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Fleurs de Paris

Fleurs de Paris

Titel: Fleurs de Paris Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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à coup, et j’ai vu un homme, le couteau à
la main, prêt à m’assassiner. Cet homme, c’était vous. Vous voyez
que je vous reconnais et que je me souviens.
    Un frémissement, parcourut l’escarpe. Sa rude
physionomie se troubla. Un instant ses yeux se voilèrent. Mais
presque aussitôt il reprit cette fermeté qui donnait au baron
l’illusion de se trouver dans une situation exceptionnelle et
devant un homme intimement mêlé à sa destinée.
    – C’est bien cela, dit Jean Nib, en
hochant la tête. Je ne vous ai pas tué, monsieur, mais je dois vous
dire j’étais venu pour vous tuer, vous et votre fille… Ne vous
alarmez pas… je parle parce que c’est nécessaire.
    – Je n’ai pas peur, dit rudement le
baron. Est-ce qu’on a peur d’un escarpe ?
    Ces paroles ne lui furent pas plutôt échappées
qu’il les regretta. Jean Nib avait frissonné et baissé la tête.
Mais bientôt, cette tête, il la releva, flamboyante, sur le
baron.
    – Escarpe ? Oui, c’est le mot… Je
continue donc. Je me suis saisi de vous ainsi que de votre fille.
Et tous deux vous avez été séquestrés, deuxième crime… À la masure
du Champ-Marie, je me suis trouvé en présence de votre fils Gérard,
et vous avez vu que je l’ai frappé, lui. Troisième crime…
Laissez-moi parler : je vous dis que c’est nécessaire, et vous
pouvez croire que j’aimerais mieux me taire… Ce n’est pas
tout : il y a une chose que vous ignorez. Un soir que j’avais
pu pleurer celle que j’aime, je me suis rappelé toutes les
richesses accumulées ici, et je suis venu pour voler. Je n’ai rien
emporté, pourtant ; c’est que j’ai vu sur la table de votre
cabinet deux enveloppes, l’une destinée à votre fille Valentine,
l’autre… à votre fils Edmond.
    En prononçant ce mot, Jean Nib jeta un ardent
regard sur le baron.
    Celui-ci soupira ; une larme pointa à ses
yeux.
    L’escarpe nota ce soupir et cette larme.
    – Alors, continua-t-il, j’ai pensé qu’un
jour ou l’autre, je pourrais faire ici un coup qui pour toujours
m’enrichirait. Il s’agissait de plusieurs millions… Et, pour ne pas
donner l’éveil, je me suis retiré sans rien prendre. Mais le crime
n’en existe pas moins. Ça fait quatre…
    Le baron songea que l’escarpe allait lui
demander ces millions entrevus. Une seconde, il eut la sensation
que Jean Nib allait se lever, bondir sur lui… Mais cette pensée, il
la repoussa violemment… Non. C’était d’autre chose qu’il
s’agissait… d’une chose inconnue, plus terrible que le vol ou
l’assassinat…
    Jean Nib n’avait pas fait un mouvement,
d’ailleurs.
    – Ça fait quatre, reprit-il lentement (et
il était impossible de surprendre dans sa voix cette forfanterie
dont parfois les criminels se glorifient). Voilà tout, en ce qui
vous concerne. En voilà assez pour me conduire au bagne. Mais ce
n’est pas tout. Je m’appelle Jean Nib, monsieur. Si vous aviez
interrogé l’agent Finot, qui était ici tout à l’heure pour
m’arrêter, il vous eût dit que je suis recherché pour diverses
affaires. J’ai volé. Pour me défendre, j’ai dû jouer du couteau.
Pourtant, laissez-moi vous dire : je ne suis pas un assassin.
Dans la bataille, quelquefois, seul contre cinq ou six hommes
armés, j’ai défendu ma peau comme j’ai pu. C’est la guerre qui veut
ça. J’ai fait la guerre à ceux qui ont, moi qui n’avais rien. C’est
pour vous dire : je suis un bandit ; et lorsque Finot me
mettra la main au collet, Paris sera débarrassé. Moi au bagne, bien
des gens dormiront tranquilles. Voilà ce que je suis… qu’en
pensez-vous ?
    – Je vous plains, dit le baron
d’Anguerrand.
    – Vous me plaignez ? Vous pensez
donc qu’un jour ou l’autre, j’expierai mes crimes ?
    – Je pense que nul n’échappe à sa
destinée… je pense que vous vous êtes mis hors la loi, hors la
société… je crois, en effet, que tôt ou tard vous succomberez dans
l’effroyable lutte. Vous succomberez parce que cela est juste,
parce que toute faute s’expie.
    Le baron parlait sincèrement. Il croyait que
l’escarpe, touché de repentir, obéissait au remords en avouant ses
crimes. Il éprouvait une réelle pitié pour cet homme, et déjà
songeait aux moyens de l’encourager dans la bonne voie où il le
supposait.
    – Ainsi, reprit Jean Nib, vous croyez que
j’irai au bagne ?…
    Hubert garda le silence.
    – Vous ne dites rien ? Vous n’osez
pas ? Vous pensez que

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