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Galaad et le Roi Pêcheur

Galaad et le Roi Pêcheur

Titel: Galaad et le Roi Pêcheur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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récompenser. – Beaux seigneurs, répondit Bohort, je vous remercie, mais je n’irai point avec vous, sans vous offenser, car il me faut courir ailleurs si je veux empêcher une perte irréparable. » Ils le recommandèrent à Dieu, et la jeune fille le pria de venir la voir dès qu’il en aurait l’occasion. Il promit de s’en souvenir si l’aventure le menait par là et, sur ce, ils se séparèrent.
    Bohort galopa jusqu’à l’endroit où il avait vu son frère emmené par les deux chevaliers. Il regarda partout, espérant découvrir une trace de leur passage, mais n’en vit aucune. Il s’engagea dans la forêt et, au bout d’un moment, y croisa un homme qui, vêtu d’un habit religieux, montait un cheval plus noir que mûre. « Que cherches-tu, chevalier ? » demanda-t-il à Bohort. Celui-ci répondit : « Seigneur, je cherche mon frère que j’ai vu battre et emmener par deux chevaliers. – Ah ! Bohort ! dit l’autre, si je ne craignais de t’affliger et de te réduire au désespoir, je te conduirais un peu plus loin. – Je t’en prie, dit Bohort, conduis-moi. » Et il suivit le moine jusqu’à une petite clairière où gisait le cadavre ensanglanté d’un homme tué depuis peu.
    À cette vue, et croyant reconnaître son frère, Bohort fut saisi d’une telle douleur que, ne pouvant demeurer en selle, il tomba à terre et y resta un long moment évanoui. À peine revenu à lui, il se mit à se lamenter et à gémir puis, relevant le corps, il le hissa sur la selle de son cheval. « Seigneur, dit-il à l’homme, y a-t-il un ermitage ou une chapelle par ici, que je puisse enterrer dignement mon pauvre frère ? – Certes, répondit l’autre, tu trouveras une chapelle, tout près d’ici, au pied d’une tour. – Conduis-moi ! » dit Bohort. Et, montant en croupe avec, devant lui, croyait-il, le corps de Lionel, il suivit son guide et, peu d’instants après, tous deux arrivèrent devant une haute et forte tour au pied de laquelle se trouvait une espèce de masure en forme de chapelle. Ils mirent pied à terre, entrèrent et déposèrent le corps sur un grand tombeau de marbre qui se dressait là. Bohort eut beau cependant examiner les aîtres, il n’y découvrit ni eau bénite, ni croix. « Laissons-le ici, dit l’homme, et allons nous loger dans la tour. Demain matin, je reviendrai dire l’office pour le défunt. – Comment ? dit Bohort. Serais-tu prêtre ? – Certes, je le suis. – Dans ce cas, reprit Bohort, pourrais-tu me dire ce que signifiaient les deux songes que j’ai eus cette nuit ? – De quoi s’agit-il ? » demanda le prétendu prêtre. Bohort lui parla d’abord de l’oiseau qu’il avait vu sur l’arbre sec, puis il lui raconta son rêve de l’oiseau blanc et de l’oiseau noir, ainsi que celui des fleurs blanches et du bois pourri. « Je vais t’en expliquer une partie dès maintenant, dit l’homme. Pour l’autre, il te faudra attendre demain matin.
    « L’oiseau, reprit-il, semblable à un cygne est le symbole d’une femme qui t’aime d’amour depuis très longtemps et qui viendra bientôt te prier d’être son ami. Comme tu t’es abstenu de répondre, aucun doute, tu refuseras cette femme, et elle s’en ira mourir de chagrin si tu ne la prends en pitié. L’oiseau noir, lui, est le grand péché que tu commettras ce faisant, car tu n’auras pas agi par crainte de Dieu ou par vertu, mais afin que l’on te croie chaste et pour acquérir la vaine gloire de ce monde. Cette chasteté sera si funeste que ton cousin Lancelot en mourra, tué par les parents de cette femme, laquelle, de son côté, périra de dépit. Et l’on te réputera donc avec raison leur meurtrier à tous deux, comme on te répute déjà celui de ton frère, puisque, au lieu de le secourir dans sa détresse, tu t’es détourné de lui pour protéger la jeune fille, devoir qui ne t’incombait pas. Réfléchis un peu : quelle eût été la pire perte : son pucelage ou la vie de ton frère ? Certes, mieux vaudrait que toutes les filles du monde fussent dépucelées ! »
    Passablement surpris des paroles du prêtre, Bohort ne savait que dire. L’autre lui demanda : « As-tu bien compris la signification de ton songe ? – Assurément, répondit Bohort. – Eh bien, reprit l’autre, le sort de Lancelot, ton cousin, est entre tes mains. Il dépend de ton choix qu’il périsse ou soit sauvé. – Ah ! s’écria Bohort, il n’est rien dont je ne sois

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