Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Fidel Castro une vie

Fidel Castro une vie

Titel: Fidel Castro une vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Clerc
Vom Netzwerk:
à se comprendre, sont, conjoncturellement, à la même heure. L’un et l’autre détestent la « coexistence pacifique » ; ils sont soumisà la quarantaine et au sous-développement ; ils sont tous deux contraints à la fuite en avant, c’est-à-dire à l’exportation de leur révolution. 1964-1965 sera ainsi le temps d’une (brève) idylle entre Pékin et La Havane.
    Castro démontre aussi son indépendance envers Moscou en faisant suspendre, le 20 novembre 1964, puis arrêter Joaquín Ordoquí, une des figures de poids de la « vieille garde communiste » cubaine. Le vice-ministre des Armées, ainsi que sa compagne, Edith García Buchaca, sont réputés avoir joué un rôle trouble dans l’« affaire Marquitos », qui a passionné le pays le printemps précédent. Marcos Rodríguez, dit « Marquitos », est un ancien militant du PSP retenu coupable d’avoir dénoncé à la police de Batista quatre militants du Directoire étudiant ayant participé, en 1957, à l’attaque du palais présidentiel. Suivant un « tuyau » du leader de l’ex-Directoire, Faure Chomón, le procès a fait affleurer que l’accusé a été protégé par Ordoquí et García Buchaca. Chomón, alors ministre de l’Information, s’emploie à ce que l’affaire ait le maximum de retentissement. Face à la suggestion qu’on a voulu « écraser » l’affaire, Castro ordonne… de recommencer le procès. C’est là une des nombreuses interventions de l’exécutif dans la justice cubaine. Le
Lider
, à la barre, conduit, cinq heures durant, doucereux, l’interrogatoire de Marquitos. Et celui-ci blanchit le PSP en tant qu’organisation. Cette contribution à l’« unité révolutionnaire », réclamée par Fidel, n’arrachera pas l’accusé au peloton. Ordoquí et Buchaca, eux, seront emprisonnés pour « trahison ».
    1964 est aussi notoire pour être la dernière année complète d’activités publiques de Guevara à Cuba. L’industrie ne le passionne plus depuis que Castro a annoncé, en 1963, qu’il faut en finir avec les « rêves » de la première période. Le Che n’est sans doute pas convaincu mais il se plie, par loyauté. La nomination, durant l’été 1964, d’un de ses adjoints, comme titulaire d’un nouveau ministère des Activités sucrières lui retire soixante mille des quelque cent cinquante mille ouvriers qu’il contrôle.
    Le Che, pourtant, ne renonce pas à ses idées. Dès 1963, alors que la faillite des premiers choix économiques est patente, il a lancé sur le sujet un débat dans des revues. Il le poursuivra un an avec des représentants cubains ou étrangers d’une gauche,marxiste ou non, plus pragmatique. Il croisera notamment le fer avec Marcelo Fernández, ex-secrétaire du M-26 et son successeur à la tête de la Banque nationale, et avec Charles Bettelheim, professeur d’économie et président de France-Cuba. Contre la centralisation que Guevara a imposée à l’industrie, ceux-ci défendent l’autonomie des entreprises, par laquelle on garde une idée des coûts. Guevara réplique, superbe, que ce genre de pratique a autant d’intérêt que de garder trace de ce qu’on fait passer « de sa poche droite à sa poche gauche » ! Les « droitiers » sont également favorables aux « incitations matérielles » pour encourager la productivité ; l’Argentin y voit une perversion des intentions de la Révolution. Seuls, à ses yeux, sont acceptables les « stimulants moraux » – c’est-à-dire « la formation politique et l’éducation culturelle » des masses, en vue d’« élever leur conscience » et de susciter « l’émulation ». Une telle formule, explique-t-il, ne suppose pas l’élimination des stimulants concrets – primes, heures supplémentaires, récompenses – mais leur encadrement dans un processus « d’acquisition de culture » à quoi contribueraient « des discussions à tous les niveaux ». Or, celles-ci ne sont pas à l’ordre du jour à Cuba, où la fameuse « démocratie pédagogique » n’admet guère de
feed back
: de courant en retour de la masse qui écoute et acclame vers le chef qui discourt.
L’Homme nouveau
ne sera, ainsi, que le titre d’un livre de Guevara qui paraîtra peu après sa disparition, début 1965. Le Che va sortir étrillé, moins sans doute par les arguments de ses contradicteurs qu’en raison des conséquences de ses théories sur l’économie cubaine.
    Il ne se tient pourtant pas pour battu par ce qui est devenu un vrai

Weitere Kostenlose Bücher