FBI

droits civiques…
    Pas question non plus de parler de criminalité organisée ou de Mafia. Le 28 août 1970, l’agent du FBI chargé de suivre la série au jour le jour reçoit l’ordre écrit d’informer les producteurs que, « désormais, dans les scripts, plus aucune référence ne doit être faite à la Cosa Nostra ». Il ne faudrait pas voir, derrière ce refus, une preuve de plus de la coupable indifférence de Hoover envers un phénomène qu’il ne peut pourtant pas ignorer. Une autre raison peut l’expliquer : un groupe de pression italo-américain, l’American Italian Civil Right League, menace de boycotter les voitures Ford (principal sponsor de FBI ) si la série parle de la Cosa Nostra !
    « Le FBI ne tolérera jamais sur le plateau des ivrognes, des pédés, des pervers et des junkies », précise un chef de section, le 8 mars 1972. Un instant pressenti pour jouer le rôle principal, l’acteur Rock Hudson est écarté pour cause d’homosexualité, au profit d’Ephrem Zimbalist Jr. La chaîne ABC est en permanence à la merci du patron du FBI. Un mot de J. Edgar Hoover, et la série s’arrête, au nom de la loi n˚ 670 qui protège l’image du FBI. Les agents passent au crible le passé de toutes les personnes travaillant pour la production. Dans un mémo daté du 2 octobre 1973, un responsable du FBI affirme : « On nous a soumis les noms de milliers d’acteurs, scénaristes ou réalisateurs pour la série FBI . Leurs noms ont été vérifiés dans les archives du Bureau, et leurs empreintes digitales dans celles de la division Identification. La très grande majorité de ces personnes a été approuvée. »
    Le FBI dresse une liste noire de gens à ne jamais employer dans la série. En tête : Bette Davis, « sympathisante communiste », et Dalton Trumbo, scénariste et réalisateur. Hoover note au bas de la fiche de l’acteur Robert Blake : « Veillez à ce qu’il ne travaille jamais dans la série » ; l’acteur a en effet déclaré qu’il préférerait jouer le rôle d’un méchant plutôt que celui d’un des agents du FBI. Moins amusant, l’actrice Angela Tompkins, qui apparaît dans un épisode de la sixième saison ( Death Watch ), est renvoyée après avoir posé dans Play Boy . L’Agent spécial chargé de vérifier le passé des employés de la série a remarqué qu’un des acteurs avait signé en 1951 une pétition de soutien aux « Dix d’Hollywood », qui s’étaient retrouvés en prison pour avoir refusé de collaborer avec la Commission du Congrès sur les activités antiaméricaines (HUAC). Après avoir interrogé l’acteur, l’agent du FBI conclut à une erreur de jeunesse et recommande son embauche. Pas question ! fulmine J. Edgar Hoover, qui ne veut « pas de compagnon de route, ni même d’un imbécile naïf au générique » de la série.
    Cartha DeLoach se rend régulièrement au studio 3 de la Warner, à Burbank, en Californie, afin de contrôler le tournage des épisodes. Les tournages, déclare Ephrem Zimbalist Jr., « étaient intéressants, car on nous privait de la liberté généralement octroyée aux acteurs. Nos personnages ne devaient pas fréquenter de femmes, ils ne pouvaient pas fumer. Interdiction de boire, de mettre les pieds sur les bureaux. On ne pouvait pas tomber la veste. On était de bons petits garçons. C’était un vrai défi, pour moi, que de travailler au sein d’une telle structure et de ne pas m’ennuyer ! »
    Mais, en 1966, le tournage du premier épisode de la deuxième saison de FBI ne se passe pas du tout comme prévu par J. Edgar Hoover. Comme à chaque début d’épisode, l’Agent spécial Lewis Erskine pénètre dans le bureau de son patron pour recevoir ses ordres. Cartha DeLoach écarquille les yeux en voyant Ephrem Zimbalist prendre une chaise, s’asseoir, ôter ses souliers et poser les pieds sur le bureau. Quand l’acteur allume un cigare et sort de sa poche une bouteille de whisky, DeLoach regarde autour de lui. Personne n’a l’air étonné. Puis il entend l’acteur dire d’une voix traînante :
    « Putain de merde, aujourd’hui j’ai vraiment pas envie de travailler ! »
    DeLoach bondit sur le plateau en criant :
    « Qu’est-ce qui se passe, ici ? Ça ne fait pas partie de nos accords ! »
    Quarante ans plus tard, DeLoach reconnaît avec amusement avoir compris trop tard que l’équipe de FBI se payait sa tête. Face à l’hilarité de toutes les personnes