FBI
l’« Ours » Flemmi qui le qualifie d’« excellent informateur, en contact avec Raymond Patriarca et d’autres membres de la Cosa Nostra ». Le Bureau lui attribue déjà sept assassinats. Le SAC affirme : « Il va continuer à commettre des meurtres, mais son potentiel d’informateur l’emporte sur les risques. »
En 2004, un rapport du Comité pour la réforme du gouvernement du Congrès américain note : « Les responsables des autorités judiciaires ont choisi au début des années 1960 d’employer des meurtriers comme informateurs. Des tueurs renommés ont ainsi été protégés des conséquences de leurs crimes, et laissés à dessein en liberté. »
Mais Jimmy l’« Ours » est incontrôlable, il ne sait pas s’arrêter. Début septembre 1965, il est inculpé de tentative d’homicide par un juge de l’État du Massachusetts. Il ne se présente pas devant le tribunal et disparaît. Le 15 septembre, le SAC de Boston écrit à J. Edgar Hoover : « Étant donné que l’informateur [Jimmy Flemmi] est en fuite et que tout contact avec lui se révèle difficile et embarrassant, nous fermons le dossier. » Fin, donc, de la courte carrière officielle de Jimmy Flemmi comme informateur du FBI. L’« Ours » sera arrêté quelque temps plus tard et se retrouvera pour quelques années à la prison de Wahlpole. Son frère d’armes, Joseph l’« Animal » Barboza, condamné à quatre ans de prison pour port d’armes prohibées, l’y rejoindra le 12 juin 1966.
Le rideau se lève, le 8 mars 1967, à la prison de Wahlpole. Ce jour-là, l’« Animal » y reçoit la visite des deux Agents spéciaux, Rico et Condon, qui lui proposent l’impunité en échange de son témoignage contre Raymond Patriarca. L’« Animal » accepte le principe d’une collaboration, dont les termes restent à définir. Les deux agents sont aux anges : Barboza « est au courant de ce qui s’est passé dans pratiquement tous les meurtres de la région », écrivent-ils dans leur rapport.
Le 21 mars 1967, l’« Animal » est transféré à Boston pour être interrogé par les deux agents fédéraux. Il a longuement réfléchi à leur proposition. Ils ont, dit-il, un ennemi commun : l’« Organisation italienne », la Mafia. L’« Animal » est prêt à aider le FBI à la détruire. Il a un plan qui tient en un nom : Teddy Deegan. Pourquoi ne pas imputer à l’« Organisation italienne » son assassinat ? Raymond J. Patriarca n’a-t-il pas béni le contrat ? Il faudra juste tordre un peu le bras à la vérité pour lui en attribuer la responsabilité. Dans le commando qui a assassiné Teddy Deegan, il y avait deux des soldats de la famille de Boston. Là encore, quelques touches de maquillage devraient faire illusion.
À la prison de Wahlpole, l’« Animal » a fait part du projet à l’« Ours ». L’idée lui a souri. Mais il va falloir jouer serré. L’« Animal » accepte de témoigner sur le meurtre de Terry Deegan, mais à une condition : il ne déposera jamais contre son complice et frère d’armes Jimmy l’« Ours » Flemmi.
« Je ne donnerai pas au tribunal de quoi faire frire Jimmy », dit-il aux agents du FBI.
En 2004, une commission d’enquête du Congrès américain soulignera : « Dès lors, il est inconcevable que les agents Rico et Condon n’aient pas été au courant de l’intention de Barboza de commettre un parjure lors du procès de l’assassinat de Deegan. » En clair, en recueillant la déposition de l’« Animal », les deux Agents spéciaux savent qu’elle est fausse.
La reconstitution de l’« Animal » est habile : il s’attribue ce qu’il faut de responsabilité pour être crédible, mais pas assez pour l’empêcher de passer un accord lui garantissant l’impunité. Il ne parle pas de Jimmy l’« Ours », mais accuse six personnes d’être responsables de l’exécution de Teddy Deegan. Ce sont six tueurs de la Mafia, membres de la famille de Boston dirigée par Gennaro Jerry Angiulo, bras droit de Raymond Patriarca. Quatre d’entre eux n’ont rien à voir avec l’assassinat de Deegan. Ils auront beau crier leur innocence et passer par le détecteur de mensonge, personne ne les écoutera.
En échange de son témoignage, le Bureau ne poursuivra pas l’« Animal » pour sa participation au meurtre de Teddy Deegan ; il s’arrangera pour que le procureur du comté de Suffolk classe sans suite les deux
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