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Fourier

Fourier

Titel: Fourier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jonathan Beecher
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des travailleurs vous irrite ; c’en est assez pour que, de grand cœur, les
élèves de Saint-Simon vous donnent la main. » Plus loin, il ajoute : « Le
sentiment dont vous êtes animé, le dévouement auquel vous vous abandonnez
établit inévitablement un lien entre les élèves de Saint-Simon et vous. »
Cependant :
    Nous adoptons positivement le sentiment qui vous a
conduit [à votre doctrine], nous adoptons encore positivement une grande partie
de la critique que vous faites de ces agglomérations d’êtres hétérogènes,
hostiles, qu’on ose appeler sociétés aujourd’hui; mais nous rejetons tout aussi
positivement la presque totalité de vos vues sur l’avenir destiné à l’humanité
: nous ne les voyons appuyées sur aucune tendance indiquée par l’étude des
faits humains 14 .
    Il n’y a donc pas de terrain d’entente entre Enfantin et
Fourier. Quelque temps après, celui-ci résume ainsi leur correspondance : « Il
n’en résulta qu’un échange de lettres où le pape répondit qu’il trouvait sa
doctrine sublime et qu’il y persistait. De mon côté, je n’insistai pas 15 . »
    Si la première réaction de Fourier est défavorable, ses lettres
à Muiron témoignent d’une amertume et d’une hostilité croissantes. Le 5 juin
1829, il traite déjà les saint-simoniens « d’aigrefins » dont il n’est plus
rien à espérer. « Eux-mêmes ne croient pas plus à Saint-Simon qu’à l’Alcoran 16 », confie-t-il à Muiron. Et quand
celui-ci émet l’opinion que les saint-simoniens sont peut-être sincères,
Fourier ne fait que dénigrer plus encore leur « jonglerie », « leur morale
cosaque », et le « pathos évasif » de leur rhétorique. « Je suis toujours prêt
à entendre toute proposition d’opérer, mais non pas d’adopter leur tartufferie 17 . »

III
    Durant les deux années qui suivent les premiers contacts de
Fourier avec Enfantin, l’école saint-simonienne, bien que secouée par des
conflits internes, n’en continue pas moins de se développer : si la
constitution officielle de l’« Eglise » saint-simonienne en décembre 1829
provoque le départ de quelques-uns des premiers disciples (notamment Philippe
Bûchez, qui fondera sa propre secte), le mouvement dans son ensemble est en
pleine expansion. En 1830, certains membres de l’Eglise saint-simonienne de
Paris commencent de prêcher en province ; des groupes de fidèles se constituent
à Metz, Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Limoges, Lyon, Rouen. A Paris, les
réunions et conférences des saint-simoniens attirent tant de monde qu’il leur
faut louer plusieurs salles, avant de s’installer définitivement rue Monsigny.
Ils éditent des brochures, effectuent régulièrement des « missions » en
province et, en décembre 1830, acquièrent leur propre quotidien en rachetant Le
Globe.
    A la fin de l’année 1830, le succès de la religion
saint-simonienne est tel que Fourier ne peut plus feindre de l’ignorer. Ses
propres disciples, d’ailleurs, le lui signalent, certains allant même jusqu’à
lui faire naïvement part de leur intérêt pour la doctrine ou de rapprochements
qu’ils ont établis avec la sienne. Le choc est plus rude encore lorsque Fourier
se voit interrompre en pleine conférence par le vacarme émanant d’une salle attenante,
où se tient une réunion saint-simonienne 18 .
De tels incidents font du succès des saint-simoniens un constant objet de
douleur pour Fourier, et, dans ses lettres à Muiron, les commentaires ironiques
et désabusés sur les « niaiseries » et la mauvaise foi des saint-simoniens
cèdent le pas à de longues diatribes empreintes de rancœur. Lorsque Just Muiron
a le malheur de professer son admiration pour le ton noble et les sentiments
humanitaires des saint-simoniens, Fourier se fait violent :
    Vous voulez que j’imite leur ton, leurs capucinades
sentimentales que vous nommez effusion du cœur. C’est le ton des charlatans :
jamais je ne pourrai donner dans cette jonglerie ; je ne m’attaque qu’aux
raisonnements péremptoires 19 .
    La colère de Fourier contre les saint-simoniens atteint son
paroxysme à la fin de l’année 1830, lorsqu’il finit, avec un peu d’aide, par se
persuader que, non contents d’être des charlatans, ceux-ci le plagient. Il
semble que l’idée lui ait d’abord été soufflée par son ami Amédée Pichot du Mercure
de France*. Toujours est-il que Fourier s’en empare et en fait le cheval de
bataille d’un libelle qu’il

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