Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
Vom Netzwerk:
manquait.
    —    Ne bouge pas, j'apporte le médicament.
    La vieille dame se leva péniblement, grimaça à cause de ses rhumatismes sévères, revint avec le verre.
    —    C'est pour dormir, précisa-t-elle.
    —Je sais. Hier soir, j'étais là...
    L'homme avala le contenu du verre, reposa la tête sur l'oreiller en laissant échapper un soupir douloureux.
    —    Tu souhaites manger un peu ?
    —    Certainement pas aussi longtemps que le moindre mouvement de mes mâchoires me fera un mal de chien dans tout le corps.
    —    Tu n'as pas vraiment fait une chute dans la Côte-à-Coton ?
    —    Si on te le demande, réponds que je l'ai descendue tête première, du haut de la falaise jusqu'en bas.
    Un long silence embarrassé succéda à ces paroles. Alfred ferma les yeux, désireux de dormir encore. Puis, après un moment, sa mère dit à côté de lui :
    —    Alfred... Alfred, si jamais tu as des ennuis...
    Il ouvrit de nouveau les yeux, intrigué, aperçu le vieux visage tout plissé près du sien.
    —    ... Tu n'auras qu'à regarder ici. C'est pour les coups durs.
    Du bout de sa canne, elle frappait sur l'un des madriers du plancher. L'homme referma les yeux pour retrouver son sommeil hébété.
    Vers midi, Thomas Picard revenait enfin dans son commerce, après le long trajet dans un wagon de première classe. Comme à chacune de ses absences, les dossiers accumulés sur son bureau l'obligeaient à se plonger dans ses affaires sans aucune transition. Heureusement, le repas avalé dans le train lui permettrait de travailler sans discontinuer jusqu'à six heures.
    Au moment où il complétait une longue addition, trois coups discrets contre le cadre de la porte laissée ouverte le forcèrent à relever la tête de son grand registre.
    —    Oh ! Mademoiselle Buteau, qu'est-ce qui vous amène ?
    —    Votre frère n'est pas rentré au travail ce matin...
    —    Ce n'est pas une nouveauté, n'est-ce pas ?
    L'agacement pointait dans sa voix. Que son frère néglige
    parfois son travail, surtout les lundis, ne justifiait certainement pas qu'on lui fasse négliger le sien.
    —    Une dame est venue en matinée pour vous dire qu'il ne viendrait pas de la semaine.
    —    Une dame ? Ma mère ?
    —    Non, pas votre mère, je l'aurais reconnue. Elle boitait fortement, précisa Marie, désolée de ne pas s'être informée de l'identité de la visiteuse.
    —    Gertrude, sans doute.
    Devant les yeux interrogateurs de la jeune femme, il expliqua :
    —    C'est la servante qui s'occupe de la maison... Elle ne vous a pas dit pourquoi Alfred déserterait son poste aussi
    longtemps ?
    —    Elle a évoqué un accident.
    Le commerçant demeura songeur un moment, puis laissa échapper un long soupir, dépité par le manque de sérieux de son aîné.
    —    Etes-vous en mesure de vous éloigner du comptoir de votre rayon sans exposer le commerce à la faillite ?
    —    ... Je suppose que oui, répondit-elle dans un sourire. Nous sommes tout de même une demi-douzaine à savoir comment faire fonctionner une caisse enregistreuse.
    —    Tant mieux. Dans ce cas, allez aux nouvelles. Vous savez où habite ma mère ?
    —    Oui, rue Saint-Dominique.
    Madame Picard avait occupé la même adresse pendant quarante ans, aussi personne dans Saint-Roch ne pouvait ignorer cette information.
    —    Faites une petite visite au blessé, et revenez me dire exactement de quoi il retourne.
    Sans transition, Thomas se replongea dans son registre. Marie demeura un moment interdite, puis murmura un «Oui, Monsieur» discret.
    Quelques minutes plus tard, elle marchait dans la rue Saint-Joseph, parmi les badauds qui se livraient au lèche-vitrine. La porte de la vieille maison de la rue Saint-Dominique s'ornait d'un ancien heurtoir de bronze. Après l'avoir agité deux fois, elle attendit, intimidée.
    —    Oui, que voulez-vous ?
    La boiteuse venue un peu plus tôt dans la journée au magasin avait passé la tête dans l'embrasure de la porte, peu accueillante.
    —    Monsieur Picard m'a demandé de venir m'enquérir de l'état de son frère. Il s'inquiète...
    —    Qu'est-ce que c'est, Gertrude ?
    La voix éraillée venait de l'intérieur de la maison, impatiente.
    —    Quelqu'un du magasin, Madame. Monsieur Thomas désire des nouvelles.
    —    Fais-la entrer.
    Un instant plus tard, Marie pénétrait dans le vieux salon démodé, alors que la

Weitere Kostenlose Bücher