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Favorites et dames de coeur

Favorites et dames de coeur

Titel: Favorites et dames de coeur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pascal Arnoux
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d’amour – pour évincer la favorite de son fils. À sa demande, Marguerite d’Alençon évoqua les charmes d’Anne dans une lettre à son frère prisonnier et sevré : le roi sollicita des renseignements de leur mère. Anne de Pisseleu fut paradoxalement servie par Françoise de Foix, qui commit l’erreur de surestimer l’amour que lui portait le roi, et ne vint pas à Bordeaux lors de son retour de captivité (17 mars 1526).
    Ce jour-là, somptueusement parée, Anne s’inclina devant le souverain et lui récita un poème de bienvenue circonstancié. François I er avait hâte de rattraper le temps perdu et sa favorite était absente. Il déshabilla la jeune fille d’un œil connaisseur, la trouva à son goût et se dit que ses dix-huit ans le changeraient agréablement des trente-deux de Françoise ; le soir même, ou peu de jours après, il la mit dans son lit. Décidément peu farouche, la nouvelle venue se prêta à toutes les fantaisies royales. Et lorsque Françoise survint quelques semaines après, elle ne put que constater la véracité du proverbe : « Qui va à la chasse perd sa place. » Les résultats de l’opération « séduction » dépassaient donc toutes les espérances de la reine mère, mais Anne échappa à son influence : elle n’eut pas besoin de Louise pour éliminer sa rivale, même si la bataille dura deux ans. Françoise finit par exaspérer le roi quand elle lui écrivit un long poème où, disait-elle, « Par doux regards et façon assurée, / Crêpés cheveux ont pris votre pensée », avant d’ironiser sur les prétendus charmes des blondes à la peau claire. N’acceptant pas de passer au second plan, elle préféra quitter la cour. Anne eut désormais le champ libre (1528). Louise de Savoie s’était débarrassée de Françoise pour frayer le chemin à une plus redoutable manœuvrière, « indéboulonnable » même, si nous osons ce néologisme, car Anne conserva son empire sur François I er jusqu’à la mort de ce dernier.
    Amour ou intérêt ?
    Anne aima-t-elle le roi ? À dire vrai, non. Elle préféra l’argent et surtout le pouvoir : pour l’atteindre, puis en jouir, enfin le conserver, elle utilisa toutes les ressources de sa beauté et de son intelligence. Elle réussit d’abord à conserver l’estime de l’autoritaire Louise de Savoie, lui cachant la véritable nature de ses rapports avec le roi ; la reine mère n’eut pas toléré l’intrusion d’une nouvelle favorite entre son fils et elle. Mais Anne se méfia de la perspicace Marguerite d’Alençon qui pouvait freiner son influence : elle encouragea son mariage avec Henri d’Albret, roi de Navarre, façon élégante de se débarrasser d’une gêneuse ; Marguerite serait moins à craindre aux pieds des Pyrénées qu’à Paris (1527).
    Très instruite, Anne appartint à la « petite bande » de François I er . Elle protégea les artistes avec une grande maturité de goût et Clément Marot, qui citait tous les puissants du jour, lui rendit ainsi hommage (1526) :
    Dix et huit ans je vous donne,
Belle et bonne,
Mais à votre sens rassis,
Trente-cinq ou trente-six
J’en ordonne.
    Un seul artiste, mais le plus talentueux de tous, ne se laissa jamais impressionner par Anne de Pisseleu : Benvenuto Cellini. Une querelle l’opposa à son confrère le Primatice, protégé de la favorite. Celle-ci le défendit, mais Cellini avait l’appui de François I er , qui lui avait commandé plusieurs œuvres pour embellir le château de Fontainebleau : « J’ai enlevé à l’Italie l’artiste le plus grand et le plus universel qui ait jamais existé  », dit le roi. Anne ne manquait hélas pas de défauts et avait notamment la rancune tenace : en dépit de la protection royale, Cellini dut quitter la France et retourner en Italie.
    Âpre au gain, vénale jusqu’à la trahison, Anne afficha un sens du népotisme qui resta fameux ; elle fit profiter sa parentèle des largesses royales : un oncle maternel et trois de ses frères devinrent évêques et abbés commendataires, deux de ses sœurs finirent abbesses. Ces proches eussent obtenus de toute façon ces avantages grâce à leur origine, mais Anne insista auprès du roi pour accélérer les choses. Elle ne s’oublia pas au passage et passa pour coûter plus cher que Françoise de Châteaubriant, qui avait pourtant atteint des sommets : coquette et dépensière, Anne adorait porter des robes de drap d’or frisé et fourrées

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