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Favorites et dames de coeur

Favorites et dames de coeur

Titel: Favorites et dames de coeur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pascal Arnoux
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son mari.
    Le loup dans la bergerie
    Encore célibataire à vingt-six ans, chose rare dans son milieu, Pauline-Félicité parut à la cour au printemps 1738, invitée par sa sœur aînée Louise-Julie de Mailly. La nouvelle venue ne fit pas très bonne impression : on lui trouva la taille « gigantesque  », la voix rude, le regard un peu trop hardi. Un contemporain plus critique – ou plus méchant – la dépeignit ainsi : « Visage de grenadier, col de grue, odeur de singe. » Mais derrière cette apparence rébarbative, elle ne manquait pas d’esprit. Cet aspect de sa personnalité charma Louis XV, quand Pauline-Félicité lui fut officiellement présentée (22 septembre 1738). De fil en aiguille, il la convia aux soupers des petits appartements. Il accepta d’en faire sa maîtresse, à la condition qu’elle se mariât. Ami du cardinal Fleury, l’archevêque de Paris avait un neveu, M. de Vintimille, comte du Luc, qui ferait un époux des plus convenables. Les Mailly étant pauvres, un « emprunt » de 200 000 livres au Trésor paya les frais et la dot de Pauline. Le roi lesta celle-ci d’une pension de 6 000 livres et lui promit, en outre, une charge de dame d’honneur de la future dauphine ; elle logerait ainsi au château. Fleury ne vit pas cette combinaison d’un bon œil. Le cardinal eut en effet préféré une alliance plus rentable pour M. de Vintimille, et surtout moins préjudiciable aux finances de l’État. Habile diplomate, Mlle de Charolais 187 se chargea de le convaincre, et y parvint.
    Louise-Julie et Mlle de Charolais se repentirent bien vite de leur bonté : une fois dans le lit du roi, l’ingrate Pauline les écarta de son chemin. La première perdit sa place privilégiée et, à trop jouer les entremetteuses, la seconde fut éloignée de la cour (mars 1740).
    Une femme d’influence
    Témoignant une faveur rare à sa nouvelle favorite, Louis XV lui offrit pour ses étrennes une belle boîte en ivoire incrustée de diamants (1 er janvier 1740) ; sa sœur n’avait jamais reçu un aussi beau cadeau durant les six années de sa liaison. Hormis ce cadeau, rien ne transpira des rapports des deux amants ; Pauline logeait chez la comtesse de Toulouse, dans l’appartement de feu Mme de Montespan ; un escalier secret le reliait aux petits cabinets du roi. L’ambitieuse favorite ne se contenta pas de la vie de cour : elle obtint des gouvernements provinciaux pour ses amis et se mêla de politique étrangère.
    Sa grande idée fut de pousser le roi à intervenir dans la succession de l’empire germanique après le décès de son titulaire, Charles VI de Habsbourg (octobre 1740). Ce trône étant électif, la France devait donc soutenir un candidat hostile aux Habsbourg, en l’occurrence Charles-Albert, électeur de Bavière. Désigné pour cette mission, le maréchal de Belle-Isle partit pour Francfort. L’affaire se compliquait avec l’héritage personnel de Charles VI: faute de descendance mâle, il avait dévolu ses domaines à sa fille Marie-Thérèse, par la pragmatique sanction du 10 avril 1713. Ce texte approuvé par les principales puissances européennes (1725 à 1738), dont la France, était contesté par d’autres 188 . Sauf l’élection impériale, Louis XV et Fleury ne voulaient pas intervenir plus avant dans la question d’Allemagne. Mais Belle-Isle excéda ses pouvoirs : fort du soutien de l’opinion en faveur d’une intervention française, il signa une alliance avec le roi de Prusse Frédéric II, afin d’imposer le candidat bavarois, au besoin par les armes (7 juin 1741). Cynique et dénué de scrupules 189 , Frédéric II guignait la Silésie autrichienne, pourtant indivise depuis 1713 : il obtint de la France la garantie de la conserver après conquête. Belle-Isle, qui appartenait au camp antiautrichien de la cour, ne s’arrêta pas à cette contradiction. Mais ce manquement à la parole donnée exaspéra Fleury : furieux contre l’ambassadeur, il démissionna, prétextant sa fatigue et ses quatre-vingt-huit ans, laissant le roi désemparé (juin 1741). Pour une fois de bon conseil, Mme de Vintimille suggéra à Louis XV le rappel du vieux prélat, quitte à l’amadouer. Le roi nomma son neveu, le duc de Fleury, premier gentilhomme de la Chambre. Influencé par la favorite, Louis penchait pour l’intervention. Le cardinal se rallia à contrecœur à la guerre, après un dramatique conseil de neuf heures, où Belle-Isle

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