FBI

peau d’un intermédiaire peu scrupuleux, en quête de partenaires. Il se fait appeler Tony DeVito et lorgne du côté de la Mafia. Melvin Weinberg lui présente trois mafieux de Philadelphie à la recherche de nouveaux investissements. Mais le trio se fait assassiner peu après, lors d’une des innombrables guerres fratricides de la Mafia.
    S’annonçant comme homme de confiance du cheik Kambir Abdul Rahman, Tony Amoroso rencontre le maire de Camden, Angelo Errichetti. « J’étais censé être un ex-militaire, dit Tony Amoroso, mais j’ai laissé entendre que j’avais travaillé pour la CIA et que j’étais grassement payé par les Arabes pour travailler pour leur compte. Je leur ai montré que j’avais les moyens. Je vivais sur un bateau qui avait été saisi par les douanes avec à bord cinq tonnes de marijuana. J’avais un appartement à Atlantic City, une maison à Washington, et quand j’allais à New York, je descendais dans le meilleur hôtel de la ville, le Plazza. Le maire m’a même demandé de prêter de l’argent à l’un de ses amis banquier. Je lui ai demandé de combien il avait besoin. Il m’a dit : ce que tu peux. Alors, j’ai mis cinq millions de dollars à son nom à la banque. Vous savez, quand vous mettez en avant une somme aussi importante, vous êtes crédible. Je lui envoyais par avion privé des caisses de champagne, du Dom Pérignon, depuis New York. »
    Monsieur le Maire est arrangeant. Moyennant un pourcentage, il offre à Tony Amoroso de pouvoir utiliser son port pour importer toutes les marchandises qu’il veut : le capitaine du port est aux ordres. Amoroso lui explique qu’il cherche des débouchés pour investir les millions de dollars du cheik qui dorment sur un compte à la Chase Manhattan Bank. Le cheik a des visées sur une mine de titane et envisage de construire des casinos dans la capitale du jeu de la côte Est, Atlantic City.
    Les caméras et les micros du FBI enregistrent les négociations entre le maire et les envoyés du cheik, dont Tony Amoroso. On parle affaires, investissements dans le cadre de l’agrandissement du port de Camden, ouverture d’un nouveau casino à Atlantic City. Grâce à ses contacts politiques, le maire peut tout ; en échange, il demande 400 000 dollars de commission. Pour commencer, il empoche 25 000 dollars en cash. De son côté, le vice-président de la Commission de contrôle des casinos, Kenneth MacDonald, reçoit 100 000 dollars en échange d’une licence. Le FBI filme.
    En mars 1979, le maire Angelo Errichetti rencontre le cheik Kambir Abdul Rahman à bord de son yacht qui mouille dans le port de Delray Beach, en Floride. Il est accompagné du sénateur démocrate du New Jersey, Harrison « Pete » Williams. Le cheik leur expose ses projets d’investissement dans les casinos d’Atlantic City et dans une mine de titane en Virginie, mais il a besoin de leur aide pour naviguer dans les eaux politiques. Il s’exprime dans un arabe assez convaincant phonétiquement, mais plutôt approximatif. Ses propos sont traduits par un autre agent du FBI qui joue les interprètes. Le sénateur est enchanté de l’offre du cheik : « Dites-lui que je ferai tout pour l’aider », lance-t-il à l’interprète avant de s’en aller. Williams est impressionné : il n’a jamais vu yacht aussi luxueux que le Left Hand du cheik. Il ignore que, quelques semaines auparavant, un autre agent infiltré, Joe Pistone, s’est lui aussi servi de ce yacht pour impressionner un soldat de la famille new-yorkaise des Bonanno, Lefty Ruggiero.
    Dans les mois qui suivent, le sénateur et les hommes du cheik signent leur premier accord. Williams s’engage à obtenir des contrats de l’armée pour l’achat de titane. En échange, à travers un homme de paille, il reçoit une participation dans la mine estimée à plus de 100 millions de dollars. La société du cheik chargée d’exploiter le casino d’Atlantic City verse un salaire de 18 000 dollars à l’épouse du sénateur, qui est aussi employée par la Commission sénatoriale du travail, commission dirigée par son mari. En échange, Williams obtient l’indulgence de la Commission de contrôle des casinos.
     
    Le maire, Angelo Errichetti, est impressionné par la surface financière du cheik. Il présente Tony Amoroso à un avocat de Philadelphie, Howard Criden, homme dont les réseaux se ramifient au cœur du pouvoir politique américain. L’opération « Abscam »