FBI

plus stratégique, que les voitures volées ou les déserteurs qui nourrissaient les statistiques du Bureau pour la plus grande fierté du maître des lieux, J. Edgar Hoover. Le bureau de Miami affecte 100 agents à la lutte contre les narcotrafiquants, alors que la division anti-drogue du LAFO compte à peine 40 agents, dont une infime minorité d’origine hispanique. Une hérésie dans une ville où pullulent les bandes de trafiquants de drogue latino-américains. À titre de comparaison, la brigade des stups de la police de Los Angeles regroupe alors près de 400 agents.
    En 1982, le LAFO réussit un de ses plus beaux coups en arrêtant en flagrant délit une des personnalités très en vue de la ville, le constructeur automobile John DeLorean. Les agents du FBI sont arrivés à filmer l’industriel dans une chambre d’hôtel en train de discuter de sa participation à un trafic de drogue pour renflouer son entreprise. Au cours de la discussion, DeLorean s’est emparé d’un paquet de coke en s’exclamant : « C’est encore mieux que de l’or ! » L’annonce de l’arrestation de DeLorean par des agents du FBI fait la une des journaux américains. Le Bureau jubile, mais pas pour longtemps.
    Les choses se gâtent deux ans plus tard, lors du procès de John DeLorean, quand l’avocat du constructeur interroge Bernard Tisa, l’Agent spécial au cœur de l’affaire. Pressé de questions, Tisa reconnaît avoir détruit des documents. Mais il y a pire. Tisa a pris une part active dans la chute de DeLorean en jouant le rôle d’un banquier véreux. Devant le tribunal, l’Agent spécial avoue avoir suggéré à DeLorean de financer son entreprise défaillante par le trafic de cocaïne. C’est lui qui a mis en contact l’industriel avec un informateur du FBI chargé de jouer les trafiquants de cocaïne. Enfin, c’est encore lui qui a offert de financer l’opération quand DeLorean a déclaré ne pas avoir les 2 millions de dollars nécessaires à l’achat de la drogue. En d’autres termes, après avoir poussé DeLorean au crime, le FBI se propose de le financer. Ça fait beaucoup. Trop pour le tribunal, qui innocente John DeLorean.
    L’aura de la mafia des mormons se ternit. Mais l’affaire DeLorean n’est rien par rapport à un deuxième scandale sans précédent. L’affaire Richard Miller, du nom d’un des Agents spéciaux mormons protégés par le SAC.
    Richard Miller était un Agent spécial pas comme les autres. Obèse, réputé avoir du mal à contrôler sa libido, l’homme est depuis des années la risée du Bureau. Les histoires le concernant font florès. Les Agents spéciaux rient encore de la manière dont il perdait ses voitures, ne se souvenant plus de l’endroit où il les avait garées ; ils se moquent de sa manie de quitter le bureau en laissant les clefs dans la serrure ; ils s’inquiètent des plaintes de la police locale après son passage dans les cellules où il va prêcher la bonne parole mormone auprès des détenus. Quand on l’a surpris en train de vendre des produits ménagers Amway entreposés dans le coffre de sa voiture de service, Miller aurait dû être sanctionné. Mais, en tant que mormon, il bénéfice de la protection de son SAC et de la mafia des mormons.
    Le numéro deux du LAFO, Rudy Valdez, demande le renvoi de Richard Miller. Le SAC enterre les rapports de son numéro deux et mute Miller dans la section la plus secrète du LAFO, celle qui est chargée du contre-espionnage. Une manière comme une autre de le mettre à l’abri de l’attention des autres Agents spéciaux. Au début, il retranscrit et indexe les documents top-secrets, puis son supérieur le charge de surveiller une jeune Soviétique qui a trouvé refuge à Los Angeles en 1973. La jeune femme est soupçonnée d’être un agent du KGB. Richard Miller commence par coucher avec elle, puis il lui propose des documents confidentiels, dont le manuel du contre-espionnage du FBI, contre 50 000 dollars en or et 15 000 dollars en cash. L’affaire doit se conclure à l’occasion d’un voyage à Vienne que doivent effectuer Miller et son contact. Mais Washington a vent de l’affaire et dépêche une équipe d’enquêteurs au LAFO. Même le SAC mormon ne peut plus rien pour son protégé. Arrêté en 1984, Miller écope d’une peine de vingt ans de prison. Il est le premier agent de l’histoire du Bureau condamné pour intelligence avec l’ennemi. Il ne sera pas le