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Fidel Castro une vie

Fidel Castro une vie

Titel: Fidel Castro une vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Clerc
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préparatoires ont été houleuses et tout a traîné. D’abord programmée pour mars 1991, la grand-messe est reportée « à l’automne, après les Jeux panaméricains ». Ce flou crée une atmosphère irréelle, comme si le régime était entré en hibernation. Le congrès s’ouvre enfin le 10 octobre, un mois et demi après les Jeux (oùles Cubains, à leur ordinaire, ont brillé) et après l’échec, donc, du putsch des généraux de Moscou. Or, cet épisode cardinal de la vie du régime qu’est un congrès n’est l’occasion d’aucune déclaration d’envergure – comme l’aurait été une redistribution institutionnelle. Rien n’y manifeste que le
comandante
serait à l’écoute de la rumeur du monde. La nouveauté la plus porteuse est que les artisans, éradiqués en 1968, vont retrouver pignon sur rue. On annonce par ailleurs une mesure, en gésine depuis six ans : les « croyants » pourront désormais entrer au parti. Et encore : les députés seront élus au suffrage secret (mais sans pluralité de candidature). Bien que le secrétariat du Parti communiste soit supprimé, Fidel reste « Premier secrétaire », et Raúl numéro 2.
    Pour le reste, les derniers survivants de la geste quittent le Politburo, hormis Juan Almeida, Carlos Rafael Rodríguez et Ramón Machado : parmi eux, Vilma Espín, épouse de Raúl, Armando Hart, ministre de la Culture (qui a mal tenu son « front » l’été 1991, marqué par un sursaut d’écrivains de l’Uneac et des remous autour de la sortie d’un film semi-contestataire de Daniel Díaz Torres,
Alice au village des merveilles
). Ceux qui les remplacent appartiennent à la jeune garde des quadragénaires remarqués par Fidel depuis la fin des années 1980 : Carlos Lage, qui devient le « tsar » de l’économie ; Roberto Robaina, secrétaire des Jeunesses communistes bientôt promu ministre des Affaires étrangères ; Carlos Aldana, dont la carrière allait sombrer l’année suivante dans une affaire de « trafics » ; Ricardo Alarcón, ancien ambassadeur à l’ONU, depuis 1993 président de l’Assemblée nationale.
    Du point de vue économique, c’est 1993 qui sera la pire des années. « Les révolutionnaires eux-mêmes étaient déprimés », dira Alarcón – peut-être une allusion à Fidel qui, pour la première fois, multiplie, cette année-là, les allusions à son éventuel départ du pouvoir. Le
Lider
se dit « fatigué » de sa condition d’« esclave de la Révolution ». Il aborde, devant la chaîne américaine ABC, l’éventualité d’une retraite… si l’embargo est levé. Cuba est « au bout du rouleau », titre
Le
Monde
. Pour la troisième fois consécutive, la production intérieure brute est en recul de plus de 10 % sur l’année écoulée. Et l’on sait même qu’unesorte d’
intifada
à la cubaine commence au printemps, avec jets de pierres, à la faveur de l’obscurité nocturne, contre les magasins où l’on peut acheter en dollars. Il devient aveuglant que l’immobilisme, en économie au moins, n’est plus tenable.
    Avec la redistribution des cartes survenue dans le monde à partir de 1989, un autre acteur indirect du jeu cubain s’est remis en branle : l’exil de Miami. Rien là que de naturel : les choses, jusqu’alors, étaient figées sous la houlette de l’inamovible
Lider
, en raison du face-à-face planétaire entre Washington et Moscou. À partir de 1985, on avait pu constater que Fidel était le « cancre de la
perestroïka
», ce qui permettait d’imaginer qu’une brèche allait s’en trouver agrandie entre La Havane et Moscou. Mais c’est la chute retentissante de six régimes communistes en Europe de l’Est, à l’automne de 1989, qui dope vraiment la communauté cubaine de Floride.
    Son homme fort est Jorge Más Canosa, fondateur, en 1981, avec la bénédiction de Ronald Reagan, de la Fondation nationale cubano-américaine (FNCA). Exilé dès 1960, à l’âge de vingt ans, en Floride, sans le sou, il a fait très vite fortune dans le bâtiment. Ce succès lui a insufflé une croyance sans limites dans les vertus de la libre entreprise. Politiquement, sa recette est la contre-révolution. Más Canosa se flatte de compter, parmi le quasi-million de ses compatriotes émigrés, cinquante mille cotisants, ce qui fait de son organisation la puissance numéro 1 de l’exil. Mais son côté flamberge au vent ne peut qu’inquiéter ses compatriotes vivant dans l’île qui, castristes ou non, ont

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