Fiorinda la belle
appela Beaurevers qui se hâta d’accourir.
Il ne se rassura que lorsqu’il vit la jeune fille qui lui souriait de son lit où elle était étendue. Elle était encore bien pâle, bien faible. Mais il était clair qu’on n’avait aucune complication à redouter.
« Reposez-vous, dit-il affectueusement ; un bon et long repos sera pour vous le plus salutaire des remèdes. Demain, il n’y paraîtra plus. Demain matin, vous sortirez d’ici. Et c’est moi qui serai votre garde du corps. »
Fiorinda remercia d’une voix affaiblie. Le corps, chez cette vaillante fille, avait été terrassé surtout par la fatigue. Mais l’esprit était demeuré lucide. Et déjà cet esprit travaillait. Mais elle fit signe à Beaurevers de se pencher et, baissant la voix à cause de la camériste qui allait et venait :
« Je ne partirai pas, dit-elle, si M. de Ferrière doit rester. »
Le ton sur lequel elle disait cela indiquait que c’était là une résolution irrévocable.
Beaurevers trouva cela tout naturel. Et, sur un ton plaisant, afin de la remonter, il s’écria :
« Charbleu ! comme dit votre noble fiancé, je l’entends bien ainsi ! Nous partirons tous les trois ensemble, foi de Beaurevers ! Et pas plus tard que demain matin, je l’espère. »
Fiorinda sourit. Et Beaurevers ne s’aperçut pas qu’il y avait beaucoup d’incrédulité dans ce sourire. Il trancha :
« Reposez en paix. Je vais de ce pas chez Ferrière. Et je vous réponds que l’affaire sera vite réglée, puisqu’il ne demeure ici que pour vous.
– Dites-lui bien, recommanda Fiorinda, que je ne m’en irai pas sans lui… Dites-le-lui : pas sans lui !
– Bon ! promit Beaurevers en s’éloignant, je le lui dirai, soyez tranquille. »
Fiorinda, soulevée sur ses oreillers, le suivit du regard jusqu’à ce que la porte se fût refermée sur lui. Alors, elle laissa retomber sa tête en arrière et deux larmes jaillirent de ses paupières sur ses joues pâlies sans qu’elle songeât à les essuyer.
Ce que Fiorinda redoutait se produisit : Ferrière fit à peu près la même réponse qu’elle avait faite. C’est-à-dire qu’après avoir remercié Beaurevers comme il convenait, il déclara qu’il ne quitterait le Louvre que lorsque sa fiancée en serait partie.
« Voilà qui est entendu, dit Beaurevers qui était à mille lieues de soupçonner la vérité et que Catherine venait de quitter son ami. Nous partirons tous les trois ensemble demain matin.
– Non, mon cher ami, dit Ferrière avec une douceur d’autant plus grande qu’il était plus cruellement embarrassé ; emmenez Fiorinda… moi, je suivrai… plus tard.
– Trente mille diables ! sacra Beaurevers exaspéré, je me tue de vous dire qu’elle ne partira pas sans vous ! »
Mais il eut beau faire et beau dire, Ferrière ne voulut pas en démordre. Voyant qu’il ne pouvait parvenir à le persuader, Beaurevers partit comme un furieux, en grommelant :
« Je veux que le diable m’étripe s’il n’y a pas de la damnée Catherine là-dessous ! Mais quoi ?… Je le saurai… il faut que je le sache… sans quoi je ne pourrai rien faire pour eux. »
Il revint auprès de Fiorinda. Il lui répéta tout ce qui avait été dit entre Ferrière et lui. Elle n’en fut pas surprise. Elle se contenta de dire avec une placide obstination :
« Je resterai donc ici. »
Beaurevers n’en put pas tirer autre chose.
XXIII – OÙ LE VIDAME APPREND DES CHOSES QU’IL IGNORAIT
Le lendemain même du jour où Beaurevers avait fait connaître à Catherine, qui l’ignorait, le contenu exact de la fameuse bulle du pape, Rospignac était parti par la route de Chartres. Guillaume Pentecôte et dix hommes de l’escadron de fer le suivaient. Ils n’avaient pas l’air de le connaître.
Cette absence de Rospignac – que Beaurevers n’ignorait pas – explique pourquoi il ne s’était produit aucun attentat nouveau contre le roi.
Le duc de Guise était également parti vers une destination inconnue.
Le vidame avait attendu quelques jours et, voyant que son fils ne se soumettait pas, il s’était résigné à aller trouver le cardinal de Lorraine.
Les Guises n’avaient accepté l’union projetée de leur sœur avec le vicomte de Ferrière que pour s’assurer le concours du vidame. Le cardinal ne fit aucune difficulté pour lui rendre sa parole, du moment que son concours leur demeurait acquis, comme il en donnait l’assurance.
Les jours
Weitere Kostenlose Bücher