Furia Azteca
courage avant d'avoir fait plusieurs lieues. quand ils eurent rencontré des rats géants, trop bien nourris, des serpents et autres vermines, leur détermination s'est changée en horreur et ils se sont enfuis dans une déroute bien peu digne.
Une fois dehors, ils ont donné l'ordre, en dépit des protestations et des lamentations des Indiens, de condamner les entrées du souterrain en roulant devant de gros blocs de pierre, afin de " murer et dissimuler à jamais la porte de service de l'enfer ", comme l'a dit Fray Bernardino. C'est une décision tout à fait justifiée, qu'on aurait d˚ prendre depuis longtemps et on ne peut la critiquer puisqu'elle nous rappelle qui priait pour que son propre corps soit disposé pour toujours devant la Porte de l'Enfer, afin que les pauvres pécheurs ne puissent plus y accéder. Cependant, nous regrettons de penser que nous ne connaîtrons jamais l'étendue de ce 518
réseau de grottes souterrain et que nous ne pourrons pas récupérer les trésors que les personnages de haut rang emportaient sans aucun doute dans la tombe avec eux. Et, ce qui est pire, nous craignons que la décision intempestive des Dominicains ne soit pas de nature à rendre les Indiens plus réceptifs à la Foi et puis plus aimants envers ceux qui la leur apportent.
Nous regrettons également de devoir vous dire que nous ne sommes, non plus, guère aimés de nos propres compatriotes, ici en Nouvelle-Espagne.- Les responsables chargés des Archives de la Couronne pour les Indes ont peut-
être déjà reçu des communications de personnes se plaignant de notre "
ingérence " dans les problèmes séculiers. Dieu sait qu'ils s'en plaignent à
nous, en particulier les propriétaires qui emploient beaucoup de travailleurs indiens dans leurs fermes et leurs plantations. Ces seigneurs-propriétaires ont même fait un jeu de mots avec notre nom et nous appellent irrespectueusement l'évêque Zurriago, " la Courge ". Tout cela, Sire, parce que nous avons osé dénoncer en chaire leur façon de faire littéralement mourir leurs Indiens à la t‚che.
" Et pourquoi ne le ferions-nous pas ? demandent-ils. Il y a bien quinze mille Peaux-Rouges pour un Banc dans ce pays. quel mal y a-t-il à réduire cette dangereuse proportion, surtout si on peut, par la même occasion, faire accomplir un travail utile à ces misérables ? "
Les Espagnols qui tiennent ce raisonnement prétendent avoir une justification religieuse, à savoir que nous, les Chrétiens, avons soustrait les Indiens aux ouvres du Démon et à une damnation inévitable ; que nous leur avons apporté un espoir de salut, que par conséquent ces Indiens nous doivent une éternelle reconnaissance, à nous qui sommes leurs sauveurs. Le chapelain de Votre Majesté ne peut nier qu'il y ait une certaine logique dans cette argumentation, mais nous ne pensons pas que la dette qu'ils ont à notre égard soit une raison pour les faire mourir arbitrairement par suite de brutalités, de famine et autres mauvais traitements. En tout cas, pas avant qu'ils n'aient été baptisés et pleinement confirmés dans leur Foi.
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…tant donné le caractère incomplet et approximatif du cadastre et du recensement en Nouvelle-Espagne, nous ne pouvons vous donner qu'une évaluation grossière du nombre des indigènes, maintenant et dans le passé.
Toutefois, on peut penser qu'il y avait autrefois environ six millions de Peaux-Rouges qui vivaient sur le territoire de ce qui est devenu la Nouvelle-Espagne. Beaucoup sont morts dans les combats livrés pour la Conquête. De plus, dans ces neuf années, on estime à deux millions et demi le nombre des Indiens, sous domination espagnole, qui ont succombé à
diverses maladies - et Dieu sait combien dans les régions qui ne sont pas encore soumises - et ils continuent à mourir partout en grande quantité.
Il semble que Notre Seigneur ait voulu rendre cette race rouge particulièrement vulnérable à certaines affections qui ne paraissent pas avoir eu un caractère endémique jusqu'à présent. Alors qu'il y avait déjà
des épidémies de vérole (ce qui n'est pas surprenant, vu les mours licencieuses de ces gens), la peste bubonique, le choléra morbus, la petite vérole et les oreillons n'existaient pas. L'apparition de ces maladies est peut-être une simple coÔncidence avec la défaite de ce peuple, ou bien un ch‚timent que Dieu leur envoie, mais il est à noter qu'elles font des ravages bien plus considérables qu'elles
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