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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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vous vous révélez si habile avec les enfants de Thomas, conclut son compagnon. À moins que ce ne soit votre nature...
    Tous les hommes et toutes les femmes partageaient l'intime conviction que le sexe faible naissait avec une compétence innée pour le soin des enfants, et le sexe fort avec une inclination pour les affaires et la politique.
    —    Bon, prononça Alfred d'un ton résolu, maintenant je me lance à la recherche de nos deux explorateurs.
    L'homme se leva, fit tomber de ses mains les brindilles accrochées à son pantalon et partit vers l'extrémité ouest de la terrasse. Songeuse, Elisabeth resta à sa place. Au fond, le plus étonnant jusque-là avait été que personne ne l'interroge vraiment sur son passé. Sans doute que la mère supérieure avait donné à Thomas Picard tous les renseignements susceptibles de le rassurer.
    Plusieurs minutes plus tard, l'homme revenait avec les deux enfants en remorque. La préceptrice les rejoignit, tendant sa veste à Alfred après l'avoir secouée de son mieux.
    —Je me suis entendu avec ces jeunes personnes pour leur offrir une glace au café du Château, expliqua-t-il en enfilant le vêtement. Vous les accompagnerez si vous voulez mais moi je me réjouis à l'avance de boire un grand verre de thé glacé, compte tenu de la chaleur ambiante.
    Encore une fois, un maître d'hôtel leur dénicha une place près des fenêtres. La boisson fraîche rasséréna les adultes, la crème glacée en fit autant des enfants. Quand Edouard exprima le désir d'assister à la représentation suivante du cake-walk, il se vit opposer une fin de non-recevoir par Elisabeth. Pareil intérêt lui paraissait d'ailleurs témoigner d'une concupiscence aussi suspecte que précoce.
    À la fin, Alfred Picard reconduisit le trio jusqu'au fiacre stationné près de l'hôtel. La voix pâteuse de Napoléon Grosjean lui indiqua que les quelques sous offerts pour son dîner s'étaient transformés en une succession de bières Boswell. Heureusement, le cheval connaissait son chemin et il pouvait regagner la maison sans la moindre intervention humaine.
    Après que la jeune femme et les enfants eurent pris place dans la voiture, Alfred déclara :
    —    Je vais vous abandonner ici. Je suis certain que vos protégés voudront se reposer un peu, après tout ce temps passé au soleil.
    —    Alors c'est le moment de vous dire merci, dit la préceptrice en inclinant la tête. Les enfants, vous n'avez rien à dire à votre oncle ?
    Tous les deux prononcèrent un «Merci, oncle Alfred» presque à l'unisson. L'homme referma la portière et fit signe au cocher de se mettre en route. Quelques minutes plus tard, cette fois debout près de la balustrade de fonte afin de mieux profiter de la fraîcheur venue du fleuve, plus près du kiosque où se trouvaient juchés les musiciens noirs, l'homme apprécia une nouvelle fois les sonorités qui lui paraissaient venir directement de la jungle africaine.
    Le tourisme n'amenait pas que des familles prospères dans la ville de Québec. Des hommes de condition relativement modeste, désireux de voir du pays, se joignaient au flot des visiteurs. Certains d'entre eux partageaient avec les jeunes gens venus des campagnes chercher un emploi à la ville les quartiers spartiates offerts par le YMCA. L'institution charitable, vouée à offrir un milieu de vie moral à ces migrants, occupait un vaste édifice sur la rue Saint-Jean, tout près de la porte du même nom, à l'extérieur des murs. Le marché Montcalm se trouvait juste en face. Certains jours de la semaine, les agriculteurs y proposaient leurs victuailles.
    En plus de chambres minuscules sous les combles et d'une cafétéria, le «Y», comme on le désignait communément, offrait aussi une multitude de services de loisirs tant aux hommes de passage qu'aux citadins. Alfred Picard venait y passer quelques heures régulièrement afin de se livrer à divers exercices physiques dans le grand gymnase occupant tout l'arrière du rez-de-chaussée. A l'avant, quelques boutiques fournissaient un revenu locatif aux promoteurs de l'œuvre.
    Après avoir laissé son chapeau de paille, sa veste et sa cravate dans un casier du vestiaire, il déboutonna à moitié sa chemise, roula ses manches sur ses bras. Bien sûr, mieux aurait valu pour lui retourner à la maison pour revêtir une tenue plus adéquate, mais le risque était trop grand que Madame veuve Théodule Picard arrive à le retenir auprès d'elle. De

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