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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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privait pas d'un postérieur joliment arrondi, d'une poitrine qui, pour être menue, demeurait charmante. Si sa mise avait paru moins pauvre, les regards des hommes auraient eu du mal à se détacher d'elle. Enfin, ceux des hommes qui levaient le nez sur les beautés des faubourgs.
    —    Vous savez, expliqua finalement le commerçant avec condescendance, vous habitez une très jolie ville. Un jour peut-être, vous verrez plus de personnes embauchées dans les hôtels et les restaurants que dans les manufactures de chaussures.
    —    Il n'y aura jamais assez de clients pour les occuper.
    —    Ne croyez pas cela. Ces bicyclistes viennent passer leur semaine de vacances à Québec. Si de plus en plus de gens font la même chose, cela pourra représenter beaucoup de touristes... Mais comme nous ne sommes pas nous-mêmes en congé, reprenons notre correspondance.
    En retrouvant sa chaise devant la machine à écrire, Marie cacha son scepticisme sous un sourire amusé. Comme elle ne pouvait espérer, dans un futur prévisible, profiter elle-même de vacances, l'idée qu'une proportion significative de ses contemporains jouisse un jour d'un semblable privilège lui paraissait absurde.
    Une demi-heure plus tard, alors que Thomas Picard signait les quelques lettres qu'elle avait écrites pour lui, il déclara :
    —    Vous pouvez rentrer. Je vous donne un petit congé. En passant, pouvez-vous dire à mon frère de venir me voir à mon bureau ?
    —    Oui, certainement.
    Après avoir placé une housse de tissu sur le clavigraphe, Marie traversa tout le rayon des vêtements féminins pour transmettre le message.
    —    Vous allez me remplacer derrière le comptoir ? demanda Alfred.
    —    Le patron vient de me dire de rentrer à la maison. Mais si vous insistez...
    La jeune fille posait sur lui des yeux rieurs, convaincue qu'elle venait de perdre les quinze petites minutes de vacances que son employeur lui accordait.
    —    Ah ! Mais si le patron a dit que vous pouviez rentrer, rentrez. Je m'en voudrais de vous retenir. Je vais confier cette caisse enregistreuse à quelqu'un d'autre, ou alors le grand homme m'attendra. Bonne soirée.
    —    ... Bonne soirée, monsieur Alfred.
    Finalement, le chef de rayon se montra au bureau de son frère largement après six heures. Celui-ci leva la tête de son grand registre pour demander:
    —    Tu avais prévu de faire quelque chose, dimanche prochain ?
    —    ... Je ne sais trop... Une sortie à la campagne...
    —    Ne prend pas cet air désemparé, je n'ai nulle envie de rassembler notre minuscule tribu autour d'une volaille. Je voulais juste te prier de sortir mes enfants.
    Alfred retrouva son sourire habituel, puis s'affala sur la chaise placée devant le grand bureau du patron.
    —Je pense pouvoir jouer de façon passable le rôle de l'oncle gâteau pendant un moment, une heure ou deux. Mais toute une journée...
    —    D'abord,, leur préceptrice sera là : tu ne devrais pas risquer de les voir se mettre à hurler dans un endroit public, ou jeter des aliments dans le cou des passants. Je leur ai promis de les conduire sur la terrasse Dufferin dimanche. Tu as certainement vu la publicité pour le spectacle africain. Mais notre ami Wilfrid tient à me voir à Ottawa.
    —    Il s'agit de ton ami. Moi, je suis simplement l'un de ses nombreux électeurs du comté de Québec-Est... Soit, consentit-il après une pause, je veux bien escorter ta jeune beauté afin d'éviter qu'un Nègre de la Caroline ne se sauve avec elle en travers de son épaule. Tu peux même leur annoncer que je les prendrai sur le perron de l'église après la messe, pour les emmener manger au Château.
    Finalement, l'expédition pouvait devenir fort agréable. Cela le changerait certainement de la poule bouillie mangée en tête-à-tête avec madame veuve Théodule Picard.
    —    Merci. Tu m'évites de faire face pendant une semaine à deux petits visages rendus maussades par la déception. Ne t'inquiète pas, les enfants deviennent des experts des usages à table. J'en suis venu à me passer le plus souvent de mon verre de bière avec le repas, car cela fait un peu trop « commun ». Ce serait une pitié s'ils en venaient à avoir honte de leur père.
    —    Tout cela à cause de la couventine ?
    —    Elle paraît convaincue que mes rejetons se hisseront au sommet de l'échelle sociale de Québec. Alors elle les prépare à briller dans les

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