FBI
encore, certains parmi les agents ou anciens agents du FBI donnent raison à J. Edgar Hoover. Le père des profilers , Howard Teten, est de ceux-là. Entre autres fonctions, il a occupé celle d’instructeur de tir à l’arme à feu à l’académie du FBI : « Hoover ne voulait pas que ses agents participent à des tournois d’armes à feu, explique Teten. Une organisation comme le FBI n’a nul besoin de champions. Ils doivent être anonymes : ainsi, le public pense que tous les agents sont des champions… Il s’agit d’accroître le prestige du Bureau au détriment des individus. »
L’image du Bureau
Sarasota, avril 2008. Sur la côte ouest de la Floride, face au golfe du Mexique, entre terrains de golf et marécages, dans l’Amérique des centres commerciaux et du confort, se trouve une grande maison de retraite de luxe. Les bâtiments de la résidence occupent plusieurs hectares. Au centre, une sorte de club avec bibliothèque, salle de cinéma et auditorium accueille, pour leurs loisirs, des pensionnaires triés sur le volet. Ici, les anciens ambassadeurs côtoient les hommes politiques et les hauts fonctionnaires finissants. Tous ne sont plus que pour avoir été. Parmi eux, un vieil homme très digne, oublié de toutes les histoires du FBI, alors qu’il a marqué à jamais de son empreinte la vie du Bureau pendant deux décennies.
À l’âge de quatre-vingts ans, Neil Welch est sur la « liste rouge » des acteurs de l’histoire du FBI. Son nom ne figure pas dans les index des ouvrages consacrés au Bureau, les moteurs de recherche d’Internet l’ignorent. Son livre de souvenirs ( Inside Hoover’s FBI ) n’est pratiquement pas référencé dans les bibliothèques. Toutes les éditions sont épuisées. Son rôle s’efface de la mémoire des agents et c’est quasi par hasard que nous avons croisé la piste de ce géant du FBI, héros des combats contre le Ku Klux Klan et pionnier de la lutte contre le crime organisé. Le Bureau n’est pas tendre pour les francs-tireurs ni pour ceux qui se retrouvent sous les feux de l’actualité, fût-ce à leur corps défendant. Neil Welch appartient à ces deux catégories.
Par une curieuse ironie du sort, l’histoire d’amour contrariée de Neil Welch avec le Bureau est placée dès le début sous le signe de Melvin Purvis, qui fut lui aussi victime de sa célébrité. Issu d’une famille d’immigrants irlandais, Neil Welch a été élevé dans la pauvreté : « On ne savait pas qu’on était pauvre, tout simplement parce que tout le monde l’était et que personne ne nous l’avait dit », explique-t-il. Les distractions étaient rares et se résumaient à l’appartenance à l’un des clubs les plus populaires des années 1930, les Junior G-men, qui rassemblait dans tous les États-Unis des milliers de gamins dont l’ambition était de ressembler à leur héros, le prince des G-men, l’Agent spécial Melvin Purvis.
Qui n’a pas vécu dans l’Amérique des années 1930 ne peut mesurer l’importance des clubs Junior G-men de Melvin Purvis, qui essaiment dans les grandes métropoles des États-Unis et du Canada. Rassemblant plus de 260 000 enfants, ils font de l’ombre aux associations de boy-scouts. À son départ du Bureau, et après un court passage à Hollywood, Melvin Purvis anime à partir de 1936 une émission de radio à destination des enfants et des adolescents appelée « Junior G-men ». Purvis est un héros national. La culture populaire s’empare des agents du FBI et fait sienne l’expression forgée par un gangster pour les désigner, « G-men » ou « hommes du gouvernement ». Un nouveau héros est né : c’est un personnage de bande dessinée baptisé Dick Tracy, dont Melvin Purvis est le modèle.
L’émission de radio « Junior G-men » est un triomphe. Elle donne lieu à des déclinaisons littéraires, puis cinématographiques. Convaincus de participer à une croisade contre le crime, les milliers de jeunes auditeurs membres des clubs reçoivent des badges, des manuels d’agents secrets. Le visage de Melvin Purvis est sur tous les paquets de céréales Post Toasties, qui offrent aux enfants gourmands des panoplies d’agents du FBI. C’est encore mieux que de jouer aux cow-boys et aux Indiens. Garçonnets et fillettes s’enrôlent en masse dans les « patrouilles Loi et Ordre » lancées par les clubs Junior G-men. Ils reçoivent des cartes d’« opérateurs secrets ». À
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