Fidel Castro une vie
détroit de Floride sont engagées à New York, puis Washington.
Parallèlement, après quelques couacs, une majorité qualifiée de l’OEA (quatorze États) a décidé, le 29 juillet 1975, à San José de Costa Rica, de rendre à chacun la liberté de renouer avec Cuba. De 1964 à 1975, seul le Mexique n’avait pas rompu avec l’île. Sans attendre l’OEA, le Venezuela et la Colombie avaient renoué. Hormis les dictatures militaires, toutes « les Amériques latines » suivront dans les années à venir. Au milieu des années 1970, les États-Unis ont perdu la bataille de l’isolement du castrisme. L’embargo lui-même fait eau : en 1974 et 1975, Washington l’a assoupli, jusqu’à ne plus interdire que les ventes
directes
du territoire américain à Cuba. Lors d’une grande Mission du patronat argentin dans l’île début 1974, les grosses filiales d’entreprises américaines installées à Buenos Aires ont été de la partie. Le « blocus » de Cuba, qui avait représenté une véritable gêne avant d’être contourné de tous côtés, n’est plus qu’une absurde humiliation.
Et, pourtant, Castro va prouver qu’il lui est consubstantiellement impossible de vivre en bons termes avec les États-Unis, dont l’humeur négociatrice, après le traumatisme du Viêtnam, n’a pourtant jamais été telle en trois lustres (les accords d’Helsinki sur la sécurité et la coopération en Europe sont signés le 1 er août 1975). Le
Lider
va donc chatouiller son grand voisin sur un sujet pour lui ultrasensible : au plus fort de l’été 1975, il réunit à La Havane une conférence sur… l’indépendance de Porto Rico. (Rappelons que les indépendantistes portoricains n’ont jamais dépassé les 6 % de voix lors des élections démocratiques régulièrement tenues dans leur île…) Et ce n’était pas là une lubie puisque, depuis trois lustres, les Cubains aidaient en sous-main les Faln (Forces armées de libération nationale) dans l’autre ex-colonie espagnole d’Amérique « libérée » en 1898 par les « Yanquis »…
Parallèlement à sa
reconquista
de l’Amérique latine, le
Lider
s’est lancé, dès 1973, dans une offensive en direction des non-alignés. Les jalons ont été posés lors de son voyage en Afrique de 1972, singulièrement à Alger. Lors du IV e Sommet de l’Organisation en septembre 1973, à nouveau dans la capitale algérienne, Fidel sera l’une des voix qui pèsent. Il a choisi une conception de non-alignement qui choque mais donne à penser : « l’alliance naturelle » du tiers-monde et du bloc socialiste contre « le seul impérialisme », celui des États-Unis : « S’aliéner l’amitié du camp soviétique, c’est s’affaiblir », proclame-t-il. Par ailleurs, dûment chauffé par le leader palestinien Yasser Arafat, il décide, à Alger, de rompre avec Israël. À la différence des pays socialistes, Cuba avait gardé ses relations avec l’État hébreu car le
Lider
n’a jamais caché une touche d’admiration pour le « David » juif affronté au « Goliath » arabe, qu’il terrasse de temps à autre. Mais, ce 8 septembre 1973, Fidel est chambré par Kadhafi, son très anticommuniste adversaire idéologique, jusqu’à une embrassade d’anthologie. Et, le lendemain, le représentant de Cuba à Tel-Aviv va apprendre par la radio qu’il est sans emploi ! Castro, lui, reviendra à La Havane par le chemin des écoliers : Bagdad, Delhi (où il apprend la mort d’Allende et le coup d’État sanglant du général Pinochet), et enfin Hanoi, où il va séjourner toute une semaine parmi les hommes que, sans doute, il admire le plus sur terre : les inlassables combattants viêtnamiens.
Encore quelques jours, et le monde apprendra la prodigieuse augmentation imposée aux tarifs pétroliers par les pays producteurs. Cuba n’en souffrira pas, en raison de ses accords de troc avec l’Union soviétique. Mais le
Lider
n’est pas long à percevoir le parti qu’il en peut tirer pour sa stratégie en direction du tiers-monde et des non-alignés. Il prend, d’abord, la défense de l’Opep, les pays producteurs de pétrole, contre les pays occidentaux qui dénoncent les effets inflationnistes de la situation. Et il invite les pays en voie de développement à créer des « cartels » autour de leurs matières premières, à l’instar de l’Opep. Puis, réalisant que les plus pauvres seront les plus pénalisés par le renchérissement de l’or noir, il défend la
Weitere Kostenlose Bücher