FBI

épie leurs faits et gestes. Les fouilles commencent et, comme prévu, l’homme téléphone pour traiter les policiers d’imbéciles. Mais il est prudent : le FBI n’a pas le temps de localiser le lieu d’où il a passé son appel, ni de vérifier s’il se trouve parmi la foule qui suit de loin les fouilles. Les agents fédéraux n’arriveront pas à l’identifier.
    Le piège
     
    John Douglas avait négligé une donnée fondamentale : le rôle de la presse. Toutes les enquêtes se font sous l’œil attentif des médias. Journaux, radios, télévision rendent compte du moindre début de piste. Désormais, le ou les tueurs réagissent en fonction des informations publiées par la presse. Quelques jours après que les journaux ont révélé de la vanité des fouilles destinées à arrêter l’imposteur de Conveyrs, la police découvre un nouveau cadavre d’enfant fraîchement déposé non loin de la route Sigmond. « Pour moi, explique John Douglas dans ses mémoires, c’était à la fois un incroyable développement et l’amorce d’une stratégie visant à arrêter le tueur. »
    Le tueur a dû suivre à la télévision les fouilles de la police tout en sachant qu’elles ne donneraient rien, puisqu’il n’avait pas déposé là de cadavres. Puis, une fois la police partie, il a voulu prouver sa supériorité en tuant un enfant et en laissant le corps près de l’endroit fraîchement fouillé. Pour ce faire, il n’a pas hésité à rompre avec sa routine : alors qu’il abandonnait les cadavres à quelques kilomètres du lieu où il avait enlevé les enfants, cette fois il a fait plus de 30 kilomètres rien que pour défier les policiers. Pour la première fois, John Douglas a l’avantage : il sait que le tueur les surveille via la presse. Il va donc pouvoir manipuler son comportement.
    John Douglas compte mettre à profit le moindre événement pour amener le tueur à se démasquer. Frank Sinatra et Sammy Davis doivent donner un concert en gage de solidarité avec les familles à Atlanta. « Offrons un billet gratuit au tueur », lance Douglas aux policiers incrédules qui le prenaient déjà pour un cinglé. Pourtant, l’idée de Douglas est simple : pourquoi ne pas embaucher des agents de sécurité afin de contenir la foule ? Ils seraient payés une somme symbolique, mais pourraient assister au concert. Seules conditions : être jeune, noir, avoir une voiture et une certaine expérience dans le domaine de la sécurité. Autrement dit, répondre aux grands traits du profil esquissé par Douglas et Hazelwood. Les agents du FBI auront ainsi une liste de suspects sur laquelle travailler. L’idée plaît. Mais, avant de la mettre en œuvre, les deux profileurs ont besoin de l’autorisation du Procureur général. Ils l’obtiennent, mais trop tard : seulement à la veille du concert…
    John Douglas songe aussi à faire planter des croix de bois portant les noms des petites victimes, dans l’espoir que le tueur vienne s’y recueillir. Mais le FBI traîne des semaines avant d’approuver l’opération, puis différentes sections du Bureau se chamaillent sur le point de savoir qui doit fabriquer les croix. Là encore, quand l’opération débute, il est trop tard.
    La presse révèle que la police établit un lien entre les deux dernières victimes. Les enfants ont tous deux péri étranglés, et les policiers ont trouvé sur leur cou des fibres provenant d’une même corde. John Douglas a alors une intuition qui va faire basculer l’enquête. Il se dit que, apprenant la découverte des fibres, le tueur va se débarrasser des cadavres en les jetant à l’eau afin de détruire d’éventuels indices. Douglas va même plus loin : il pense que le tueur risque de jeter les corps de ses victimes dans la rivière Chattahoochee, qui marque la frontière nord de la ville et présente l’avantage d’être située non loin du territoire de chasse du prédateur.
    Nous sommes alors à la fin du mois de février 1981. La police et le FBI traînent les pieds. Certains enquêteurs ne croient pas John Douglas. Il faut attendre le début d’avril pour que le FBI et les policiers se mettent à surveiller les ponts et les abords des cours d’eau de la région. Entre-temps, trois cadavres d’enfants ont été repêchés dans les rivières Sud et Chattahoochee. Une longue attente commence. Des semaines s’écoulent, sans résultat. Le tueur semble s’être volatilisé. La police et le FBI