Fiora et le Pape
écarlate,
complétait son équipement.
Avec
plus d’agacement que de crainte, Fiora considéra le personnage qui, après l’avoir
saluée courtoisement, s’emparait d’une main preste de son escarcelle :
– Vous
avez été bien mal inspiré en m’arrêtant, seigneur bandit, soupira Fiora. Je
suis fort pressée !
Des
dents blanches apparurent dans la broussaille de la barbe, tandis que l’homme
soupesait gaiement la bourse qui rendait, il est vrai, un son encourageant :
– Voilà
qui est fâcheux, mon jeune seigneur, fit-il en riant, car je suis, moi aussi,
fort pressé d’avoir ce beau cheval qui remplacera si bien celui que j’ai perdu
voici deux jours. Vous me semblez homme de bonne compagnie, si j’en juge par
ces belles armoiries qui s’étalent sur votre estomac, et vous comprendrez sans
peine que ma dignité de chef m’interdise d’aller à pied plus longtemps. J’y
perds de mon prestige.
– Je
suis navrée pour vous, mais, comme votre vie n’est pas en danger et que, en
revanche, plusieurs existences dépendent des jambes de cet animal, j’aimerais
en discuter avec vous.
En
disant ces derniers mots et sans qu’une intonation différente ait pu mettre l’adversaire
en garde, Fiora dégaina et, avec la rapidité de l’éclair, porta un coup furieux
dans la poitrine de son adversaire qui roula à terre ; dans le même
moment, elle fit à nouveau cabrer son cheval dont les antérieurs vinrent
frapper le bandit qui le maintenait. Mais si elle avait compté sur l’effet de
surprise pour venir à bout du reste de la bande, elle avait fait un mauvais
calcul, car à peine eurent-ils vu leur chef bousculé que trois bandits, lâchant
leurs armes, se ruèrent sur Fiora qu’ils désarçonnèrent et qui se retrouva à
terre, à demi aveuglée par les plis de son manteau. Pendant ce temps, le chef
se relevait et époussetait son buffle crasseux avec des grâces de petit maître :
– Une
cotte de mailles est toujours une bonne précaution quand on fréquente les
honnêtes voyageurs, ricana-t-il, mais je te dois un nouveau trou à mon
pourpoint et cela va te coûter cher, mon bel ami !
En un
clin d’œil, Fiora, persuadée que sa dernière heure venait de sonner, se
retrouva troussée comme une volaille et jetée en travers de son cheval sur
lequel le chef se hissa avec satisfaction.
– Tu
es un peu impulsif, l’ami, fit-il en assénant une claque joyeuse sur les fesses
du prétendu messager, mais tu es d’un bon rapport. Ta bourse mérite
considération. Par contre... il va falloir que tu me lises ça, ajouta-t-il en
pêchant le billet de Catarina et en le retournant entre ses doigts. Je n’ai
jamais eu le temps d’apprendre à lire !
– Si
tu tiens à ta tête, capitaine, je te conseille de laisser cette lettre
tranquille, grogna Fiora dont le nez, à chaque pas du cheval, allait cogner
contre le cuir du harnachement. D’ailleurs, le seul fait de m’empêcher de
poursuivre mon chemin l’a déjà ébranlée sérieusement.
Il
fallait jouer d’audace. Par extraordinaire, ce brigand semblait plus avide que
cruel. Il serait peut-être possible de s’entendre avec lui ? Restait à
savoir de quel côté penchaient ses sympathies politiques...
– J’ai
rarement rencontré des cadavres bavards, tu sais ? fit l’autre.
Rassure-toi ! Nous n’allons pas loin et tu vas pouvoir te reposer un peu.
Seulement, si tu fais le méchant, il pourrait bien devenir éternel, ton
repos...
Par un
sentier qui serpentait à travers un bois de chênes-lièges, la troupe atteignit
bientôt l’entrée d’une caverne qui s’ouvrait à flanc de colline, une entrée
étroite et masquée par une épaisse végétation.
La
nuit tombait. En file indienne, on parcourut un couloir sombre, envahi d’une
odeur de fumée qui piqua les yeux de Fiora et la fit tousser, mais déjà le
couloir s’élargissait et s’éclairait, tandis qu’une agréable odeur de viande
grillée venait chatouiller ses narines. On la posa à terre et elle se retrouva,
quelque peu engourdie, auprès d’un feu au-dessus duquel rôtissait un mouton
entier. Auprès d’elle, le chef réchauffait ses mains à la flamme.
– Je
te rappelle ce que je t’ai déjà dit, fit-elle calmement. Plus le temps passe et
plus ta tête est en danger.
– Ça
suffit ! gronda l’homme en lui jetant un coup d’œil meurtrier. Il y a des
choses que je n’aime pas entendre, même une seule fois. Alors deux ! J’ai
bien envie
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