Fidel Castro une vie
fonctions remplies par l’omnicompétent Fidel : José Balaguer, soixante-quatorze ans, tenu pour l’idéologue du PCC et parangon de la vieille garde castriste, était désigné « principal promoteur du programme national et international de Santé publique » ; José Ramón Machado Ventura, vieux compagnon de route (soixante-seize ans), médecin de formation et communiste pur et dur, devenait le « principal promoteur du programme national et international d’Éducation », assisté en cela par Esteban Lazo (soixante-deux ans, seul Noir du sextuor), militant communiste hissé sur le pavois lors de la campagne de « Rectification des erreurs » des années 1980 ; Carlos Lage (un pédiatre quinquagénaire remarqué par Fidel dans les années 1980 au point qu’il en fit un « principal ministre », lui léguant le soin d’« ouvrir l’économie » insulaire, après la fin de l’Union soviétique) était fait « principal promoteur du programme de Révolution énergétique ». Suivait cette formule : « Les fonds correspondant à ces trois programmes devront continuer d’être supervisés en priorité, comme je le faisais personnellement… », par Carlos Lage, Francisco Soberón, directeur de la Banque centrale depuis trois lustres, et Felipe Pérez Roque, ex-secrétaire personnel de Fidel et jeune (il est né en 1965) ministre des Relations extérieures depuis 1999. On pense évidemment à quelques fonds secrets.
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L E TEMPS DE R AÚL C ASTRO
(
depuis 2006
Il [Fidel] me téléphone de temps en temps. Pas trop souvent, heureusement.
Raúl Castro, 2007
Une biographie de Fidel Castro ne saurait se terminer au 31 juillet 2006, quand le
Lider
a passé « provisoirement » l’essentiel de ses pouvoirs à son frère Raúl ; ni le 24 février 2008, date où l’Assemblée nationale du pouvoir populaire a formellement élu celui qui, depuis quarante-neuf ans, était officiellement le successeur en tout, le même Raúl Castro, à deux et même trois de ses commandements : État, gouvernement et armée. Il faut aller plus avant. D’abord parce que celui que son successeur appelait en public «
Jefe
» (chef) est toujours vivant comme sont écrites ces lignes (novembre 2012). Et aussi parce que Fidel, malade, épuisé, souvent confus et ressassant, continue d’irriguer la scène publique de « réflexions » portant sur toutes sortes de sujets, graves ou banals, souvent internationaux, ou relatifs à son pays. La question est inévitable : influe-t-il encore le cours des choses ? La succession assurée par Raúl est-elle plus qu’une prolongation du castrisme sous un autre prénom ? Et, par ailleurs, ne serait-il pas utile de peaufiner ultimement le « dit de Fidel » à la lueur du propre parcours de celui qui fut, un demi-siècle durant, au moins depuis la Moncada, quelque chose comme sa doublure, son « père Joseph » ?
Au début, de l’été 2006 au 24 février 2008, Raúl a peiné à se montrer plus que l’ombre portée du « grand frère ». Certes, il se confirma expert à « visser les boulons ». Le quadrillage immédiat de quartiers sensibles de la capitale et de quelques villes fut réalisé en douceur, de même que les interpellations(rares) auxquelles il fut procédé. Plus visible à tous fut, au début d’août, l’annulation du carnaval de La Havane, pourtant un des bons moments de l’année, mais où d’éventuels mouvements de foule se seraient révélés problématiques… Au total, ce furent, jusqu’à la mi-2007, des mois fuligineux au cours desquels les supputations sont allées bon train. Pour les uns (à Miami surtout, où l’on dansa dans les rues jusque tard, la nuit du 31 juillet 2006), Fidel était agonisant sinon mort et, tel en son temps Franco, on ne faisait que le prolonger, le temps de bien asseoir la succession. À l’inverse, il était aisé de trouver des Cubains persuadés que tout cela n’était que mise en scène pour tester les lignes de résistance, après quoi Fidel reviendrait frais comme un gardon ! Mais la plupart des gens, à en croire les reportages de l’époque, étaient surtout inquiets de la béance politique ouverte par l’évaporation de l’homme qui occupait autant dire tout le terrain depuis quasiment un demi-siècle – et que ne saurait, bien sûr, combler un inconnu ou presque nommé Raúl Castro. D’autant que celui-ci resta aux abonnés absents jusqu’au 13 août – jour où on le vit accueillir Hugo Chávez à l’aéroport : il y
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