FBI

le FBI entend exporter ses méthodes et jeter les bases d’une police mondiale. Ses premières têtes de pont se construisent à l’Est, sous prétexte de lutter contre le crime organisé et le trafic de drogue. Le Bureau a ouvert un « Centre régional » à Bucarest avec la participation de l’Albanie, de la Bulgarie, de la Bosnie, de la Croatie, de la Macédoine, de la Hongrie et de la Roumanie. À Budapest, le FBI annonce la création d’un bureau permanent pour lutter, en liaison avec les Hongrois, contre les gangs » installés dans le pays, et l’ouverture d’une école de formation des agents sur le modèle de l’Académie de Quantico. La Thaïlande a droit elle aussi à son Quantico, tandis que les représentants du FBI à l’étranger (Legal Attaché, ou Legat) voient leur rôle et leur champ d’action considérablement élargis.
    Même Edgar Hoover, dans ses rêves les plus fous, ne pensait pas que sa créature pourrait un jour développer des ambitions planétaires. En attendant que le rêve – ou le cauchemar – devienne réalité, on s’arrêtera sur une phrase prononcée par tous nos témoins dès leur plus tendre enfance, et qui aurait pu servir de titre à ce livre : « Quand je serai grand, je serai Special Agent … »
    I- Voir le glossaire des abréviations et acronymes en fin de volume, p. 780.

I
     
    Copyright FBI
     
    (1908-1972)
     

I
     
    Jeunesse (1908-1940)
     
    Où l’on s’aperçoit qu’au FBI, tout est affaire de décor et d’image – Où le lecteur fait la connaissance du jeune J. Edgar Hoover – Où l’on voit J. Edgar Hoover élaborer une stratégie de communication lors de l’affaire Lindbergh – Quand les agents jouent les tueurs de gangsters – Gare à celui qui fait de l’ombre à J. Edgar ! – Le bébé de J. Edgar Hoover et de Clyde Tolson – Les débuts de la lutte anti-nazie – Où l’on voit J. Edgar Hoover manquer à sa parole, pour la plus grande joie de la Mafia.
     
    Hilton Head, juin 2008 : Cartha « Deke » DeLoach
     
    Si le dessinateur de Dick Tracy ne s’est pas inspiré de sa dégaine pour croquer ses agents du FBI, il a eu tort. Il n’est que de le voir franchir les portes du Country Club de Hilton Head, un des endroits les3 plus sélects de Caroline du Sud, pour mesurer l’épaisseur de l’étoffe des héros qui ont fait le FBI au siècle dernier. Avec son costume sombre, sa chemise blanche et sa cravate sage, le grand vieillard n’est pas concerné par la seule tolérance vestimentaire estivale du Grill, l’absence de veste.
    Les serveurs l’accueillent avec déférence et le conduisent à sa table, au centre de la grande salle à manger. Par les baies ouvertes, on aperçoit un bout de marais à deux pas d’un green impeccable. Avant d’entamer son repas, il baisse la tête, ferme les yeux, croise les doigts et, d’une voix traînante mais ferme, convie ses hôtes à se recueillir dans une courte prière d’action de grâces. On l’imagine, trente ans plus tôt, à la tête d’une tablée de sept enfants, courbant l’échine devant le Seigneur après avoir tenu tête au plus violent des milieux, celui des politiciens de Washington.
    Il y a en Cartha DeLoach quelque chose de J. Edgar Hoover. Non qu’il lui voue un culte quelconque (on le sent hérissé par l’ego surdimensionné de son ancien directeur), mais, le temps aidant, il est le seul survivant de l’âge d’or du Bureau, où tout ou presque était permis. J. Edgar Hoover semblait être l’homme le plus puissant de l’Empire, alors qu’il n’était qu’un bureaucrate cramponné à un trône devenu trop grand pour lui. Numéro trois du Bureau pendant plus d’une décennie, Deke est le dernier témoin. Il a vécu les événements les plus terribles des années 1960 : les trois grands assassinats politiques, ceux du président Kennedy, de son frère Bobby et de Martin Luther King, les guerres secrètes contre le Ku Klux Klan et « Cointelpro », la plus redoutable des opérations de déstabilisation de la société civile américaine.
    Comment résoudre le mystère Hoover ? Tous les agents et anciens agents du FBI s’accordent : il faut frapper à la porte de Cartha DeLoach, dit « Deke ». C’est le dernier fils spirituel de Hoover encore en vie trente-six ans après la disparition de celui-ci. Il est le dernier détenteur des secrets les plus sensibles d’une période cruciale de l’histoire du FBI et des États-Unis. Encore