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Funestes présages

Funestes présages

Titel: Funestes présages Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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même. La drogue a été mise dans une chope quand le plateau était à la cuisine. Puis on l’a apporté ici et les dés en étaient jetés.
    — Donc n’importe lequel d’entre nous aurait pu prendre ce gobelet ? questionna Cuthbert, les yeux écarquillés d’horreur.
    — Oh, oui ! L’assassin vous envoie un avertissement. Il peut frapper quand et où il veut. S’il l’avait voulu, il aurait pu tuer deux ou trois d’entre vous... voire vous tous.
    Corbett se rassit.
    — Et il jouera ce jeu-là jusqu’à ce qu’il soit satisfait.
    — Mais que pouvons-nous faire ? se lamenta frère Richard.
    — Prier, être prudents pendant vos promenades, vous méfier de la nourriture et de la boisson.
    Le clerc tapa sur la table.
    — Et me dire la vérité. Alors, Messire le prieur, vous allez vous y résoudre, n’est-ce pas ? De quoi débattait le concilium ce matin ? Que dois-je encore savoir au sujet de l’abbaye de St Martin-des-Marais ?

 
    Chapitre 6
    Potest nocenti contingere, ut lateat, latendi fides non potest.
    Les coupables peuvent se cacher, mais n’ont jamais l’esprit en paix.
    Sénèque
    Le griffon grondait, terrible et repoussant, gueule ouverte montrant une langue dardée et des dents acérées. Ses yeux protubérants jetaient des regards furieux, ses oreilles dressées pointaient en arrière comme celles d’un chien prêt à l’attaque. Taillé dans la pierre, il faisait saillie à l’angle d’un mur, toujours à l’affût d’un ennemi invisible. Corbett l’examina avec soin. Enfant, ces sculptures l’effrayaient et, quand sa mère l’emmenait à l’église paroissiale, il en détournait les yeux. Il éprouvait la peur enfantine qu’à la nuit tombée, une fois le soleil disparu et la lune cachée derrière les nuages, ces gargouilles, ces griffons grondants, ces dragons dont la queue battait l’air, ces ogres à la tête de babouin, ces singes au visage humain prennent vie et descendent en rampant le long des murs pour aller danser sur les tombes du cimetière. Corbett eut un petit sourire. D’une certaine façon, il y croyait encore. Quand les ténèbres descendaient, de quelque nature qu’elles soient, d’immondes créatures se glissaient dehors.
    — C’est dans l’âme, chuchota-t-il, qu’on fait l’expérience des horribles nuits de l’Enfer.
    Il se tenait devant l’église abbatiale et leva les yeux vers le tympan au-dessus du portail. On y voyait le Christ au Jugement dernier, la main gauche un peu levée, la droite tenant l’épée de justice. Des séraphins étaient groupés autour de sa tête auréolée. À la droite du Sauveur se trouvaient les bons, mains tendues pour recevoir sa grâce. À sa gauche, des démons sous forme de centaures, tous munis d’épées, de javelots, de poignards et de lances afin de pousser et de piquer leurs victimes, entraînaient les méchants, une rangée de félons condamnés, la hart au col, vers les flammes éternelles. Corbett aurait voulu pouvoir monter tout en haut pour observer les sculptures de plus près. Les tailleurs de pierre, qui ne manquaient pas de malice, profitaient souvent de l’occasion pour faire le portrait de leurs ennemis aussi bien que de leurs amis. Deux grands visages, les yeux aux aguets, flanquaient le portail voûté sous le tympan. À droite se trouvait un saint homme de moine, les yeux levés au ciel. Celui de gauche, bouche bée, sans nul doute pris de vin, avait le regard vide. Le clerc contourna l’église et y entra par le porche de Galilée. Il y avait des bancs de chaque côté afin que, par mauvais temps, les moines puissent méditer, réfléchir ou sommeiller selon leur humeur. L’édifice était désert. Des bouffées d’encens, comme la prière des anges, flottaient dans la fraîche brise de l’après-midi. Des cierges de cire vierge dans leur support de fer dispensaient de la lumière et un doux parfum rappelant l’été.
    Corbett fit le tour de l’église. Il s’arrêtait de temps en temps pour examiner les peintures murales aux vives couleurs. Elles représentaient différentes scènes de la Bible. Le Christ parmi les morts, se tenant sur le rivage de l’Enfer et regardant avec chagrin au-delà de la mer de la damnation l’armée des damnés. Le Christ nourrissant les cinq mille hommes, femmes et enfants de pain et de poisson. Sa Passion et sa mort dans toute leur horreur : la tête vaincue et couronnée d’épines, le sang ruisselant des plaies des mains et des

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