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Et Dieu donnera la victoire

Et Dieu donnera la victoire

Titel: Et Dieu donnera la victoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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pris le large en emportant de l’eau et des provisions. Que comptes-tu faire ? À mon avis, nous devrions revenir vers la Loire et attendre Falstaff les pieds sous la table.
    – L’armée de Falstaff n’est pas loin, je le sens. Elle existe, tonnerre de sort ! Nous finirons bien par tomber dessus !
    – Voilà que tu te prends à jurer, toi aussi !
    – Mes frères du Paradis me le pardonneront.
    – Fais-leur comprendre que nous n’en pouvons plus, qu’ils se décident à te révéler la bonne direction...
     
    Au soir d’une journée accablante, l’armée a essuyé un gros orage dans les environs de Patay. En quelques minutes, sous des trombes d’eau, la plaine surchauffée s’est mise à exhaler des vapeurs chaudes et des odeurs de pain brûlé sous un ciel en feu d’un bord à l’autre de l’horizon, les roulements du tonnerre se mêlant au crépitement de la pluie. Avec leurs ribaudes, les hommes ont dansé de joie, nus sous le déluge, tournant sur eux-mêmes comme des totons en gueulant de plaisir.
    Le matin, la plaine était transformée en un lac de boue, étrangement silencieuse après le tumulte de la nuit.
    Jeanne a ordonné le boute-selle en se disant que cette journée sera la dernière et que, si l’on ne trouve pas trace des Anglais, il ne restera plus qu’à aller les attendre à Meung ou à Beaugency. On est le 18 juin et cela fait une semaine que l’on tourne en rond.
    Jeanne a laissé à La Hire le soin de conduire l’avant-garde en direction de Lignerolles, pour aller inspecter la troupe qui suit à la distance de quelques lances. « Pourquoi Lignerolles ? » a demandé La Hire. Mystère.
     
    Ils avançaient depuis près d’une heure vers une épaisse ligne de forêt quand, debout sur ses étriers, La Hire s’est écrié :
    – J’entends du bruit, là-bas, au bord de cette rivière !
    – Avançons prudemment, dit Richemont, qui venait de remplacer Gilles à l’avant-garde. C’est peut-être un parti de routiers ou de déserteurs, mais sait-on jamais ?
    Les cavaliers firent avancer leurs chevaux, puis, sur un signe, La Hire arrêta leur marche : il venait de voir surgir d’un fourré un magnifique cerf hérissé de flèches ayant à ses trousses une meute d’hommes hurlant comme pour l’hallali.
    – Des Anglais ! cria La Hire. Mes amis, nous les tenons ! Droit sur eux !
    C’étaient bien des Anglais de la fameuse armée conduite par John Falstaff : deux ou trois mille hommes partis de Paris quelques semaines plus tôt avec un convoi de munitions et de vivres destiné aux garnisons de la Loire, qui, hélas pour eux ! venaient de tomber aux mains des Français. Ce n’était apparemment que l’avant-garde d’une horde composée d’hommes désemparés errant par groupes.
    D’accord avec Talbot, Falstaff avait décidé de prendre la route de Janville, à sept ou huit lieues au nord d’Orléans, où il comptait s’installer derrière des murailles solides, ultime recours, avant un éventuel repli sur la Normandie, contre l’armée de la sorcière.
    Alors que le gros de sa troupe se trouvait à Coinces, dans les parages de Patay, des reconnaissances lui avaient signalé une avant-garde d’une soixantaine de cavaliers s’avançant vers eux et précédant l’armée française. Que faire ? Se ranger en ordre de bataille et attendre ? Se hâter vers Janville à travers cet enfer où risquaient de crever hommes et chevaux ?
    Il tint un rapide conseil. Presque tous ses capitaines étaient pour en découdre, puis, ayant écrasé l’ennemi, aller délivrer les places fortes reprises par les Français. Falstaff n’était pas de cet avis.
    – Il me plairait autant qu’à vous, dit-il, de faire mordre la poussière à la sorcière, mais nous sommes en état d’infériorité et nos hommes comme nos chevaux sont à bout de résistance. Même avec l’appui de Dieu et de saint George je ne suis pas certain d’une victoire. Dès lors, il ne nous resterait qu’à reprendre la mer.
    Talbot était d’avis contraire : il tenait à prendre sa revanche de l’humiliante défaite subie à Orléans. Il fallait marcher sur Beaugency où Richard Guethin, ayant obtenu une capitulation conditionnelle, gardait des forces intactes.
    C’est son avis qui emporta la décision : on allait prendre le chemin de la Loire.
     
    Au moment où les premiers éléments de l’avant-garde française arrivaient en vue des Anglais, Jeanne, prévenue que l’on avait enfin établi le contact, poussa

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