FBI
Jandal.
À partir du début de décembre 2001, le FBI a envoyé de petits contingents d’agents en Afghanistan afin de recueillir des renseignements dans le cadre de son programme de lutte contre le terrorisme. Principale source d’information : les détenus qui s’entassent dans les prisons de l’armée américaine. À partir de janvier 2002, les agents du FBI débarquent dans la base navale de la baie de Guantanamo, au sud-est de Cuba, dans la foulée des « combattants ennemis irréguliers » transférés là par les militaires. En mars 2003, ils sont aux côtés des troupes américaines qui envahissent l’Irak. Entre 2001 et 2004, plus de 200 fonctionnaires du FBI sont envoyés en Afghanistan, 500 à Guantanamo et 260 en Irak.
En mars 2002, à Faisalabad, au Pakistan, à l’issue d’une violente fusillade, la CIA s’empare d’un responsable d’Al Qaida, Abou Zoubaydah. Gravement blessé, Zoubaydah est transféré dans une prison secrète de la CIA où il reçoit les premiers soins en attendant d’être interrogé. La prise est de taille. Le FBI et la CIA associent leurs moyens afin de l’interroger. Le Bureau envoie Ali Soufan et un de ses collègues qui parle couramment l’arabe. Avant leur départ, leur superviseur, Charles Farham, leur dispense ses instructions. Ils doivent aider la CIA lors des interrogatoires de Zoubaydah ; ils ne doivent en aucun cas lui signifier le moindre avertissement « Miranda » ( Miranda warning ), comme le stipule la loi américaine qui définit les modalités à respecter en cas d’arrestation. Dès lors, il est clair que le FBI n’a nulle intention de déférer Abou Zoubaydah devant un tribunal américain. Pourtant, Ali Soufan n’a pas non plus l’intention de changer sa manière d’opérer. L’interrogatoire a lieu dans une prison secrète de la CIA. Il bénéficie de l’appui logistique d’officiers de la CIA qui se tiennent en retrait. Mais le quartier général de l’Agence n’a pas envoyé d’officier d’interrogatoire.
« Puis-je vous appeler Hani ? » demande Ali Soufan à Abou Zoubaydah en guise de préambule.
Abou Zoubaydah, qui exigeait que ses interlocuteurs américains l’appellent par son nom de guerre, se fige et dévisage Ali Soufan. Il ne s’attendait pas à ce qu’un Américain demande à l’appeler par le petit nom qu’employait sa mère quand il était enfant. Soufan vient de marquer un point grâce à sa technique d’interrogatoire dite de l’« approche informée ». Soufan montre aussi par là qu’il prend au sérieux Abou Zoubaydah.
Encore sous le choc de son arrestation, Abou Zoubaydah est surpris. Il s’était préparé à un interrogatoire musclé. Ali Soufan l’a pris à contrepied.
« Vous pouvez m’appeler Hani », lâche le responsable d’Al Qaida.
Ali Soufan devient dès lors un interlocuteur privilégié d’Abou Zoubaydah. « Le détenu a besoin du respect et de l’estime de l’interrogateur, expliquera Soufan devant une commission d’enquête du Sénat américain. L’interrogateur est la seule personne qui parle au détenu et l’écoute. On construit une relation que le détenu ne tient pas à mettre en péril. »
Dès la première heure, le détenu accepte de collaborer et livre des informations si importantes qu’elles sont aussitôt communiquées au directeur de la CIA, George Tenet. Visiblement impressionné, celui-ci adresse ses félicitations aux officiers d’interrogatoire. Mais, apprenant qu’Abou Zoubaydah a été interrogé par des agents du FBI, le directeur de la CIA se ravise et ordonne le départ immédiat d’une équipe d’officiers de la division du Contre-terrorisme de l’Agence (CTC).
Sur place, la situation du détenu se dégrade. Très affaibli par un premier interrogatoire, Abou Zoubaydah est confié aux médecins de la CIA qui, après avoir constaté la gravité de ses blessures, décident de l’évacuer sur l’hôpital le plus proche, mieux équipé pour s’occuper de lui. Ali Soufan et son collègue suivent le blessé et poursuivent l’interrogatoire quand son état de santé le permet. Mus par un sentiment d’urgence, les deux agents du FBI forcent la main au corps médical. Ils montrent au blessé un jeu de photos de membres d’Al Qaida. Abou Zoubaydah se fige devant la photo d’un barbu : il ne connaît que son nom de guerre, Muktar, mais il sait qu’il s’agit du cerveau des attentats du 11 Septembre. Il s’appelle en fait Khalid
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