme le firent les jeunes braves.
À la Lune-où-les-oies-migrent, des Blancs venus du Texas firent un raid sur les troupeaux kiowas et comanches et volèrent deux cents de leur plus beaux mustangs. Les guerriers les poursuivirent, mais ne purent récupérer que quelques bêtes avant qu’ils ne franchissent la Red River.
Peu de temps après, neuf jeunes Kiowas et vingt et un Comanches décidèrent d’aller dans le sud chercher des mustangs pour remplacer ceux qu’on leur avait volés. Afin de ne pas attirer d’ennuis à Satanta et Big Tree en s’emparant de chevaux texans, ils iraient jusqu’au Mexique. Prenant soin de rester à l’écart des fermes, ils parcoururent huit cents kilomètres à bonne allure et traversèrent le Rio Grande entre Eagle Pass et Laredo. Arrivés au Mexique, ils attaquèrent des ranchs et prirent le même nombre de chevaux que les voleurs texans. Mais ils furent pour cela obligés de tuer quelques Mexicains, et même, sur le chemin du retour, deux Texans qui tentaient de les arrêter. Alors, les Tuniques Bleues se lancèrent à leurs trousses, et pendant une course-poursuite non loin de Fort Clark, neuf des jeunes Indiens furent tués, dont Tauankia et Guitan, le fils et le neveu de Lone Wolf.
On était au milieu de l’hiver lorsque les survivants de l’expédition rentrèrent à Fort Sill. Les Kiowas et les Comanches pleurèrent les meilleurs de leurs jeunes braves. Lone Wolf se coupa les cheveux, brûla son tipi, tua ses mustangs et jura que les Texans paieraient la mort de son fils.
Au printemps 1874, dès que l’herbe se mit
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