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Fiora et le roi de France

Fiora et le roi de France

Titel: Fiora et le roi de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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de son pourpoint de velours bleu, Mortimer en tira une lettre
frappée d’un grand sceau écarlate qu’il tendit à Fiora par-dessus la table.
    – C’est
pour moi ? demanda celle-ci.
    – Bien
sûr. Le cardinal l’a remise à messire Tristan qui me l’a portée ce soir même.
Cette missive doit être remplie de belles phrases larmoyantes et fleuries...
Mais elles sont de la main même de Sa Grandeur.
    Sans
répondre, Fiora brisa le cachet et déplia la grande feuille craquante où s’étalait
largement une haute écriture, à la fois élégante et vigoureuse. Le texte, à dire
vrai, en était court. S’exprimant dans un toscan d’une grande pureté, Giuliano
della Rovere y affirmait sa complète ignorance du traquenard infâme dans
lequel, sans le vouloir, il avait entraîné Fiora et sa suivante. D’autre part,
il n’avait pas menti en rapportant l’histoire du rescapé du Rhône, Fiora
pouvait s’en assurer par une lettre au prieur de la chartreuse, en mentionnant
son nom. Lui-même avait seulement rapproché ce fait de ce qu’il avait appris au
Plessis concernant ce comte de Selongey dont on avait, naturellement, beaucoup
parlé à Rome dans l’entourage du pape. Et il terminait en se disant prêt à
aider autant qu’il le pourrait une jeune dame dont il avait pu apprécier le
charme et la grande noblesse.
    – Il
n’a tout de même pas osé vous donner sa bénédiction, bougonna Léonarde qui s’était
emparée de l’épître cardinalice quand Fiora l’avait laissée tomber de ses
doigts sur la table, mais personne ne lui fit écho.
    Mortimer
cassait des amandes en regardant Fiora et Fiora ne regardait rien... Les yeux
perdus dans la verdure du jardin que la fenêtre ouverte encadrait comme une
précieuse tapisserie, elle oubliait son hôte et le lieu et le temps. Une seule
pensée dans cette tête fine que la terre avait manqué ensevelir si peu de temps
auparavant : l’histoire de l’homme ramassé parmi les roseaux par les
moines pêcheurs de la chartreuse était vraie et, sans la haine active d’un
barbier avide qu’elle n’avait fait qu’entrevoir, elle serait déjà loin sur la
route de Provence...
    Perdue
dans son rêve, elle ne vit pas les yeux de Léonarde se remplir de larmes. Seul
Mortimer s’en aperçut et, coiffant de sa grande main les doigts maigres de la
vieille demoiselle, il les serra doucement sans rien dire, avec un sourire qui
se voulait encourageant.
    L’Écossais
quitta la maison peu après. Fiora semblait se désintéresser de sa présence mais
quand, au seuil, il la salua, elle lui sourit, d’un sourire si chaud qu’il
dissipa le léger malaise qui l’avait gagné devant l’attitude de son hôtesse.
    – Allez-vous
rejoindre le roi, à présent ? demanda-t-elle.
    – Non.
Il sera là d’ici un mois. La mauvaise saison approche et je vais mener, au
château, une paisible existence de garnison qui me permettra de vous voir
souvent. Si vous souhaitez chasser, le roi n’y verra aucun inconvénient...
    – Chasser ?
Oh non ! Depuis que j’ai tué un homme de ma main, je ne supporte plus l’idée
de donner la mort.
    – Quelle
hypocrisie ! fit Léonarde. Je ne vous ai jamais vue bouder les terrines de
lièvre ou les bartavelles de Péronnelle. Il faut bien tuer le gibier pour cela !
    – Sans
doute, mais pas moi. Le sang me fait horreur. J’en ai trop vu...
    Mortimer parti, Fiora félicita
Péronnelle pour ce repas si réussi puis grimpa vivement dans sa chambre après
avoir demandé à Léonarde d’aller lui chercher Florent.
    – A
cette heure ? protesta celle-ci. Qu’est-ce que vous lui voulez ?
    – J’ai
à lui parler. Soyez gentille : allez le chercher. L’œil soupçonneux,
Léonarde fila aussi vite que le lui permettaient ses jambes. Quand elle revint
et pénétra, suivie du jeune homme, dans la chambre de Fiora, elle comprit qu’elle
ne s’était pas trompée sur ses intentions. Sous l’œil de Khatoun qui,
éberluéee, l’aidait d’une main molle, la jeune femme entassait quelques
vêtements et des objets de première nécessité dans des sacoches de voyage. Sur
une table, à côté de la cassette où elle gardait ses bijoux et son argent, une
bourse bien remplie montrait quelles dispositions Fiora venait de prendre.
    – J’en
étais sûre ! s’écria Léonarde indignée. Vous voulez repartir !
    Fiora
se tourna vers elle et l’enveloppa d’un regard si grave que la pauvre femme
sentit qu’elle n’obtiendrait

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