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Fourier

Fourier

Titel: Fourier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jonathan Beecher
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cavalerie de l’armée du Rhin. Point d’argent, les caisses sont vides,
point de chevaux, que des exténués et malades, les soldats sans habillement,
point de remèdes, point de fers pour les chevaux, enfin je manque de tout. Ce
qui est pire, point de discipline, de mauvais sujets voleurs ; des officiers,
des sacs à mandrins qui ne sont bons à rien et qui sont la cause de notre
déroute 29 .
    Telle est donc la condition de la cavalerie de l’armée du Rhin
au début décembre 1795. Six semaines plus tard, le 3 pluviôse de l’an IV (23
janvier 1796), sur avis du conseil de santé, Charles Fourier se voit délivrer
un congé de réforme 30 .
    Il n’est pas certain que Fourier ait eu à partager toutes les
misères de l’armée du Rhin au cours de ces campagnes de 1794 et 1795. Pendant
toute cette période, l’effectif des hommes sous les armes n’a jamais atteint
plus de la moitié de son chiffre théorique sur le papier. Sans même avoir de
parents aussi bien placés que le colonel Brincour, le cousin de Fourier,
nombreux furent ceux qui ont réussi à attendre la fin des hostilités, soit au
dépôt, soit à l’infirmerie *.
    * Selon le « Tableau général des forces de l’armée de
Rhin-et-Moselle du 25 brumaire an IV (16 novembre 1795) » par exemple, pas
moins de 62 119 soldats, soit les deux tiers de l’effectif global de 168 770 se
trouvent dans des hôpitaux à l’extérieur de la zone des combats (Bourdeau, Les
Armées du Rhin, 151). Les allusions spécifiques faites par Fourier aux hôpitaux
militaires dans les deux citations ci-dessous, ainsi que sa libération pour
raison de santé, laisseraient penser que lui-même a passé à l’infirmerie une
partie au moins de son temps sous les drapeaux.
    Le temps qu’il a passé sous l’uniforme a cependant laissé à
Fourier d’amers souvenirs. Il parlera plus tard, à partir de son expérience
personnelle semble-t-il, des marches forcées, des rations misérables, des
bivouacs détrempés qui constituaient le lot quotidien des soldats : « Au bout
d’une campagne, ce qui n’est pas détruit par le feu de l’ennemi est anéanti par
les fièvres de l’hôpital ou perclus par les rhumatismes et bénéfices de bivouac
habituel 31 .» Pour Fourier, comme
pour plus d’un observateur contemporain, on sait où il faut chercher la cause
de ces malheurs : dans la corruption des profiteurs de guerre, fournisseurs ou
fonctionnaires. Dans un manuscrit intitulé « Petitesse de la politique », il
redira encore qu’à son avis les pires « horreurs » de la guerre sont perpétrées
par « les marchands, ligués avec l’Autorité militaire ». « Ces marchands sont
les fournisseurs qui, par la famine, la nudité et la spoliation des hôpitaux,
détruisent plus de soldats que le canon de l’ennemi lorsqu’ils sont assurés
d’éviter le châtiment sous des généraux mercenaires et complices de leurs crimes 32 . »
    Fourier n’a pas tort d’attribuer les misères des soldats de l’an
III à la concussion des fournisseurs. On voit alors en effet un certain nombre
de ces individus, agents de l’intendance militaire aussi bien que fournisseurs
privés, faire fortune par divers moyens, de la spéculation sur le
papier-monnaie à la vente frauduleuse de marchandises réquisitionnées**. Ce
n’était là toutefois qu’un aspect de la crise économique plus générale qui
s’abattit sur la France au cours de l’hiver, exceptionnellement froid, de l’an
III, crise provoquée à la fois par la politique gouvernementale et par
l’extrême pénurie de denrées, effet combiné de la guerre et de la mauvaise
récolte de 1794.
    ** Le Directoire était conscient du problème et on le voit
à plusieurs reprises mettre le ministère de la Guerre en garde contre les «
vampires publics » qui hantent sa propre administration. Mais ces mises en
garde restent lettre morte. Déjà les thermidoriens avaient fait une tentative
de réformer le système de ravitaillement des armées : cela n’avait abouti qu’à
faire des fournisseurs privés plutôt que des fonctionnaires gouvernementaux les
principaux bénéficiaires de la corruption. Sur ce sujet, voir Jacques Godechot,
Les Commissaires aux armées sous le Directoire, 2 vol. (Paris, 1937) ;
Bourdeau, Les Armées du Rhin, en particulier 203-245 et 299-380 ; et Georges
Lefebvre, La France sous le Directoire (1795-1799), Paris, 1977, 506-511.
    Le renversement, en août 1794, de Robespierre marque la fin de
la

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