FBI
l’heure, tu t’en es sorti, mais moi, je sais ! » Peu après, l’agent du KGB est muté.
Ce n’est pas la première fois qu’une maladresse du Bureau met en péril la vie des deux frères Childs. Le 14 mai 1963, un éditorialiste de l’ American Journal affirme que le FBI connaît le détail des financements soviétiques au PCUSA. L’éditorialiste n’en dit pas plus long et l’information passe totalement inaperçue aux États-Unis. Pas à Moscou. Quelques mois plus tard, alors que Jack Childs s’y trouve, un officier du KGB lui annonce que les versements au PCUSA sont suspendus en attendant les résultats d’une enquête.
Le FBI a trouvé l’origine de la fuite : elle provient d’un des assistants de J. Edgar Hoover. L’homme n’est pas au courant de l’opération « Solo », mais a vu des documents concernant les financements communistes traîner sur le bureau du Directeur. Il a communiqué l’information à l’éditorialiste pour le remercier de lui avoir rendu quelque service. Afin de réparer les dégâts, le Bureau lance une campagne de désinformation. Il fait profil bas et se débrouille pour que l’information ne soit reprise par personne. Puis il laisse entendre qu’il s’est agi d’un canular. Le correctif marche.
En juin 1964, le KGB envoie à Jack Childs un message codé lui annonçant la livraison prochaine de « 300 paires de chaussures », ce qui signifie 300 000 dollars. Les affaires de « Solo » reprennent…
Janvier 1967, seconde alerte : Boris Ponomarev tend à Morris Childs un dossier confidentiel en provenance de l’ambassade soviétique à Washington. À l’intérieur, des rapports des services secrets de la Marine et du Département d’État contenant des informations transmises par les Soviétiques à Childs. Selon Ponomarev, le dossier a été jeté par-dessus le mur de l’ambassade soviétique. « C’est peut-être une provocation », hasarde Morris, légèrement inquiet.
Boris Ponomarev ne soupçonne pas Morris Childs d’être à l’origine de la fuite. Il veut simplement le mettre en garde et l’inciter à davantage de prudence. De retour à Washington, Morris a le fin mot de l’affaire : sans être au courant de l’existence de l’opération « Solo », le Washington Field Office (WFO) a rassemblé des documents confidentiels qui ont été jetés par-dessus le mur de l’ambassade soviétique. Par la suite, le WFO avait l’intention d’envoyer à l’ambassade un de ses agents déguisé en officier des services de renseignement de la Marine qui aurait proposé ses services après avoir revendiqué le jet de documents. Le WFO avait choisi ces documents parmi ceux qui étaient mis à sa disposition, sans se douter de leur provenance, encore moins du fait qu’ils risquaient de compromettre l’opération « Solo ». Le WFO annulera l’opération…
« Une fenêtre sur le Kremlin »
Le 15 novembre 1968, Morris Childs arrive à Moscou pour sa trentième mission. La ville est en état de siège. Le cortège de limousines noires qui les conduit, lui et son épouse, à leur appartement doit s’arrêter à plusieurs reprises pour laisser passer des convois de chars blindés et de camions bâchés tractant des canons. Dans le ciel, des jets de l’Armée rouge volent à basse altitude. Dans les rues de certains quartiers, il y a plus de militaires que de civils. Morris Childs et son épouse se demandent s’ils n’ont pas débarqué en plein coup d’État militaire.
Quelques heures plus tard, dans son bureau du département international du PCUS, Boris Ponomarev révèle la cause de la mobilisation de l’armée : la victoire du président Nixon aux élections américaines. Les dirigeants soviétiques redoutent que Nixon, dont ils connaissent l’anticommunisme forcené, ne déclenche une attaque nucléaire contre leur pays. Morris Childs les détrompe, leur expliquant que Nixon est bien trop rusé pour attaquer de front l’Union soviétique.
En juillet 1971, le principal conseiller en politique étrangère de la Maison-Blanche, le très influent Henry Kissinger, se rend dans le plus grand secret à Pékin pour y préparer la visite de Richard Nixon prévue pour février 1972. Un voyage historique placé sous le signe de « Solo ». C’est Morris Childs qui a, le premier, renseigné les Américains sur la brouille sino-soviétique, dès le début des années 1960. Avant même que la rupture ne devienne
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