FBI
une équipe capable de désosser et de remonter une voiture en un temps record. Le boss de la famille, Tony Ducks Corallo, et son homme de confiance parlent souvent dans la voiture de ce dernier, une superbe Jaguar Sedan d’une couleur très rare aux États-Unis, référencée par le constructeur sous l’appellation « vert anglais ». Le Bureau décide d’« équiper » la voiture. L’opération est compliquée : pour alimenter le micro, on peut le relier à la batterie, mais il faut veiller à ce qu’il ne consomme pas trop d’énergie. Il faut en outre le placer en un lieu stratégique et dissimuler habilement les antennes, le tout en très peu de temps. Le Bureau se procure une Jaguar identique à celle qui sert de salle de conférence au parrain ; ses techniciens la désossent et font des essais, jusqu’à ce qu’ils aient trouvé les endroits appropriés. Puis ils s’entraînent à démonter la voiture, à installer le micro et à remonter le véhicule. À la fin, ils y parviennent en quelque cinq minutes. On devine la suite de l’histoire. Par une soirée pluvieuse, après s’être assurés de l’absence du propriétaire, les Agents spéciaux « empruntent » la Jaguar et la remplacent par son double. La voiture du mafieux est montée à l’arrière d’un camion de déménagement. À l’abri des regards, les techniciens du FBI démontent le véhicule, placent leurs micros et remontent la Jaguar qui, redescendue dans la rue, retrouve sa place initiale. L’opération s’est déroulée en un temps record.
Opération « Commission »
Reste au FBI à relier les Familles entre elles en prouvant l’existence d’un gouvernement de la Mafia, la « Commission ». Paul Castellano ne cesse d’en parler chez lui, les mafieux aussi dans leurs clubs. Ce sont les hommes de Bruce Mouw, le chef de groupe des Special Ops, qui vont prouver son existence.
Un de leurs informateurs leur a donné l’adresse d’une maison de Staten Island, au 34 Cameron Avenue, une date, le 15 mai 1984, et une heure, entre 14 et 16 heures. C’est là que doit se tenir une réunion de la « Commission ». Les deux Agents spéciaux qui planquent dans une voiture voient défiler devant eux tous les chefs des familles new-yorkaises. Ils les photographient. Le Bureau tient sa preuve.
J. Edgar Hoover a dû plus d’une fois se retourner dans sa tombe : onze ans seulement après sa mort, les agents du FBI de New York sont arrivés là où il les avait empêchés d’aller ! Par ignorance ou faute de moyens, dans les années 1920, le Bureau n’avait pratiquement rien fait lors de la guerre des Castellammarais (du nom du village de Sicile d’où étaient originaires les principaux protagonistes des hostilités) ; il avait raté la première grande réunion de la « Commission » qui s’était ensuivie en 1930, avec le rassemblement de trois cents parrains et « soldats » venus de tous les États-Unis, sous la houlette de Charles Lucky Luciano. Il ne s’était réveillé qu’après le sommet d’Appalachin, en 1957, pour retomber dans sa torpeur. Cette fois, Jules Bonavolonta et Jim Kossler sont bien résolus à ne pas manquer l’occasion en or qui leur est offerte.
« Depuis que je suis au Bureau, dit Jim Kossler, je n’ai jamais vu une affaire comme ça ! »
Le bureau de New York lance toutes ses forces disponibles dans l’opération baptisée « Commission ». Pas moins de 350 agents sont mobilisés ; c’est un peu moins de la moitié des effectifs du bureau new-yorkais. Ils sont épaulés par une centaine de policiers. Nombre d’entre eux sortent d’une très longue enquête appelée Pizza Connection , le premier et le plus célèbre des coups portés par le FBI au trafic international de drogue1. L’opération est supervisée par un des meilleurs agents du bureau de New York, Lindley DeVecchio.
Cette petite armée fait la fierté de son général, Jules Bonavolonta. Contrairement à celle qui a perdu au Vietnam, celle-ci est unie, compacte et motivée. Ses chefs ont faim et soif de victoire. Il leur faut certes faire avec la bureaucratie et les interférences de Washington. « Mais tenir ces trous du cul à l’écart, disait Bonavolonta, c’était mon boulot. Et je l’aimais bien. » Quand il y réfléchit, Bonavolonta mesure le chemin parcouru depuis l’époque où il est entré au Bureau : « En ce temps-là, les Agents spéciaux, presque tous blancs, ne se
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