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Frontenac_T1

Frontenac_T1

Titel: Frontenac_T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Micheline Bail
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s’était précipité sur Callières en lui signifiant devant toute l’assistance qu’il n’avait pas le droit de s’y agenouiller, puisque c’était celui du comte de Frontenac.
    â€” Cette place me revient à titre de représentant du gouverneur général. Je n’en bougerai pas, avait sèchement répliqué Callières.
    â€” Vous ne pouvez pas vous y maintenir. Si vous ne laissez pas ce prie-Dieu, c’est moi qui devrai quitter cette église, lui avait répliqué le prélat, rouge de colère et parfaitement outré.
    â€” Vous êtes libre de faire comme bon vous semble, mon cher, lui avait-il rétorqué, avec son calme habituel.
    En catastrophe et d’un pas précipité, Saint-Vallier s’était alors replié vers la sacristie, sans plus d’égards pour la cérémonie. Il avait ensuite ordonné aux Récollets d’enlever l’exécrable prie-Dieu. Mais un officier de Callières avait surgi et l’avait remis en place. Le petit jeu avait dû reprendre trois ou quatre fois avant que l’évêque, hors de ses gonds, lève un interdit contre l’église des Récollets, la ferme et la prive du droit d’y célébrer tout rite religieux. Il était même allé jusqu’à édicter un mandement pastoral contre le supérieur de la communauté, l’accusant de s’être fait l’entremetteur d’une intrigue amoureuse entre madame de La Naudière et le gouverneur de Montréal. Une accusation ridicule et sans fondement.
    â€” Mais au fait, Callières, cette dame de La Naudière vous ferait sûrement une parfaite épouse. Elle est veuve et paraît bien disposée à votre égard. Pourquoi ne pas la courtiser?
    â€” Vous et votre propension à jouer l’entremetteuse de village! Avec les résultats douteux que l’on sait... J’espère au moins que vous touchez une prime au mariage? Mais laissons cela, je vous prie.
    Louis ricanait dans sa moustache. Il s’amusait aux dépens de Callières qu’il imaginait bien mal, en fait, avec cette dame de La Naudière, une vieille fille sans appas et du genre punaise de sacristie.
    â€” Je vivrais, ma foi, bien maigrement, si je devais compter sur une prime au mariage. Mes hommes sont si endurcis au célibat que j’arrive à peine à en caser un de temps en temps. Ils semblent plus intéressés, pour le moment, à effeuiller la marguerite qu’à la porter à la boutonnière. L’insécurité actuelle y est peut-être aussi pour quelque chose, je suppose. Mais trêve de plaisanteries, Callières, vous qui avez reçu de votre frère des nouvelles détaillées sur la guerre en Europe, auriez-vous quelque nouveauté à m’apprendre que je ne connaisse déjà?
    â€” J’ai quelques détails croustillants sur le siège de Steinkerkes, dont vous n’avez peut-être pas entendu parler. Ils datent de quelques mois, mais sont tout de même intéressants. Vous plairait-il d’en entendre le récit?
    â€” Certes, mes informations s’arrêtent à celui de Namur.
    â€” Namur fut un succès total. La ville ne tint pas plus de six jours, mais Vauban dut mettre un bon mois pour venir à bout...
    â€” ... du vieux château, juché sur un piton rocheux. Ma femme me le marquait dans une de ses lettres.
    â€” Vous ne savez peut-être pas que Louis XIV, qui s’est fort dépensé pendant le siège de Steinkerkes, a fait une telle crise de goutte qu’il a dû se retirer à Versailles et confier la suite des opérations au maréchal de Luxembourg?
    â€” Ah bon? Louis de Bourbon et le prince de Conti y étaient-ils aussi?
    â€” Oui, comme lieutenants généraux. Vous savez qu’à titre de petit-fils et petit-neveu du grand Condé, ils furent appelés par la voix publique au commandement des armées, mais que le roi ne permit pas qu’ils y fussent nommés?
    â€” À cause de la trahison de Condé pendant la Fronde, assurément. Notre grand roi a le pardon bien petit. Remarquez que Condé s’en est mieux tiré que le regretté Nicolas Fouquet, que j’ai connu et fréquenté autrefois dans les salons, figurez-vous. Il est d’ailleurs décédé à peu près à cette époque-ci de l’année,

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