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Fiora et le roi de France

Fiora et le roi de France

Titel: Fiora et le roi de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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hérissé par les flèches dorées de ses
églises ressemblait à une grande coupe d’argent sertie dans l’or et dans le
cuivre, car d’immenses forêts roussies par l’automne s’étendaient tout autour.
Dans ces forêts, la main de l’homme avait taillé des clairières où poussaient
des villages : Saint-Denis, Courbevoie et Colombes en bordure des prairies
de Longchamp ; vers Saint-Germain, il y avait Vaucresson, Montesson et,
dans la forêt de Montmorency, d’autres hameaux, Montmagny, Montlignon, Andilly ;
et puis, vers la Marne, Montreuil, Chennevières, Vincennes, cependant qu’au sud
apparaissaient les clochers d’Arcueil, de Sceaux, de Fresnes et de
Villeneuve-le-Roi. Florent, qui connaissait bien l’endroit, prenait plaisir à
renseigner Fiora, et celle-ci admirait le spectacle sans réserve. Au milieu de
cette mer d’arbres, rougis, brunis, dorés, la ville capitale semblait, sous le
soleil tardif, vibrer d’une vie bien à elle. Un brouillard nacré s’en
dégageait, avant de se dissoudre dans le bleu léger du ciel. Et Fiora qui, si
souvent, de sa villa de Fiesole, avait contemplé Florence en pensant qu’aucune
cité au monde ne pouvait l’égaler en beauté, Fiora qui avait contemplé Rome
brasillant des feux pourpres d’un couchant glorieux, demeurait admirative et muette
en face de cette grande ville sereine et majestueuse que, cependant, son roi n’aimait
pas.
    – Pourquoi ?
murmura-t-elle pensant tout haut sans même s’en rendre compte, pourquoi le roi
Louis vient-il si rarement ici ? Paris est pourtant digne de lui...
    – Oui,
mais Paris a été anglais trop longtemps et le roi n’arrive pas à l’oublier, fit
Léonarde. Les souvenirs en demeurent proches et il faudra peut-être un autre
règne, une autre génération pour que Paris rentre enfin en grâce. Le roi en
prend soin : ce n’est déjà pas si mal... Et, dans un sens, c’est une bonne
chose pour nous. Nous ne risquons guère de le rencontrer.
     
    Avec
le temps de Noël, le froid s’installa et aussi la neige. Les nuits furent
troublées par les hurlements des loups. Florent et le père Anicet veillaient
aux clôtures avec plus de diligence que jamais. On disait aussi que, dans la
forêt de Rouvray voisine, des brigands tenaient leurs quartiers, mais aucun n’osa
s’approcher de la puissante abbaye et des quelques maisons abritées sous son aile
de pierre.
    Fiora
se portait toujours aussi bien, mais l’ennui commençait à la gagner. Les
nouvelles de Touraine étaient rares. Léonarde avait écrit à Etienne pour lui
dire que Fiora avait contracté une maladie qui l’éprouvait beaucoup et lui
interdisait d’entreprendre, surtout en hiver, le voyage vers la Loire. Elle ne
reviendrait qu’au printemps, si tout allait bien... En retour, apportées une
fois par Agnelle, une autre fois par Agnolo, on reçut quelques lignes brèves et
maladroites. Le brave Etienne savait lire, mais l’écriture n’était pas son
fort. Quant à Khatoun, à qui Fiora avait envoyé une petite lettre, elle ne
répondit pas, ce qui ne laissa pas d’inquiéter la jeune femme car Khatoun
savait parfaitement lire et écrire. Florent, pour sa part, pensa que la jeune
Tartare boudait, mais se garda bien de le dire, se contentant de faire
remarquer qu’en général une absence de nouvelles signifiait que tout allait
bien. Et puisque Etienne disait que le petit Philippe poussait comme un
champignon, il n’y avait aucun souci à se faire.
    – J’ai
quand même bien envie de vous envoyer là-bas, lui dit un jour Fiora. Ce silence
n’est pas normal. Me sachant malade, peut-être pourrait-on au moins demander
des nouvelles ?
    – Qui
donc ? Aucun des habitants de la Rabaudière ne peut se lancer sur les
grands chemins par ces temps de froidure. Et messire Philippe le petit a besoin
de tout son monde...
    C’était
l’évidence même. Néanmoins, Fiora ne pouvait s’empêcher de penser que Douglas
Mortimer qui, en bon Écossais, ne craignait ni tempête ni froidure, aurait pu
faire le voyage de Paris... Et elle souffrait de cette indifférence. C’était
comme si, en quittant sa maison de Loire, elle avait effacé du paysage jusqu’à
son souvenir. Et elle avait tellement hâte de repartir, à présent, qu’il lui
semblait que le bébé attendu ne viendrait jamais...
     
    Passé
le temps des étrennes et celui de l’Epiphanie, les jours parurent se traîner
plus misérablement encore. Léonarde souffrit de rhumatismes

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