Game Over - L’histoire d’Éric Gagné
quâune occasion de préserver une victoire survenait. La charge de travail était énorme mais je carburais encore à lâadrénaline. Jâétais parvenu à établir une routine dâentraînement et de repos qui me permettait de livrer la marchandise de façon constante, mais je mâattendais à ce que la deuxième moitié de la saison soit encore plus ardue.
Comme la quasi-totalité des joueurs, jâabordais donc le match des étoiles comme une sorte dâévénement social. Presque comme des vacances. Je me disais que jâallais y faire ma petite apparition,lancer une manche et inscrire mon nom dans le grand livre de lâhistoire du baseball pour officialiser le fait que jâavais un jour été une étoile.
Pour le reste, ce match ne revêtait pas beaucoup dâimportance. La plupart des lanceurs que je croisais me disaient:
â Au match des étoiles, on lance des rapides. Câest un festival offensif, ce nâest pas un match pour nous! Câest un spectacle conçu pour les frappeurs.
Telle était la règle tacite qui existait entre nous.
Le match des étoiles de Milwaukee était le 73 e de lâhistoire du baseball majeur. Quand le gérant Bob Brenly (des Diamondbacks de lâArizona) mâa désigné pour entreprendre la cinquième manche, la partie se déroulait normalement, comme tous les affrontements passés entre lâAméricaine et la Nationale.
Nous étions alors loin de nous douter que ce match allait se terminer en queue de poisson et que cette embarrassante situation allait à jamais changer le statut de la midsummer classic.
Nous détenions une avance de 4 à 1 quand je me suis présenté sur la butte pour affronter Torii Hunter (Twins du Minnesota), Alfonso Soriano (Yankees de New York) et Garrett Anderson (Angels dâAnaheim).
Hunter a été retiré sur un faible ballon. Puis avec un compte de 0-1, Soriano a retroussé une «bombe» loin de lâautre côté de lâallée de gauche. Il avait visiblement compris que je nâavais pas fait le voyage pour lancer des courbes et des changements de vitesse!
Garrett Anderson sâest ensuite fait retirer sur un roulant au premier but. Puis Randy Winn a enchaîné avec un double dans la gauche. Pour clore ma présence, jâai ensuite retiré sur élan Robin Ventura, des Yankees.
Jâavais lancé ma petite manche et les frappeurs avaient solidement cogné la balle. Bref, tout le monde était content!
Ce match «offensif» sâest corsé en huitième manche, alors que nous détenions une mince avance de 7-6 sur lâAméricaine. Opposé au droitier Rob Nen des Giants de San Francisco, Omar Vizquel (Indians de Cleveland) a créé lâégalité en cognant un triple dans la droite qui a poussé Robert Fick (Tigers de Detroit) au marbre.
Les deux gérants, Bob Brenly et Joe Torre, ont alors continué à utiliser tout leur personnel comme si de rien nâétait. Le match des étoiles étant considéré comme une sorte dâévénement socio-sportif, il était tout à fait normal pour eux de sâassurer que chaque joueur participe à lâévénement.
Après neuf manches câétait toujours lâégalité 7-7 et Torre nâavait plus quâun seul lanceur disponible: Freddy Garcia des Mariners de Seattle. Brenly était dans la même situation. Il ne lui restait que Vinny Padilla, des Phillies de Philadelphie.
Au terme de la onzième manche, la marque était toujours la même et Torre ne pouvait plus utiliser Garcia davantage sans risquer de chambarder la rotation de partants des Mariners. Même chose pour Brenly, qui avait aussi utilisé Padilla durant deux manches.
Bref, les deux équipes nâavaient plus suffisamment de joueurs pour terminer la rencontreâ¦
Après de longues minutes de délibérations, le commissaire Bud Selig a dû se rendre à lâévidence et décréter la fin de la rencontre sans quâil soit possible de déterminer un gagnant. Les 41 871 joyeux spectateurs se sont aussitôt transformés en 41 871 clients insatisfaits. Ils étaient totalement outrés de voir la fête se terminer sur une telle note. Et ils ont hué à pleins poumons pendant que les joueurs des deux équipes battaient en
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