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Favorites et dames de coeur

Favorites et dames de coeur

Titel: Favorites et dames de coeur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pascal Arnoux
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enfants Montchevreuil. La marquise lui proposa le poste par l’intermédiaire d’une amie commune, Bonne d’Heudicourt. Françoise accepta à condition que le roi l’ordonnât, puisqu’il s’agissait de ses enfants. Sa Majesté daigna agréer le choix de sa favorite, qui loua alors une maison sous un prête-nom (janvier 1669). Deux nourrices et une servante furent embauchées avant la naissance 172 . En 1670, une autre maison abrita le futur duc du Maine, obligeant Françoise à de continuelles allées et venues, de son domicile à ces crèches : « La gouvernante devait les surveiller en toutes choses, mais non pas vivre avec eux  », raconta-t-elle. Elle avait caché cette occupation à ses amis. Françoise pria même Mme d’Heudicourt de lui confier sa petite fille pour leur prouver qu’elle gagnait sa vie comme préceptrice et pour ne plus se dissimuler (fin 1671) ; la fillette servit de compagne de jeu aux premiers bâtards du roi et de Mme de Montespan.
    L’été 1672 réunit les enfants rue de Vaugirard, dans une maison discrète, plus luxueuse, avec un grand jardin, bordant la campagne. Françoise y logea et bénéficia de meilleures conditions : vêtue « comme une personne qui passe sa vie avec des personnes de qualité 173  », elle avait un carrosse et des chevaux à sa disposition. Elle emmena les bâtards à Saint-Germain-en-Laye. Le secret conservait son opacité : interrogée par le roi, la nourrice croyait que Françoise était la mère de ces enfants, le père devant être « quelque duc ou quelque président au parlement » (23 décembre 1672). Louis XIV alla plusieurs fois voir ses enfants incognito à Vaugirard en 1673. Il appréciait la distinction, l’aimable conversation, l’esprit maternel de Mme Scarron ; sensible à sa beauté, il en eut bien fait sa maîtresse, si elle n’avait coupé court avec déférence à ses velléités : « Le maître vient quelquefois chez moi et s’en retourne, désespéré, mais non rebuté. » Prudente réserve, mais Mme de Montespan régnait toujours sur les sens du roi ; elle aurait chassé Françoise en cas d’amours ancillaires.
    Le roi fut touché du dévouement de la gouvernante : « Elle sait bien aimer. Il y aurait du plaisir à être bien aimé d’elle. » Il lui manifesta sa gratitude lorsqu’il légitima ses bâtards : elle s’installa à la cour avec eux, vit sa pension tripler de 2 000 à 6 000 livres et reçut une gratification de 100 000 livres (janvier 1674). À la fin de l’année, le roi lui octroya une seconde prime, d’un montant analogue. Françoise acquit alors le château et la terre de Maintenon 174 (27 décembre 1674), que le roi érigea en marquisat. Quoique certains courtisans eussent ricané de la promotion de « Mme   de Maintenant  », celle-ci avait accompli une fulgurante ascension sociale.
    Rivalité de marquises
    Avant même que d’être titrée, Françoise avait déjà essuyé l’humeur de la favorite du roi pour des motifs pédagogiques. Mme de Montespan ne s’occupait guère de ses enfants, qu’elle aimait à sa manière en tolérant tous leurs caprices. Son attitude désinvolte ruinait le patient travail de leur gouvernante et celle-ci le lui représenta respectueusement. Outrée qu’une « domestique » osât lui donner tort, Mme de Montespan réprimanda ses plaintes. L’héritière des Mortemart se plut à humilier son ancienne protégée, lui rappelant sa condition subalterne. Selon Mme de Sévigné, la « belle amitié » des deux femmes était devenue une « véritable aversion ».
    Françoise dut supporter cette situation délicate sans broncher. Elle n’osait pas rapporter au roi les scènes qui l’opposaient à la favorite, « parce qu ’ elle ne me le pardonnerait jamais ; et […] ce que je dois à Mme   de Montespan ne me peut permettre de parler contre elle 175  ». Athénaïs n’eut pas ce scrupule : dépitée que le roi se plût à converser avec la gouvernante, elle n’hésita pas à la desservir dans son esprit. Elle échafauda même de s’en débarrasser en la mariant au duc de Villars-Brancas ; flatteuse a priori , l’alliance vaudrait le tabouret à Mme de Maintenon. Mais celle-ci, horrifiée par le promis, vieux, bossu, deux fois veuf, « assez malhonnête et fort gueux », refusa ce cadeau empoisonné.
    Louis XIV arbitra les deux femmes en pleine dispute, un jour où il survint à l’improviste. Priée de s’expliquer,

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