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Frontenac_T1

Frontenac_T1

Titel: Frontenac_T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Micheline Bail
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tonitruante de Frontenac s’élevait, péremptoire.
    â€” Le fléau anglais est en train de s’abattre sur toutes nos frontières, continuait-il, des rivages de l’Acadie et de Terre-Neuve jusqu’à la baie d’Hudson, des Grands Lacs jusqu’aux confins du pays des Iroquois. Il n’est qu’à voir ce qui se passe en Acadie, où nos voisins du Sud se comportent déjà en conquérants. Ils envoient leurs pirates bloquer le golfe, cependant que les puritains * du Massachusetts grugent pied à pied le territoire de nos alliés abénaquis * . Quant aux Iroquois, les Anglais de la Nouvelle-York les tiennent désormais pour des sujets britanniques. Ils noyautent leurs conseils de guerre et orientent leur diplomatie en les poussant contre nous. Ils autorisent désormais les marchands d’Albany à trafiquer dans la région des Grands Lacs comme s’ils y étaient chez eux. Ils ont exigé et obtenu la destruction des forts Niagara et Cataracoui, et ils poussent les Iroquois à saper à la base nos alliances avec les nations outaouaises et algonquines!
    Le portrait sombre mais percutant que leur brossait le vieux routier, avec un sens de la mise en scène qui lui était particulier, galvanisa les esprits.
    â€” Une seule frontière tient encore, poursuivit-il, et c’est celle de la baie d’Hudson. Et ce miracle, nous le devons à monsieur Pierre Le Moyne d’Iberville, ajouta-t-il en s’inclinant avec reconnaissance devant ce dernier, qui lui rendit sa politesse avec le sourire.
    â€” Par ailleurs, vous devez savoir que nous avons raté de peu une expédition ambitieuse organisée par monsieur de Callières et appuyée par le roi, et qui visait à prendre la Nouvelle-York, Albany et Boston, leur jeta-t-il, sans transition.
    Chacun tendit l’oreille, car l’entreprise était restée secrète jusqu’à ce jour. Seul Champigny en avait eu vent par l’entremise de Denonville, qui la soutenait de toutes ses forces. Pierre d’Iberville écoutait avec grand intérêt. Il avait entendu parler du projet en France où il attendait de nouvelles directives du roi avant de revenir au pays. Le gouverneur esquissa en peu de mots les grandes lignes de l’expédition, puis exposa les raisons de son échec. Une rumeur de désappointement parcourut la salle. Pierre d’Iberville, enflammé à l’idée d’une attaque encore possible, prit la parole avec fougue.
    â€” Mais qu’est-ce qui nous empêche de reprendre une partie du projet, monseigneur? On pourrait fort bien monter une expédition au cœur de janvier, sur les glaces, et aller prendre par surprise la Nouvelle-York ou Albany.
    L’idée sembla susciter l’intérêt. Iberville continua, emporté par l’enthousiasme :
    â€” Albany n’a qu’une enceinte de pieux non terrassée et un petit fort à quatre bastions, où il n’y a que cent cinquante troupiers et trois cents habitants. La Nouvelle-York contient à peine plus de soldats, répartis en huit compagnies, moitié infanterie moitié cavalerie. La capitale n’est point fermée et son fort ne renferme que quelques canons.
    Si Pierre d’Iberville croyait l’expédition faisable, c’est qu’elle l’était peut-être. Tout paraissait possible à cet aventurier au destin hors du commun. Il revenait de France auréolé de gloire et nimbé du prestige d’avoir réussi à arracher à nouveau aux Anglais, dans des conditions extrêmes et quasi inhumaines, quelques forts importants de la baie d’Hudson. Grâce à cette audacieuse équipée, la Nouvelle-France étendait sa frontière du nord-ouest jusqu’à la baie de James et récupérait le fructueux commerce des fourrures du nord. Elle retrouvait aussi la vaste étendue d’eau qui mènerait peut-être un jour au mythique passage de la mer de l’Ouest. Réalisation peu banale et que plusieurs commençaient à lui envier, à commencer par Frontenac, qui reprit l’initiative.
    â€” L’idée d’entreprendre des expéditions au cœur de l’hiver va dans le sens de ce que j’ai déjà arrêté avec monsieur de Callières. Mais oublions la Nouvelle-York et Albany pour le moment. Nous ne devons pas exposer nos hommes

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