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Excalibur

Excalibur

Titel: Excalibur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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immobile, laissant inconsciemment ma main dans celle d’Olwen, et elle
rit de délice en me voyant contempler cette soudaine lumière. » C’est
la terre d’avant les rois, Seigneur. Tu vas y trouver des amis, et à manger. »
    Je dégageai
mes doigts des siens. « Quel ami pourrait lancer une malédiction sur
Ceinwyn ? »
    Elle s’empara
de nouveau de ma main. « Viens, Seigneur, on y est presque maintenant. »
Elle me tira sur la pente, essayant de me faire courir, mais je ne voulais pas.
J’allai lentement, me souvenant de ce que Taliesin m’avait raconté dans le
brouillard magique dont il avait enveloppé Caer Cadarn ; que Merlin lui
avait ordonné de me sauver, mais que je ne l’en remercierais peut-être pas, et
tandis que j’approchais de ce creux plein de feu, je craignais de découvrir le
sens de ces paroles. Olwen me harcelait, riait de mes craintes et ses yeux
étincelaient du reflet des feux, mais je grimpai vers l’horizon rougeoyant, le cœur
lourd.
    Des lanciers
gardaient l’entrée de la vallée. C’étaient des hommes à l’air sauvage,
emmaillotés dans des fourrures, armés de lances aux hampes mal équarries, aux
fers grossièrement façonnés. Ils ne dirent pas un mot lorsque nous passâmes,
quoique Olwen les saluât joyeusement avant de me faire emprunter un sentier qui
descendait au cœur enfumé de la vallée. Celle-ci recelait un lac tout en
longueur aux berges noires constellées de feux, et près de ceux-ci, de petites
cabanes, parmi des bosquets d’arbres nains. Une armée devait camper là, car il
y avait au moins deux cents foyers.
    « Viens,
Seigneur, dit Olwen en me tirant sur la pente. C’est le passé, et c’est le
futur. C’est là que la boucle du temps se referme. »
    C’est une
vallée des montagnes du Powys, me dis-je. Un endroit caché où un homme
désespéré peut trouver refuge. La boucle du temps n’a rien à voir avec cela, me
rassurai-je, pourtant j’eus un frisson d’appréhension lorsque Olwen me fit descendre
jusqu’aux cabanes, au bord du lac où l’armée campait. J’avais cru que leurs
habitants dormiraient, car nous étions au cœur de la nuit, mais tandis que nous
marchions entre le lac et les huttes, une foule d’hommes et de femmes en sortit
pour nous regarder passer. Ils étaient bien étranges. Certains riaient sans
raison, d’autres baragouinaient des choses dépourvues de sens, ou étaient
secoués de mouvements convulsifs. Je vis des cous goitreux, des yeux aveugles, des
becs-de-lièvre, des toisons emmêlées, et des membres tordus. « Qui sont
ces gens ? demandai-je à Olwen.
    — L’armée
des fous, Seigneur. »
    Je crachai
vers le lac pour conjurer le mauvais sort. Ils n’étaient pas tous déments ou
estropiés, ces pauvres hères, car certains tenaient des lances et quelques-uns,
je le remarquai, avaient des boucliers recouverts de peau humaine, noircis de
sang humain, les boucliers des Bloodshields vaincus de Diwrnach. D’autres
portaient l’aigle du Powys, et un homme arborait même le renard de la Silurie,
emblème qui n’avait pas été brandi dans une bataille depuis le temps de
Gundleus. Ces hommes, tout comme l’armée de Mordred, étaient les déchets de la
Bretagne : des hommes vaincus, des hommes sans terre, des hommes qui n’avaient
rien à perdre et tout à gagner. La vallée empestait les ordures humaines. Elle
me rappela l’île des Morts, cet endroit où la Dumnonie envoyait ses fous
furieux, et où j’étais allé, un jour, délivrer Nimue. Ces gens avaient le même
air sauvage, dégageaient la même impression inquiétante qu’à tout moment, ils
pouvaient vous sauter à la figure et vous griffer sans raison apparente.
    « Comment
faites-vous pour les nourrir ? demandai-je.
    — Les
soldats, les vrais soldats, vont quérir la nourriture. Nous mangeons beaucoup
de mouton. J’aime bien le mouton. Nous voilà arrivés, Seigneur. C’est la fin du
voyage ! » Et sur ces mots joyeux, elle dégagea sa main de la mienne
et partit en gambadant. Nous étions arrivés à l’extrémité du lac et, devant
moi, s’élevait une futaie qui poussait à l’abri d’une haute falaise rocheuse.
    Une douzaine
de feux brûlaient sous les arbres dont les troncs, alignés sur deux rangs,
donnaient à ce bosquet l’apparence d’une vaste salle ; au fond, deux
pierres levées grises m’évoquèrent celles qu’érigeaient les anciens, sans que
je puisse dire s’il s’agissait de vénérables

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