FBI

ami Jules Bonavolonta, coordinateur du programme « Criminalité organisée » du NYFO. Fort de ces deux appuis, il lui reste le plus difficile à faire : convaincre les responsables du bureau de Washington. Dans le même temps, l’infiltré doit continuer sa vie au sein de la Mafia comme si de rien n’était. La moindre erreur peut lui être fatale. Dans l’impossibilité d’effectuer des allers et retours avec Washington, Joe Pistone négocie par téléphone son maintien en place. Il sait se montrer convaincant : au bout de quelques semaines, le Quartier général l’autorise à poursuivre sa mission. À partir de là, chaque fois qu’il est convoqué par la Famille à une réunion, l’Agent spécial ne peut s’empêcher de se demander si Balistieri n’a pas fini par avertir les Bonanno.
     
    Au sein de la mafia new-yorkaise, tout le monde a peur du chef de la famille Bonanno, Carmine Galante. Seul Carlo Gambino était capable de lui tenir tête. Mais Gambino est mort en 1976 et, depuis lors, aucun « homme d’honneur » n’est de taille à s’opposer à celui que l’on a surnommé « le Cigare », en raison de sa passion pour les havanes.
    Personne ne sait combien Carmine Galante a tué d’hommes durant sa vie. Peut-être pas même lui. Il avait onze ans lorsqu’il a commis son premier assassinat ; depuis, les cadavres valsent autour de lui. Sa victime la plus célèbre fut le journaliste italien antifasciste Carlo Tresca, dont l’assassinat fut organisé en 1943 par Vito Genovese pour s’attirer les bonnes grâces de Benito Mussolini. Carmine Galante est un bien trop gros gibier pour Joe Pistone. Il n’entendra du reste parler de lui qu’une seule fois, et cette fois-là, il n’est pas près de l’oublier.
    Le 12 juillet 1979, Carmine Galante déjeune dans un restaurant du quartier de Bushwick, en plein cœur de Brooklyn. L’endroit, « Joe and Mary’s », est tenu par son cousin. Le parrain n’est entouré que d’hommes qu’il croit être de confiance. Il ne s’inquiète pas quand l’un des convives quitte la table en prétextant un mal de ventre. Il ne prête pas non plus attention au fait que d’autres de ses hommes s’éclipsent discrètement pour aller téléphoner. En revanche, il ne peut pas ignorer l’irruption brutale de trois hommes masqués et armés. Les deux premiers braquent l’assistance, tandis que le troisième pointe un fusil de chasse à canon scié dans sa direction et tire deux fois. Carmine Galante meurt comme il a vécu, le cigare à la bouche.
    Une fois le parrain enterré, au sein de la famille Bonanno, l’heure est aux réajustements. Le FBI est aux premières loges : jamais ses agents n’ont eu pareille opportunité de parfaire leur connaissance du continent mafieux. Carmine Galante est vite remplacé par un nouveau parrain, Phillip Rusty Rastelli. Véritables courroies de transmission, les deux capitaines de la famille sont eux aussi remplacés. Le capitaine de Lefty Ruggiero aurait dû être éliminé avec Carmine Galante, mais il négocie avec le nouveau pouvoir et, pour sauver sa peau, accepte de redevenir « simple soldat », comme Lefty Ruggiero qui passe sous la coupe d’un nouveau capitaine, Dominick Napolitano, dit Sonny Black.
    Comme tout « capitaine », Sonny Black a le droit de vie et de mort sur ses hommes ; en outre, il récupère leurs équipes. Désormais, Joe Pistone, alias Donnie Brasco, lui appartient. Avec l’entrée en scène de Sonny Black, l’opération « Sun-Apple » va connaître un rebondissement de taille. Sonny Black et Joe Pistone s’entendent en effet à merveille. L’infiltré reconnaît que le capitaine ne manque pas de charisme. Il aime bien son côté « à l’ancienne ». Il le trouverait presque sympathique : « J’étais avec Lefty et Sonny vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept, explique-t-il. Il aurait été difficile de ne pas voir du bon en eux. Lefty était un gangster au sang-froid, qui adorait ses petits enfants. La fréquentation de Sonny était très agréable. Comment faire pour garder ses distances ? Je devais rester concentré sur l’objet de ma mission et ne jamais oublier pourquoi j’étais là, ni qui j’étais. J’ai fait mes choix, ils ont fait les leurs. Je n’ai pas choisi d’être un gangster. Ils avaient choisi d’être des gangsters avant que je ne les infiltre. Ils l’ont été après. C’est vrai qu’il a été difficile de ne pas