Furia Azteca
peine, lorsque Zyanya remarqua simplement, mais avec une certaine excitation dans la voix : " quand je pense que c'est la première fois que je vais m'en aller si loin. "
A ces paroles, je sentis mon cour se gonfler d'encore plus d'amour pour elle. Elle s'aventurait dans ce qui représentait pour elle l'inconnu le plus total et elle avait confiance parce qu'elle était sous ma protection.
J'éclatais d'orgueil et de reconnaissance envers nos deux tonalli qui avaient permis notre rencontre. Tous les gens
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que je connaissais étaient comme des restes de la veille ou de l'avant-veille, alors que tout dans Zyanya était frais et neuf et n'avait pas été
banalisé par l'habitude.
" Jamais je n'aurais cru, me disait-elle en écartant grand les bras, qu'il puisse y avoir tant de terre avec rien que de la terre. "
Même devant le paysage terne de l'isthme, elle poussa des exclamations qui me firent sourire et partager son enthousiasme. Il en fut pareillement pendant toute notre vie commune. Gr‚ce au plaisir tout neuf qu'elle éprouvait de chaque chose, elle me la faisait voir sous un jour éclatant et exotique.
" Regarde ce buisson, Z‚a, il est vivant. Fais attention. Il a peur, le pauvre. Tu vois ? quand je touche une de ses branches, il referme ses feuilles et ses fleurs en montrant des épines qui ressemblent à des crocs blancs. "
Elle aurait pu être une jeune déesse, dernière née de Teteoinnan, la mère des dieux, qu'on aurait envoyée des cieux pour faire la connaissance de la terre. Tout l'intriguait, l'émerveillait et la réjouissait, y compris moi et même elle-même. Elle était ardente et vive comme l'éclat toujours en mouvement d'une émeraude. J'étais sans cesse surpris par l'attitude inattendue qu'elle adoptait vis-à-vis de choses que je pensais aller de soi.
" Non, on ne va pas se déshabiller ", me dit-elle, la première nuit de notre voyage. " On va faire l'amour, bien s˚r, mais avec nos vêtements, comme dans les montagnes. Laisse-moi conserver cette dernière pudeur jusqu'à notre mariage. quand nous serons nus pour la première fois, ce sera si nouveau et si différent que nous croirons ne l'avoir jamais fait. "
Je vous le répète, Excellence, un récit détaillé de notre vie conjugale manquerait totalement de sel, parce que des sentiments comme le bonheur et la joie sont bien plus difficiles à rendre que de simples péripéties. Je ne pourrais que vous dire que j'avais vingt-trois ans et elle vingt et, qu'à
cet ‚ge, les amants sont capables de l'attachement le plus fort et le plus durable qu'ils connaîtront jamais. Entre nous, ce premier amour n'a jamais faibli ; il a grandi en intensité et en profondeur, mais je ne saurais vous dire pourquoi.
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Cependant, quand j'y repense, je crois que Zyanya a su l'exprimer, en ce jour si lointain o˘ nous sommes partis ensemble. Un de ces comiques oiseaux à la course rapide fol‚trait autour de nous. C'était la première fois qu'elle en voyait un et elle me dit pensivement : "Comment se fait-il qu'un oiseau préfère la terre au ciel ? Ce ne serait pas mon cas, si j'avais des ailes. Et toi, Z‚a ? "
Ayyo, son esprit avait vraiment des ailes et j'ai profité, moi aussi, de cette joyeuse légèreté. Dès le début, nous sommes devenus des camarades partageaht une aventure perpétuelle. Nous aimions l'aventure et nous nous aimions. Il n'est pas possible de demander aux dieux plus que ce qu'ils nous ont donné à Zyanya et à moi - sauf peut-être en ce qui concerne la promesse de son nom : que ce soit pour toujours.
Le second jour, nous rencontr‚mes une caravane de pochteca qui se dirigeait vers le nord, chargée de carapaces de tortues. Ils allaient les vendre à
des artisans olmeca qui, en les chauffant, les tordant et les façonnant, en feraient des ornements et des incrustations. Les marchands nous proposèrent de nous joindre à eux et bien que nous eussions pu avancer plus rapidement seuls, nous rest‚mes avec eux pour être plus en sécurité, jusqu'à ce qu'ils soient arrivés à destination dans la ville carrefour de Coatzalcoalcos.
Nous venions d'arriver sur la place du marché et Zyanya, remplie d'excitation, furetait entre les étals débordant de marchandises, quand une voix familière m'interpella : " «a alors, vous n'êtes donc pas mort ! Est-ce qu'on aurait coincé ces brigands pour rien ?
- Gourmand de Sang ! m'exclamai-je, tout joyeux. Et Cozcatl ! qu'est-ce qui vous amène par ici ?
- Oh,
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