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Fourier

Fourier

Titel: Fourier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jonathan Beecher
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l’aise. De vingt ans moins âgée que son époux, Sophie est une
jeune femme volontaire, à la langue bien pendue, et par ailleurs fort près de
ses sous : de tous les enfants Fourier, elle est la seule qui ait réussi à
conserver sa part de l’héritage paternel.
    Mariette, la sœur aînée, s’est encore mieux débrouillée sur le
marché matrimonial. Président du tribunal du bailliage, son mari, Antide de
Rubat, est déjà sous l’Ancien Régime un avocat influent. Elu maire de Belley en
1790, il troque sa place avec son ami Anthelme Brillat-Savarin et se retrouve
député à l’Assemblée législative. Sous le Directoire, il est élu procureur de
la République pour le département de l’Ain, puis nommé en 1800 sous-préfet de
Belley. Trois ans plus tard, il meurt, laissant Mariette seule avec huit
enfants dont les âges s’échelonnent de dix-huit à un an. Peut-être Mariette
a-t-elle déjà montré avant cette date quelques signes d’instabilité mentale :
la biographie de Pellarin est muette sur ce chapitre et Fourier paraît ne
jamais avoir abordé le sujet avec ses disciples. Peu après le décès de son
époux, en tout cas, elle est enfermée dans un hôpital psychiatrique. Elle y
demeurera le restant de ses jours, tandis que les enfants sont livrés à
eux-mêmes dans la propriété des Rubat, à Talissieu, hameau d’une quarantaine de
feux situé près de Valromey, à une vingtaine de kilomètres au nord de Belley.
    Unique frère de Mariette, Fourier s’est toujours senti investi
d’une responsabilité à l’égard des enfants Rubat. Dans ses années lyonnaises,
il leur a rendu de temps en temps visite. A Lyon même, il s’est également
occupé d’une de ses nièces, Fanny, s’acquittant de cette fonction paternelle
avec une sollicitude dont une autre de ses nièces, Clarisse, se souviendra : «
Je n’ai jamais oublié, écrit-elle en 1832, et je n’oublierai jamais tous les
services que vous nous avez rendus à l’époque de la maladie de ma pauvre mère,
tout le bien que vous avez fait à ma chère Fanny dans le temps où elle habitait
Lyon 6 . ». Cela se situe, semble-t-il,
en 1804, quand, peu après la mort de son père, Fanny, alors âgée de dix-neuf
ans, est venue à Lyon, où Fourier lui a trouvé un emploi comme raccommodeuse de
dentelle 7 . Par ailleurs, Fourier
s’est vu plusieurs fois prié par les Parrat-Brillat de prendre part à des conseils
de famille concernant l’éducation ou l’avenir des enfants Rubat. Non que ses
avis aient toujours reçu le meilleur accueil, en particulier en 1813, lorsque
la famille se réunit afin d’examiner une proposition de mariage qui vient
d’être faite à Fanny. Le comportement de Fourier dans cette affaire est très
révélateur : on va le voir pratiquer cyniquement, et avec sa brusquerie
coutumière, le type même de calcul matrimonial mercantile qu’il dénonçait dans
les Quatre Mouvements.
    Fanny a alors vingt-huit ans. Son prétendant, six de moins.
Fourier sait qu’avec les guerres napoléoniennes, les hommes à marier sont
devenus denrée rare. « En Bugey, note-t-il, il n’y a pas un jeune homme pour
dix demoiselles, et dans cette pénurie un singe coiffé serait bien accueilli. »
Le prétendant, donc, est un peu jeune. Au moins est-il homme de bien. Il n’en a
pas fallu plus pour impressionner favorablement l’oncle Rubat et les « dames du
pays ». Fourier, pour sa part, se montre plus exigeant. Arrivé sur les lieux,
il fait sa petite enquête, écoute les rumeurs, et découvre rapidement que «
l’homme de bien » en question n’a pas plus de fortune qu’il n’a d’esprit et que
sa hâte à s’unir par les liens sacrés du mariage trahit surtout son principal
souci, qui est d’échapper à la conscription.
    Mesdames Durand et Benoît, écrira plus tard Fourier, ont
examiné ce qui touchait à l’esprit et ont reconnu d’abord que le jeune homme
pouvait prétendre au royaume des cieux. Pour moi, sans s’arrêter à la
superficie ni au bel esprit, qui n’est pas nécessaire au mariage, j’ai scruté
le point le plus important, la fortune, et j’ai écrit sous sa dictée une page
qui contient tant de contradictions et d’absurdités que je l’ai gardée pour
porter à Belley, où chacun m’a dit : « Nous ne savions rien de tout cela. Il ne
nous avait pas dit cela. » A quoi donc s’occupait-on et sur quoi s’informait-on
? Moi qui ne lui ai parlé que dix minutes, j’en ai tiré de quoi le

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