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Frontenac_T1

Frontenac_T1

Titel: Frontenac_T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Micheline Bail
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était assis sur le bout d’une chaise et suait à grosses gouttes en s’épongeant le front du revers de sa veste, en dépit de la fraîcheur du lieu. Il portait une barbe de plusieurs jours, des vêtements déchirés et crottés, et paraissait complètement abattu par ses récents malheurs. L’épuisement et l’inquiétude avaient marqué chaque trait de son visage.
    â€” Velcôme capittèn Dâvis , fit Louis à l’intention du prisonnier qu’il trouva plus âgé qu’il ne l’avait imaginé.
    Frontenac se risquait parfois à prononcer quelques mots dans la langue de Shakespeare, par simple courtoisie à l’égard de son hôte. Un soldat était présent et lui servirait d’interprète.
    Le puritain se leva et le salua d’un révérencieux «  Mister the Earl of Frontenac  ». Il resta debout jusqu’à ce qu’on lui ordonne de se rasseoir. Le prisonnier avait demandé cette entrevue pour faire part de ses doléances après la récente prise de Fort Loyal, à Casco Bay, dans l’État du Massachusetts.
    Cette troisième expédition s’était soldée, elle aussi, par un glorieux fait d’armes. L’officier Portneuf, qui la commandait, s’était attaqué à forte partie. Fort Loyal était une solide forteresse palissadée, protégée par huit canons et occupée par une centaine d’hommes. Le bouillant capitaine avait dû entreprendre un siège en règle et faire creuser des tranchées jusque sous les remparts, où il avait fait placer des explosifs. Après six longs jours de blocus, désespérés et à bout de ressources, les assiégés avaient fini par se rendre.
    Le capitaine Davis assura à Louis qu’il avait été bien traité pendant le voyage de retour vers Québec, mais qu’il avait à se plaindre de la conduite du commandant « Purniffe » et de son lieutenant, « Corte de March ». Frontenac sourcilla. Décidément, Davis ne maîtrisait pas mieux le français que lui l’anglais.
    â€” Le commandant Portneuf et son second, Courtemanche, traduisit l’interprète à l’intention de Frontenac, ont manqué à leur parole de soldat en ne respectant pas les clauses de la reddition, qu’ils avaient pourtant juré d’honorer.
    L’homme soufflait péniblement entre chaque mot, comme si l’air entrait difficilement dans ses poumons, et l’indignation lui faisait monter le sang au visage. Louis écoutait avec attention, curieux de voir de quelle étoffe était tissé le bonhomme.
    â€” Nous avons demandé quartier pour nos hommes, nos femmes et nos enfants, dont plusieurs étaient grièvement blessés, et aussi la liberté de nous rendre en sûreté jusqu’au prochain village anglais. Ce que vos hommes ont accepté en jurant, la main levée, devant le Dieu éternel! Alors nous avons marché vers la sortie et laissé tomber nos armes...
    Davis fit une pause pour reprendre son souffle et s’éponger le front, puis continua, la voix éraillée :
    â€” Mais nous avions à peine franchi la barrière que les Indiens se sont rués sur nous en hurlant, la hache à la main. J’ai protesté vivement contre cette violation de la parole donnée, mais on m’a répondu que nous n’étions que des rebelles à notre roi légitime, Jacques II, détrôné en Angle terre par Guillaume III d’Orange, et que nous méritions la mort. Les quelques malheureux qui ont survécu au carnage sont maintenant captifs des sauvages et promis à un sort misérable, indigne de chrétiens.
    Louis secoua la tête en réprimant sa colère à l’égard de Portneuf et de Courtemanche, qu’il se promit de réprimander vertement. Il n’en répondit pas moins :
    â€” Vous devez vous en prendre au gouverneur et aux peuples de la Nouvelle-York et d’Albany, qui sont la cause de la guerre actuelle, puisqu’ils ont armé les Iroquois, les ont conseillés et incités à attaquer le Canada!
    â€” Mais monsieur le comte de Frontenac, la NouvelleYork et le Massachusetts sont deux gouvernements distincts, qui doivent répondre séparément de leurs actes. Nous n’avons jamais été en guerre avec le Canada et nous serions

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